Slovaquie Robert Fico, ex-Premier ministre populiste au penchant pro-Poutine

ATS

26.9.2023 - 07:40

L'ancien Premier ministre slovaque Robert Fico risque de faire pencher la politique étrangère de son pays en faveur du Kremlin. Son parti, Smer-SD, est pressenti pour remporter les élections anticipées de samedi.

La victoire de M. Fico pourrait entraîner un revirement de la politique étrangère de ce pays de 5,4 millions d'habitants, membre de l'Union européenne et de l'Otan, qui a fourni une aide substantielle à l'Ukraine depuis le début de l'invasion russe en février 2022.
La victoire de M. Fico pourrait entraîner un revirement de la politique étrangère de ce pays de 5,4 millions d'habitants, membre de l'Union européenne et de l'Otan, qui a fourni une aide substantielle à l'Ukraine depuis le début de l'invasion russe en février 2022.
KEYSTONE

À quelques jours du scrutin, qui fait suite à l'effondrement d'une fragile coalition anti-corruption au pouvoir depuis 2020, le Smer-SD arrive en tête des sondages avec environ 20% des voix, ce qui fait de M. Fico le favori pour reprendre le poste de chef de gouvernement après cinq ans d'intervalle.

La victoire de M. Fico pourrait entraîner un revirement de la politique étrangère de ce pays de 5,4 millions d'habitants, membre de l'Union européenne et de l'Otan, qui a fourni une aide substantielle à l'Ukraine depuis le début de l'invasion russe en février 2022.

M. Fico, qui avait salué l'adoption de l'euro par la Slovaquie comme une «décision historique», s'en prend désormais ouvertement à l'UE, à l'Otan et à l'Ukraine ravagée par la guerre, afin de séduire les électeurs d'extrême gauche et d'extrême droite.

«Autoritarisme de Poutine apprécié»

«La guerre en Ukraine a commencé en 2014 lorsque des fascistes ukrainiens ont tué des victimes civiles de nationalité russe», a déclaré M. Fico, 59 ans, dans une vidéo récente, répétant des affirmations russes non prouvées.

«Il est de notre intérêt vital d'avoir de bonnes relations avec tous les pays du monde, y compris la Fédération de Russie», a-t-il ajouté, qualifiant ses opposants pro-occidentaux de «bellicistes». Il a récemment déclaré qu'il n'autoriserait pas l'arrestation du président russe Vladimir Poutine, poursuivi par un mandat international, s'il venait un jour en Slovaquie.

Dans un livre récemment publié et intitulé «Fico: Obsédé du pouvoir», le sociologue slovaque Michal Vasecka affirme que ce politicien «apprécie sans aucun doute l'autoritarisme de M. Poutine». «Sa relation avec la Russie est historiquement déterminée par la devise socialiste 'Avec l'Union soviétique pour l'éternité'», ajoute-t-il.

Avocat de profession, M. Fico a entamé sa carrière politique au sein du parti communiste juste avant que la révolution de velours de 1989 ne balaie le régime de l'ancienne Tchécoslovaquie et n'ouvre la voie au capitalisme et à la démocratie.

Robert Fico s'est forgé une réputation européenne en tant que représentant de son pays auprès de la Cour européenne des droits de l'Homme à Strasbourg de 1994 à 2000. En 1999, il quitte le Parti de la gauche démocratique (SDL), héritier politique du parti communiste, pour fonder le sien, le Smer-Social-Démocrate (Smer-SD).

Liens avec l'extrême droite

En 2006, ce parti remporte une victoire écrasante au Parlement, catapultant M. Fico au poste de Premier ministre, deux ans après l'adhésion de la Slovaquie à l'UE.

Il monte alors une coalition avec le Parti national slovaque (SNS) d'extrême droite, qui partage sa rhétorique anti-réfugiés et ses penchants populistes, puis tir parti de la crise financière mondiale de 2008 et 2009 pour renforcer sa popularité en refusant d'imposer des mesures d'austérité.

La Slovaquie entre dans l'UE sous son mandat, en 2009, mais il est renvoyé dans l'opposition en 2010. Il revint deux ans plus tard, remportant les élections après la chute d'une coalition de centre-droit sur fond d'allégations de corruption.

En revanche il a subi un coup en 2014 lorsqu'Andrej Kiska, philanthrope et novice en politique, l'a devancé à la présidence slovaque. Lors de la crise migratoire en Europe en 2015, M. Fico a adopté une position ferme à l'égard des migrants, refusant de «donner naissance à une communauté musulmane distincte en Slovaquie» et critiquant le programme européen de quotas visant à redistribuer les réfugiés.

«Roses rouges»

Le Smer-SD a remporté les élections de 2016, mais le dernier mandat de M. Fico à la tête du gouvernement s'est achevé deux ans plus tard, après le meurtre du journaliste Jan Kuciak et de sa fiancée. Le crime a déclenché une vague de protestations antigouvernementales dans toute la Slovaquie, Kuciak ayant dénoncé les liens entre la mafia italienne et le gouvernement Fico, dans son dernier article publié à titre posthume.

Une coalition anticorruption a pris le pouvoir lors d'élections en 2020, mais M. Fico a conservé son siège au parlement. Né le 15 septembre 1964, M. Fico rejette les étiquettes de «populiste» et de «démagogue».

Parlant couramment l'anglais, il aime les voitures rapides, le football et la musculation, et est marié à une autre avocate, avec laquelle il a un fils. Selon les médias slovaques, le couple est séparé. Le dicton préféré de Robert Fico est «la patience apporte toujours des roses rouges».