Droit d'auteurUE: feu vert à la réforme du droit d'auteur
ATS
15.4.2019 - 13:55
La réforme controversée du droit d'auteur européen est définitivement validée. Les Etats membres de l'UE ont approuvé lundi ce texte très attendu par les médias et les artistes, mais combattu par les plateformes américaines et les partisans de la liberté du net.
Cette dernière étape devait être une formalité. Six pays ont tout de même voté contre: l'Italie, la Finlande, la Suède, le Luxembourg, la Pologne et les Pays-Bas. Une minorité toutefois insuffisante pour bloquer le texte. La Belgique, l'Estonie et la Slovénie se sont par ailleurs abstenues.
Dans un communiqué, le ministre roumain de la culture Valer Daniel Breaz, dont le pays assure la présidence tournante du Conseil européen, s'est félicité d'un «texte équilibré».
«Des règles claires»
Les Etats membres auront 24 mois pour transposer les nouvelles règles dans leurs législations nationales. La réforme avait reçu le feu vert des eurodéputés fin mars, dans un hémicycle divisé (348 voix pour, 274 contre).
Le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker a lui aussi salué la fin de cette procédure lancée en septembre 2016. «L'Europe disposera désormais de règles claires qui garantiront une rémunération équitable aux créateurs, des droits forts pour les utilisateurs et la responsabilité des plateformes», a-t-il estimé.
Le texte approuvé entend adapter à l'ère du numérique la législation européenne du droit d'auteur, datant de 2001, une époque où YouTube n'existait pas.
Les partisans de la réforme insistaient pour que les «géants américains devenus des ogres», tels Google et Facebook, qui profitent des retombées publicitaires générées par les oeuvres qu'ils hébergent, rétribuent plus justement les musiciens, cinéastes, photographes, éditeurs, journalistes.
Crainte d'une censure
Deux articles étaient dans le collimateur des opposants. Le «13» vise à renforcer la position de négociation des créateurs et ayants droit (compositeurs, artistes...) face aux plateformes utilisant leurs contenus, comme YouTube ou Tumblr.
Certains craignent l'utilisation de filtres de téléchargement automatiques, accusés par les partisans de la liberté sur internet d'ouvrir la porte à une forme de censure.
«Le lobby du divertissement ne s'arrêtera pas là. Ces deux prochaines années, il fera pression pour des applications au niveau national qui ignorent les droits fondamentaux des utilisateurs. Il sera plus important que jamais pour la société civile de maintenir la pression dans les Etats membres», a twitté l'eurodéputée allemande Julia Reda, du parti Pirate et figure de proue des opposants.
«Droit voisin» pour la presse
L'autre article controversé, le «11», préconise la création d'un «droit voisin» du droit d'auteur pour les éditeurs de presse. Il doit permettre aux médias de se faire mieux rémunérer lors de la réutilisation en ligne de leur production par des agrégateurs d'informations, comme Google News, ou des réseaux sociaux, comme Facebook.
De son côté le CCIA Europe, représentant du lobby de l'industrie numérique à Bruxelles, a dénoncé un texte «disproportionné». «Nous craignons que cela ne nuise à l'innovation en ligne et ne restreigne les libertés en ligne en Europe», a déclaré Maud Sacquet, de la CCIA, dans un communiqué.
La Suisse attend
En théorie, cette nouvelle législation ne doit pas s'appliquer à la Suisse, non membre de l'UE. Il est toutefois peu probable que les filtres de téléchargement développés par les grandes entreprises internationales ne soient pas appliqués sur le territoire helvétique. On peut supposer que la Confédération sera traitée comme les autres pays de l'UE.
La loi sur le droit d'auteur est aussi en cours de révision en Suisse. Début mars, le Conseil des Etats a toutefois renvoyé la proposition à la commission compétente, chargée de tenir compte de l'évolution juridique actuelle dans l'UE et de revoir certains points controversés.
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