Pérou Un mort lors d'affrontements à la veille du grand rassemblement

ATS

19.1.2023 - 05:15

Au moins une personne est décédée mercredi lors d'affrontements entre manifestants et policiers dans le sud du Pérou. La tension grimpe alors que des centaines de protestataires venus des Andes se sont donnés rendez-vous pour un grand rassemblement à Lima jeudi.

Le pays est à cran depuis plusieurs semaines
Le pays est à cran depuis plusieurs semaines
ATS

Ce décès porte à 43 le nombre de morts depuis le début de la crise le 7 décembre. «A 18h20 (00h20 en Suisse), une personne de sexe féminin de 35 ans environ, qui ne présentait pas de signes vitaux, est arrivée aux urgences», selon un communiqué de l'hôpital San Martin de Porres de Macusani, ville andine de la région de Puno, près de la frontière bolivienne.

Le communiqué parle aussi d'un «pronostic (vital) réservé» pour un homme «de 30 ans» blessé au «thorax». Selon les médias locaux qui ont diffusé des images, le commissariat de la ville a été brûlé lors de ces heurts. Les policiers du poste ont été secourus par hélicoptère, a rapporté la chaine de télévision Canal-N sans diffuser d'images.

«Prendre Lima»

Les groupes protestataires qui réclament le départ de la présidente Dina Boluarte et de nouvelles élections au Pérou ont appelé à une grève à travers le pays mais surtout à un grand rassemblement à Lima vers où ont convergé des milliers de paysans andins ces derniers jours. Ils espèrent «prendre Lima» et frapper les esprits.

«A Lima, la lutte aura plus de poids. Quand ils nous répriment dans nos régions, personne n'en parle», estime Abdon Félix Flores Huaman, 30 ans, paysan, qui se dit prêt «à donner sa vie». Il est parti dimanche d'Andahuaylas, épicentre des manifestations en décembre, pour arriver à Lima mardi. Il était pour le moment impossible, malgré les annonces des uns et autres, de connaître l'ampleur de cette mobilisation et de savoir combien de personnes sont arrivées à Lima.

Mercredi soir, avant l'annonce du décès à Macusani, le secrétaire général de la Confédération générale des travailleurs du Pérou (CGTP), auteur de l'appel à la grève, a souligné lors d'une conférence de presse: «La lutte du peuple péruvien ne se terminera pas demain, la lutte continuera si Dina Boluarte n'écoute pas le peuple et agit avec arrogance».

«C'est une grève civique populaire nationale avec des mobilisations pacifiques des organisations des différentes régions, en évitant tout acte de vandalisme», a assuré M. Lopez. «Il s'agit d'une mobilisation démocratique de citoyens venus de province mais aussi d'ici de Lima. Ils exigent la démission immédiate de Dina Boluarte, la convocation de nouvelles élections en 2023 et la dissolution du Congrès», a-t-il ajouté.

Fossé entre campagne et capitale

Alors que le gouvernement a décrété dimanche l'état d'urgence pour 30 jours à Lima, Cuzco, Callao et justement Puno (où se trouve Macusani), le leader syndical a précisé que les organisateurs n'avaient pas sollicité d'autorisation.

«Il n'y a pas d'autorisation de la police, on ne demande jamais d'autorisation pour une manifestation sociale, ce n'est pas une obligation qu'ils nous autorisent», a-t-il assuré alors que l'état d'urgence, qui permet à l'armée d'intervenir pour maintenir l'ordre, suspend aussi les libertés de réunion et de circulation.

Les troubles ont éclaté après la destitution et l'arrestation le 7 décembre du président de gauche Pedro Castillo, accusé d'avoir tenté de perpétrer un coup d'Etat en voulant dissoudre le Parlement qui s'apprêtait à le chasser du pouvoir. La crise est aussi le reflet de l'énorme fossé entre la capitale et les provinces pauvres qui soutenaient le président Castillo, d'origine amérindienne, et voyaient son élection comme une forme de revanche sur le mépris de Lima.

La présidente Boluarte a elle appelé au calme lundi: «Nous savons qu'ils veulent 'prendre' Lima au vu de tout ce qui sort sur les réseaux. Qu'ils prennent Lima, oui, mais dans la paix et le calme». Mme Boluarte, qui était la vice-présidente de M. Castillo, lui a succédé conformément à la Constitution. Elle est issue du même parti que lui mais les manifestants voient en elle une «traîtresse».

Les autorités ont en tout cas mobilisé un important dispositif policier. Mercredi soir, plusieurs petites manifestations à Lima ont été encadrés par des dizaines des membres de forces de l'ordre. Dans la soirée, plusieurs statues et monuments du centre de Lima étaient déjà enveloppées sous des bâches en plastique pour les protéger d'éventuelles dégradations.