Jérusalem-Est Un ministre israélien prie sur l'esplanade des Mosquées: tollé international

ATS

13.8.2024 - 22:08

Le ministre israélien Itamar Ben Gvir, colon d'extrême droite habitué des provocations, a prié mardi comme quelque 3000 fidèles juifs sur l'esplanade des Mosquées à Jérusalem-Est, déclenchant aussitôt l'ire de la communauté internationale.

Itamar Ben-Gvir (au centre) accompagné de ses gardes du corps, s'approchant de l'entrée du site sacré le plus sensible de Jérusalem.
Itamar Ben-Gvir (au centre) accompagné de ses gardes du corps, s'approchant de l'entrée du site sacré le plus sensible de Jérusalem.
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Keystone-SDA

«Provocation inutile» ou «inacceptable», l'ONU, l'Union européenne, les Etats-Unis et plusieurs pays musulmans ont dénoncé l'attitude du chef du parti d'extrême droite Force juive.

Située dans le secteur de la Ville sainte occupé et annexé par Israël, l'esplanade des Mosquées, troisième lieu saint de l'islam, est bâtie sur les ruines du second temple juif, détruit en l'an 70 par les romains. Pour les juifs, c'est le mont du Temple, lieu le plus sacré du judaïsme.

Ministre israélien de la Sécurité nationale, M. Ben Gvir s'y est filmé mardi à l'occasion de Ticha Beav, commémoration juive de la destruction des deux Temples, appelant notamment à «battre» le Hamas plutôt qu'à négocier avec le mouvement islamiste palestinien, sur fond de guerre dans la bande de Gaza.

Mardi matin, durant les quelques heures d'ouverture de l'esplanade aux non-musulmans, «environ 2250 juifs ont prié, dansé et hissé le drapeau israélien» sur le site, a rapporté à l'AFP un responsable du Waqf, l'administration jordanienne des Biens religieux musulmans à Jérusalem.

Lors du second créneau alloué aux non-musulmans dans l'après-midi, «plus de 700 juifs y ont prié», selon cette même source sous couvert d'anonymat.

«Comportement qui n'aide pas»

En vertu d'un statu quo décrété après la conquête de Jérusalem-Est par Israël en 1967, les non-musulmans peuvent se rendre sur l'esplanade des Mosquées, qui abrite le Dôme du Rocher et la mosquée al-Aqsa, à des heures précises, sans y prier, une règle de moins en moins suivie par certains juifs nationalistes.

Si le lieu est administré par la Jordanie, son accès est contrôlé par les forces de sécurité israéliennes.

Dans une vidéo qu'il a postée en ligne, M. Ben Gvir se félicite de «grands progrès sur la gouvernance, la souveraineté et le nombre de juifs qui prient», en allusion au nombre important de fidèles qui ont pu mener des rituels sur l'esplanade sans être inquiétés par les forces de sécurité israéliennes.

Le porte-parole du secrétaire général de l'ONU, Farhan Haq, s'est dit «contre toute tentative de changer le statu quo lié aux lieux saints».

«Ce type de comportement n'aide pas et c'est une provocation inutile», a-t-il ajouté.

Les Etats-Unis ont qualifié d'"inacceptable» le coup d'éclat du ministre israélien inculpé plus de 50 fois dans sa jeunesse pour incitation à la violence ou pour des discours de haine, et condamné en 2007 pour soutien à un groupe terroriste et incitation au racisme.

«Non seulement c'est inacceptable mais cela détourne aussi l'attention de ce qui nous semble être un moment vital, alors que nous travaillons à conclure un accord de cessez-le-feu» à Gaza, a déclaré à la presse un porte-parole du département d'Etat, Vedant Patel.

Le chef de la diplomatie de l'Union européenne a dénoncé des «provocations», tandis que la Jordanie a condamné «la prise d'assaut» de l'esplanade par le ministre d'extrême droite et des députés israéliens «sous la protection de la police d'occupation israélienne».

«Incursion» et «exception»

Amman y a vu «des mesures israéliennes unilatérales et les violations continues du statu quo historique et juridique à Jérusalem et ses lieux saints».

Le bureau du Premier ministre Benjamin Netanyahu a dénoncé un «évènement» qui constitue «une exception au statu quo».

«La politique d'Israël sur le Mont du Temple n'a pas changé», a-t-il assuré, estimant que «ni le ministre de la Sécurité nationale ni aucun autre ministre» ne pouvait la modifier seul.

Le responsable du Waqf a indiqué pour sa part à l'AFP que «la police israélienne n'avait laissé entrer que quelques fidèles musulmans, imposant des restrictions à l'entrée à al-Aqsa» mardi.

M. Ben Gvir «supervise la judaïsation» du lieu saint hautement sensible «et contribue à changer la situation à Al-Aqsa (...) au lieu de respecter les traités internationaux sur le statu quo avec la Jordanie», a-t-il accusé.

Le ministère palestinien des Affaires étrangères a dénoncé une «escalade» et des «provocations», évoquant des «incursions illégales (...) pour préparer l'imposition d'un contrôle israélien total et une judaïsation» des lieux «en violation du droit international».

Plusieurs capitales arabes, la Turquie et l'Organisation de la coopération islamique (OCI) ont également vivement condamné ces «incursions».

Sur l'esplanade, M. Ben Gvir a aussi évoqué la guerre à Gaza, affirmant qu'il fallait «gagner cette guerre, ne pas aller à des discussions à Doha ou au Caire», les négociateurs régionaux qui, avec les Etats-Unis, poussent pour une trêve.