«Question de vie ou de mort»Poutine, un tsar guerrier en quête de grandeur internationale
AFP
11.3.2024
Invasion de l'Ukraine, répression en Russie, confrontation avec l'Occident: c'est en chef de guerre autoritaire que Vladimir Poutine, au pouvoir depuis un quart de siècle, aborde la présidentielle pour rester au Kremlin six années de plus.
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11.03.2024, 07:39
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Le dirigeant russe, qui a fait réformer en 2020 la Constitution pour pouvoir rester aux commandes jusqu'en 2036, est assuré d'être réélu pour un cinquième mandat lors du scrutin organisé du 15 au 17 mars. Il en a déjà effectué deux de quatre ans et deux de six ans, avec entre les deux un intermède comme Premier ministre.
La verticale du pouvoir instaurée par Vladimir Poutine, issu du KGB soviétique et arrivé au Kremlin le 31 décembre 1999, a mis en évidence deux caractéristiques de son régime au fil des ans.
La première, celle d'un durcissement constant avec d'abord la mise au pas des oligarques, la deuxième guerre de Tchétchénie, l'étouffement des libertés publiques, des médias et de l'opposition.
Son plus célèbre opposant, Alexeï Navalny, est mort en février dans des circonstances troubles dans la prison de l'Arctique russe où il purgeait une longue peine pour «extrémisme».
Deuxième caractéristique: une quête de puissance géopolitique, avec la guerre en Géorgie (2008), l'annexion de la Crimée ukrainienne (2014), l'intervention militaire en Syrie (2015), et l'invasion de l'Ukraine (2022).
L'Europe, en particulier l'Allemagne d'Angela Merkel, avait cru pouvoir canaliser ces ambitions, pariant sur l'interdépendance économique via des achats massifs de gaz russe. En vain.
«Nouveau monde»
A 71 ans, Vladimir Poutine semble indéboulonnable. Le maître du Kremlin est certes empêtré dans la guerre en Ukraine et son armée a subi d'humiliantes défaites, mais il persiste, visant une victoire à l'usure grâce à la fatigue des bailleurs occidentaux et de la population ukrainienne.
Et, deux ans après le début de l'assaut, Vladimir Poutine voit des raisons d'y croire. Ses soldats, à l'offensive, se sont emparés de la ville forteresse d'Avdiïvka, dans l'est, et poussent face à des troupes ukrainiennes en manque de munitions et d'hommes frais. Fin février, le président russe a juré que ses soldats «ne reculeront pas» en Ukraine. Pour la Russie, c'est une «question de vie ou de mort», selon lui.
Dès le déclenchement de l'assaut, il a accusé l'Ukraine de «nazisme», revendiqué ses territoires et présenté le conflit comme une guerre par procuration ourdie par les Américains.
Toute opposition à l'invasion est depuis passible de prison. Des milliers de Russes ont été harcelés, poursuivis, emprisonnés ou poussés à l'exil.
Qu'importe les sanctions occidentales, qu'importe la Cour pénale internationale qui poursuit Vladimir Poutine pour la déportation d'enfants ukrainiens et qu'importe les pertes de l'armée. Car le président russe s'est donné une mission: en finir avec l'hégémonisme occidental. En octobre, il annonce avoir pour «tâche de bâtir un nouveau monde».
En confiance
Il faut dire que l'ex-agent du KGB, en poste en Allemagne de l'Est dans les années 1980, reste meurtri par la désintégration de l'Union soviétique et sa défaite dans la Guerre froide.
Et Vladimir Poutine peut se targuer de sa proximité avec la Chine, de la soif de l'Asie pour ses hydrocarbures ou encore de ces pays africains qui se tournent vers Moscou et ses groupes paramilitaires pour contrer le «néocolonialisme» occidental.
Le dirigeant russe porte un autre leitmotiv. Pour lui, la Russie est le porte-drapeau des valeurs «traditionnelles», face à ce qu'il juge être la «décadence» morale de l'Occident et sa tolérance à l'égard des LGBT+.
Avec l'échec de la contre-offensive ukrainienne de l'été 2023, Vladimir Poutine se sent les coudées plus franches, les Occidentaux se divisant sur la poursuite de l'aide à l'Ukraine.
Il a opéré un retour sur la scène internationale, et l'économie russe a globalement absorbé le choc des sanctions occidentales, malgré l'inflation et la dépendance envers la production militaire.
Tout puissant qu'il soit, le président reste cependant face à des défis. Sa guerre en Ukraine est loin d'être gagnée. La capacité des Russes, des élites et de l'économie à supporter ce conflit dans la durée reste une véritable interrogation. La mutinerie en juin 2023 des mercenaires de Wagner, mené par Evguéni Prigojine, longtemps un de ses fidèles, en a été l'illustration. La mort des chefs rebelles dans un crash d'avion, présenté comme accidentel, a permis au Kremlin de clore ce chapitre.
Répression
Sur le plan politique intérieur, le Kremlin ne tolère plus l'opposition. Certains sont morts, comme Alexeï Navalny ou encore Boris Nemtsov assassiné en 2015, et d'innombrables anonymes sont également derrière les barreaux pour avoir dénoncé l'invasion de l'Ukraine.
Néanmoins, pour une majorité de ses compatriotes, Vladimir Poutine reste celui qui a d'abord rendu son honneur à une Russie minée par la misère, la corruption et la déchéance alcoolique de son prédécesseur Boris Eltsine.
Âgé de 47 ans lorsqu'il entre au Kremlin, il promet l'amitié aux Occidentaux et développe l'économie, profitant des cours favorables des hydrocarbures.
L'Américain George W. Bush le juge à l'époque «remarquable», l'Allemand Gerhard Schröder et l'Italien Silvio Berlusconi sont ses amis. Malgré la répression qui s'installe, malgré les exactions en Tchétchénie.
Mais les germes du divorce avec l'Occident sont déjà là. Et Vladimir Poutine les présente en 2007 à Munich dans un réquisitoire virulent face à des dignitaires occidentaux.
Il accuse l'Otan de menacer la Russie et reproche aux Etats-Unis de se voir en «seul souverain» du monde. Des arguments recyclés pour justifier l'invasion de l'Ukraine.
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