TurquiePlus de 1000 arrestations cette année, selon les pro-Gülen
sn, ats
13.3.2024 - 17:34
Plus d'un millier de personnes présentées comme des opposants ont été arrêtées depuis le début de l'année en Turquie, selon les avocats du mouvement Gülen. Après une décision de justice récente, ils sont venus à l'ONU à Genève pour mettre la pression sur Ankara.
Keystone-SDA, sn, ats
13.03.2024, 17:34
13.03.2024, 18:00
ATS
Le mouvement a été rendu responsable par le président Recep Tayyip Erdogan de la tentative de coup d'Etat en 2016 en Turquie. Des dizaines de milliers de personnes avaient été arrêtées alors et plus de 150'000 magistrats avaient été remplacés. Au total, 15'000 seraient actuellement détenues, accusées d'être proches du mouvement du prédicateur Fethullah Gülen, en exil aux Etats-Unis.
Autrefois allié et désormais pire ennemi de M. Erdogan, ce groupe est considéré comme terroriste par le gouvernement turc. Et par les pays musulmans plus largement. «C'est le bon moment pour que des organes onusiens et tous les acteurs impliqués de mettre la pression sur la Turquie», a affirmé mercredi à Keystone-ATS l'avocat Coşkun Yorulmaz, qui a fui à Londres en 2016 avant une possible arrestation.
Condamnation à Strasbourg
Avec son confrère Nurullah Albayrak, qui défend Fethullah Gülen et qui a été mis sur une liste turque des personnes à cibler, il a rencontré depuis lundi plusieurs experts indépendants de l'ONU. Et des représentants d'Etats membres, mais pas de la Suisse.
En juin dernier, la Grande chambre de la Cour européenne des droits de l'homme avait condamné la Turquie pour la durée «excessive» de la détention provisoire d'un ancien dirigeant d'un groupe de presse turc.
Selon les avocats, M. Erdogan et son ministre de la justice accusent la juridiction de Strasbourg de soutenir les «terroristes» ou considèrent cette décision comme ne faisant pas jurisprudence. Or, des milliers d'autres cas vont arriver, disent-ils.
Décisions à l'ONU
«Nous n'avons jamais eu une décision comme celle-là. Si la Turquie est poussée à l'appliquer, cela fera une différence», dit M. Yorulmaz. «Nous recherchons la justice aussi pour les personnes qui vont encore être détenues», dit-il. Selon les avocats, 50'000 personnes attendent un verdict en appel.
La Turquie a aussi été visée par le Comité des droits de l'homme de l'ONU en 2022. De nombreuses plaintes sont pendantes devant cet organe, fait remarquer une experte de l'Association internationale de plaidoyer pour les droits humains (IAHRA) à Genève.
Cette année, les autorités turques seront auditionnées à Genève au Comité de l'ONU contre la torture, puis à celui des droits de l'homme, constitués d'experts indépendants. Le pays, qui collabore avec ceux-ci, sera examiné par les Etats membres de l'ONU au Conseil des droits de l'homme en début d'année prochaine.
Il est toutefois «en guerre» avec le Groupe de travail sur les détentions arbitraires qui a relayé 25 déclarations contre lui ces dernières années, davantage que l'Iran ou la Chine, dit la responsable de l'IAHRA.
Elections attendues
Il y a quelques jours, Recep Tayyip Erdogan a annoncé que les prochaines élections locales seraient les dernières sous sa présidence. Les avocats pensent qu'il ment ou qu'il décalera les prochains scrutins et que ceux-ci n'auront pas d'effet sur la situation des droits humains dans le pays.
Ils estiment que, même si le président ne dirigeait plus celui-ci, le discours anti-Gülen a tellement pris dans la société turque qu'il faudrait du temps avant que le mouvement soit à nouveau autorisé. «Cela ne changerait pas immédiatement. Mais il y aurait des améliorations», dit M. Albayrak. Les avocats reviendront à Genève dans quelques mois pour les discussions sur leur pays.