électionsVenezuela: appel à l'armée à se ranger «du côté du peuple»
clsi
6.8.2024 - 00:52
L'opposition vénézuélienne, qui revendique la victoire à la présidentielle du 28 juillet, a appelé lundi l'armée à se ranger «du côté du peuple» dans la crise qui l'oppose à Nicolás Maduro, proclamé vainqueur. Des poursuites ont aussitôt été lancées à son encontre.
Keystone-SDA, clsi
06.08.2024, 00:52
06.08.2024, 06:50
ATS
«Nous lançons un appel à la conscience des militaires et policiers pour qu'ils se rangent du côté du peuple et de leurs propres familles», écrivent dans un communiqué commun la cheffe de l'opposition María Corina Machado et le candidat à la présidentielle Edmundo Gonzalez Urrutia.
«Le nouveau gouvernement de la République élu démocratiquement offre des garanties à ceux qui accompliront leur devoir constitutionnel», promettent les deux dirigeants, espérant ainsi faire basculer l'armée de leur côté. Ils réitèrent avoir «les preuves irréfutables» de la victoire de M. Gonzalez Urrutia, qui avait remplacé comme candidat au pied levé Mme Machado, déclarée inéligible.
«Diffusion de fausses informations»
Le parquet vénézuélien a réagi au communiqué en ouvrant une enquête criminelle dans l'après-midi contre M. Gonzalez Urrutia et Mme Machado, notamment pour «usurpation de fonctions, diffusion de fausses informations, incitation à la désobéissance aux lois, incitation à l'insurrection, association de malfaiteurs».
M. Gonzalez et Mme Machado «annoncent un faux vainqueur de l'élection présidentielle [...] incitent ouvertement les fonctionnaires de police et les militaires à désobéir», selon un communiqué du parquet. Il a donc «décidé d'ouvrir une enquête pénale à l'encontre des deux».
Les troubles qui ont suivi la proclamation de la victoire du président sortant ont fait 11 morts parmi les civils, selon les organisations de défense des droits humains. M. Maduro a de son côté annoncé la mort de deux membres de la garde nationale et l'arrestation de plus de 2000 personnes, promettant de poursuivre la répression contre ce qu'il qualifie de tentative de «coup d'Etat impérialiste». Il a assuré samedi que le déploiement policier et militaire se poursuivrait dans le pays pour «protéger le peuple».
L'armée «agira avec force»
Au surlendemain du scrutin, le ministre de la défense, le général Vladimir Padrino, avait réaffirmé au nom de l'armée «notre loyauté la plus absolue et notre soutien inconditionnel au citoyen Nicolás Maduro Moros, président constitutionnel [...] notre commandant en chef légitimement réélu par le pouvoir populaire», précisant que l'armée agira «avec force» pour «préserver l'ordre intérieur».
Le conseil national électoral (CNE) a «remis» lundi en début de soirée officiellement à la cour suprême (TSJ) les procès-verbaux de la réélection de M. Maduro, qui avait saisi la haute juridiction pour faire valider sa victoire. Ce sont justement ces fameux procès-verbaux – avec le décompte bureau par bureau – que réclament l'opposition et une partie de la communauté internationale.
On ne s'attend toutefois pas à des grandes annonces: le CNE comme la cour suprême (TSJ) sont considérés comme aux ordres du pouvoir par l'opposition, mais aussi par la plupart des observateurs.
Détail des votes pas donnés
Avec cette procédure, M. Maduro «admet implicitement que personne ne croit en la proclamation (du CNE), au point qu'il demande qu'un autre pouvoir intervienne, comme un greffe ou un notaire, pour certifier sa victoire», souligne Perkins Rocha, avocat de l'opposition. «M. Maduro sait qu'il peut compter sur un TSJ à genoux devant lui».
Le CNE a ratifié vendredi la victoire de M. Maduro avec 52% des voix, contre 43% à Edmundo Gonzalez Urrutia. Se disant victime d'un piratage informatique, l'autorité électorale n'a toujours pas donné le détail du vote bureau par bureau.
L'opposition estime qu'il s'agit d'une manoeuvre pour ne pas révéler les vrais résultats. Elle a publié sur un site Internet les procès-verbaux correspondant selon elle à chaque bureau. Selon ces documents, dont la validité est rejetée par M. Maduro, M. Gonzalez Urrutia a remporté le scrutin avec 67% des voix.
Dimanche, l'Union européenne a estimé qu'elle ne pouvait reconnaître les résultats officiels: «Bien qu'il s'y soit engagé, le CNE n'a toujours pas publié les procès-verbaux officiels des bureaux de vote. Faute de preuve pour les soutenir, les résultats publiés le 2 août par le conseil national électoral ne peuvent être reconnus».
Contrairement aux Etats-Unis et à plusieurs autres pays, l'UE s'est toutefois gardée de reconnaître formellement la victoire de M. Gonzalez Urrutia.