Missiles Neptune Après le naufrage du Moskva, la Russie intensifie ses frappes

ATS

15.4.2022 - 14:56

Au lendemain du naufrage de son vaisseau amiral en mer Noire, la Russie a promis vendredi d'intensifier ses frappes sur Kiev en réponse à des attaques qu'elle qualifie de «terroristes». La première a visé une fabrique de missiles Neptune.

Vaisseau amiral de la marine russe dans la Mer Noire, le Moskva a coulé. Les Ukrainiens affirment qu'ils lui ont envoyé un missile tandis que les Russes évoquent un incendie à bord.
Vaisseau amiral de la marine russe dans la Mer Noire, le Moskva a coulé. Les Ukrainiens affirment qu'ils lui ont envoyé un missile tandis que les Russes évoquent un incendie à bord.
ATS

«Le nombre et l'ampleur des frappes de missiles sur des sites de Kiev vont augmenter en réplique à toutes les attaques de type terroriste et aux sabotages menés en territoire russe par le régime nationaliste de Kiev», a mis en garde le ministère russe de la Défense.

Dans la nuit, c'est une usine de missiles de la région de Kiev qui a été touchée par une frappe russe, ont constaté vendredi des journalistes de l'AFP sur place.

Le ministère russe a de son côté annoncé la destruction d'un atelier de production de missiles dans l'usine Vizar située dans la banlieue de Kiev.

L'usine Vizar est l'une des usines ukrainiennes qui fabriquent ces missiles, indique sur son site internet UkrOboronProm, la holding d'Etat qui chapeaute les usines d'armement ukrainiennes.

Un atelier de l'usine et un immeuble administratif la jouxtant, situés dans la localité de Vychnevé, à une trentaine de kilomètres au sud-ouest de la capitale ukrainienne, ont été gravement endommagés, a constaté l'AFP. Une cinquantaine de véhicules garés sur le parking à proximité ont aussi eu leurs vitres soufflées.

«La facture pour le Moskva»

Un artisan, Andrii Sizov, 47 ans, a confié à l'AFP avoir été avoir entendu «cinq frappes». «Pour moi, c'est la facture pour la destruction du Moskva», a-t-il dit.

La Russie a affirmé jusqu'à présent que le croiseur Moskva, navire amiral de sa flotte de la mer Noire, avait subi mercredi un incendie et des détonations de ses propres munitions. Le navire a coulé jeudi.

Les Ukrainiens ont eux affirmé avoir frappé le navire avec des missiles de croisière de fabrication nationale Neptune, infligeant un revers considérable et une humiliation majeure à l'armée russe.

Accusations renvoyées

La Russie a par ailleurs affirmé jeudi que l'Ukraine avait bombardé des villages russes frontaliers, notamment par une incursion d'hélicoptères de combat en territoire russe.

Kiev a rejeté ces accusations, et accusé en retour les services spéciaux russes de mener des «attaques terroristes» dans la région frontalière pour alimenter «l'hystérie anti-ukrainienne».

Le Comité d'enquête russe a affirmé que deux hélicoptères ukrainiens «équipés d'armes lourdes» étaient entrés en Russie et avaient procédé à «au moins six frappes sur des immeubles d'habitation dans le village de Klimovo», dans la région de Briansk.

Sept personnes, dont un bébé, ont été blessées «à des degrés divers», selon ces accusations russes, dont le bien-fondé est impossible à vérifier de manière indépendante.

Tirs sur des bus d'évacuation de civils

Le parquet général ukrainien a affirmé vendredi que sept civils avaient été tués et 27 blessés jeudi dans des tirs russes sur des bus d'évacuation dans la région de Kharkiv, dans l'est du pays.

Dans la région de Kherson (sud), un nouvel échange de prisonniers de guerre russes et ukrainiens a eu lieu jeudi, a annoncé vendredi l'armée ukrainienne.

La Russie a également affirmé avoir tué une trentaine de «mercenaires polonais» dans une frappe menée dans le nord-est de l'Ukraine.

En outre, Moscou a mis en garde vendredi la Suède et de la Finlande contre une adhésion de ces deux pays à l'Otan qui aurait des «conséquences» tant pour eux deux que pour la sécurité européenne.

Helsinki et Stockholm envisagent de rejoindre l'Alliance atlantique en réaction à l'offensive militaire russe contre l'Ukraine.

«Coup dur»

La perte du croiseur Moskva est «un coup dur» porté à la flotte russe dans la région, a déclaré jeudi le porte-parole du Pentagone John Kirby, avec «des conséquences sur leurs capacités» de combat.

Le navire «assurait la couverture aérienne des autres vaisseaux pendant leurs opérations, notamment le bombardement de la côte et les manoeuvres de débarquement», a détaillé de son côté le porte-parole de l'administration militaire régionale d'Odessa Sergueï Bratchouk.

Traduisant dans les mots le niveau d'hostilité extrême atteint dans ce conflit, autant que la gravité des atrocités imputées aux forces russes, le Parlement ukrainien a voté jeudi une résolution qualifiant l'offensive russe de «génocide».

«Milliers de chars»

Dans la plus grande région du Donbass, celle de Donetsk, où «des combats se déroulent sur toute la ligne de front», trois personnes ont été tuées et sept blessées, selon la présidence ukrainienne.

L'autre région de ce bassin minier, celle de Lougansk, a elle été le théâtre de 24 bombardements qui ont fait deux morts et deux blessés, selon la même source.

La Russie, dont l'offensive massive annoncée dans le Donbass n'a toujours pas commencé, peine à prendre le contrôle total de Marioupol, un port stratégique de la mer d'Azov.

Le président Zelensky est resté depuis le début de la guerre retranché avec son administration dans le centre de la capitale, d'où il n'a cessé de réclamer aux Occidentaux des livraisons d'armements lourds qui font défaut pour résister à la puissance de feu des Russes.

«La Russie a amené des milliers de chars, de pièces d'artillerie et de toutes sortes d'armes lourdes dans la région, espérant tout simplement écraser notre armée», a martelé jeudi le ministre ukrainien des Affaires étrangères Dmytro Kuleba.

«Calcinés»

Le président américain Joe Biden a finalement accédé mercredi à la demande ukrainienne, promettant une nouvelle aide militaire massive, de 800 millions de dollars, comprenant des blindés et des canons de longue portée.

C'est à Marioupol (sud-est) que pourrait être enregistré dans l'immédiat le plus lourd bilan humain de cette guerre. Les autorités ukrainiennes ont évoqué quelque 20'000 morts.

La cité portuaire martyre, où l'AFP a pu se rendre à l'occasion d'un voyage de presse organisé cette semaine par l'armée russe, a subi un déluge de feu, qui a ravagé les infrastructures et les habitations du demi-million de personnes qui y vivaient lorsque Vladimir Poutine a lancé son offensive contre l'Ukraine le 24 février.

Galina Vassilieva, 78 ans, y pointait du doigt un immeuble de neuf étages totalement brûlé. «Les gens sont calcinés à l'intérieur», raconte cette retraitée en faisant la queue devant un camion de séparatistes pro-russes distribuant de l'aide humanitaire.

Aujourd'hui, après plus de quarante jours, les combats sont limités à la vaste zone industrielle proche du bord de mer, les forces russes et leurs alliés séparatistes de Donetsk ayant imposé puis resserré peu à peu leur terrible siège.

La conquête de cette ville permettrait aux Russes de consolider leurs gains territoriaux en reliant la région du Donbass, en partie contrôlée par des séparatistes prorusses depuis 2014, à la Crimée annexée la même année.

Des analystes considèrent que le président russe Vladimir Poutine, embourbé face à la résistance acharnée des Ukrainiens, veut obtenir une victoire dans le Donbass avant le défilé militaire du 9 mai marquant sur la Place Rouge la victoire soviétique sur les nazis en 1945.