Mise en gardeUn effondrement économique afghan aurait de «graves conséquences»
ATS
19.12.2021 - 18:39
Le Pakistan a mis en garde dimanche contre de «graves conséquences» si l'effondrement économique de l'Afghanistan se poursuivait, exhortant lors d'une conférence islamique la communauté internationale à dialoguer avec les talibans pour éviter une crise humanitaire.
19.12.2021, 18:39
ATS
S'exprimant à l'ouverture d'une réunion extraordinaire de l'Organisation de la coopération islamique (OCI) à Islamabad, le ministre pakistanais des Affaires étrangères Shah Mahmood Qureshi a estimé que l'aggravation de la crise risquait d'entraîner une dure famine, de nouveaux flots de réfugiés et une montée de l'extrémisme.
«Nous ne pouvons ignorer le danger d'un effondrement économique complet», a-t-il prévenu devant les représentants des 57 pays de l'OCI, dont son homologue taliban Amir Khan Muttaqi, ainsi que des délégués des États-Unis, de la Chine, de la Russie, de l'Union européenne et des Nations unies assistant à la réunion comme observateurs.
Cette réunion est la première grande conférence sur l'Afghanistan depuis la chute en août de l'ancien gouvernement soutenu par les États-Unis et l'arrivée au pouvoir des talibans.
Depuis, plusieurs milliards de dollars d'aides ont été bloqués par les pays occidentaux et les Etats-Unis ont gelé 9,5 milliards de dollars d'avoirs de la Banque centrale afghane alors que le pays se prépare à affronter un hiver très rude.
Les Nations unies ont prévenu à plusieurs reprises que l'Afghanistan était au bord d'une des pires catastrophes humanitaires au monde et le Programme alimentaire mondial (PAM) de l'ONU a mis en garde cette semaine contre une «avalanche de famine» à venir.
«Dissocier les talibans des Afghans»
Le Premier ministre pakistanais, Imran Khan, a de son côté affirmé qu'il fallait faire la distinction entre les talibans et les Afghans ordinaires.
«Je m'adresse spécifiquement aux États-Unis pour leur dire qu'ils doivent dissocier le gouvernement de l'Afghanistan des 40 millions de citoyens afghans», a-t-il déclaré. Et ceci «même s'ils sont en conflit avec les talibans depuis 20 ans».
Il a également appelé à ne pas nécessairement lier la reconnaissance des autorités talibanes aux idéaux occidentaux en matière de droits de l'homme. «Chaque pays est différent (...) L'idée que se fait chaque société des droits de l'homme est différente», a-t-il déclaré.
Aucun pays n'a encore formellement reconnu le gouvernement taliban et les diplomates auront la tâche délicate de venir en aide à l'économie afghane sans pour autant soutenir le régime islamiste.
Dimanche, quasiment tous les délégués s'exprimant à l'ouverture de la réunion ont insisté sur le besoin de protéger les droits des minorités et d'autoriser les femmes et les filles à travailler et étudier.
Si les talibans ont promis de suivre une ligne moins dure que celle ayant caractérisé leur premier passage au pouvoir, de 1996 à 2001, les femmes restent largement exclues des emplois publics et les écoles secondaires pour filles restent pour la plupart fermées.
Alors que le Pakistan, l'Arabie saoudite et les Emirats arabes unis étaient les trois seuls pays à avoir reconnu le précédent régime taliban, la réunion de l'OCI ne devrait pas donner au nouveau gouvernement la reconnaissance internationale à laquelle il aspire.
Le gouvernement taliban «a le droit d'être reconnu officiellement», a insisté devant la presse son ministre des Affaires étrangères. «Le gouvernement afghan actuel coopère avec toutes les organisations étrangères» et «les sanctions doivent être retirées», a avancé M. Muttaqi.
Dans son discours devant les délégués, il a qualifié le gel des avoirs par les Etats-Unis de «violation des droits de l'Homme des Afghans, qui peut être interprétée comme une hostilité envers toute la nation.»
Plan d'aide en préparation
Son homologue pakistanais, M. Qureshi, a affirmé que l'OCI examinerait un plan d'aide à l'Afghanistan en six points qui impliquerait les autorités talibanes pour réduire la pression sur le pays.
Ce plan comprendrait la coordination de l'aide, la hausse des investissements, l'aide à la reconstruction des institutions afghanes et la mise à disposition d'experts pour gérer l'économie.
Toute promesse d'aide devrait être annoncée dimanche soir.
La réunion se déroule sous haute sécurité, Islamabad étant bouclé et le lieu de la rencontre entouré de barrières de barbelés ainsi que de barrages sous bonne garde de soldats et de policiers.