Boutcha Zelensky devant l'ONU après l'onde de choc 

ATS

5.4.2022 - 12:17

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky s'exprime mardi devant le Conseil de sécurité de l'ONU, après l'onde de choc provoquée dans le monde par la découverte de nombreux cadavres dans la ville ukrainienne libérée de Boutcha, où Kiev accuse les Russes de massacre.

Des images satellite de la ville de Boutcha publiées lundi par la société américaine Maxar Technologies semblent réfuter les affirmations russes selon lesquelles les cadavres de personnes ont été placés après que les troupes russes avaient évacué les lieux.
Des images satellite de la ville de Boutcha publiées lundi par la société américaine Maxar Technologies semblent réfuter les affirmations russes selon lesquelles les cadavres de personnes ont été placés après que les troupes russes avaient évacué les lieux.
ATS

Keystone-SDA

Démentant toute responsabilité, Moscou a accusé pour sa part les autorités ukrainiennes de préparer des «mises en scène» de civils tués dans plusieurs villes pour faire condamner la Russie.

M. Zelensky, qui a dénoncé des «crimes de guerre» et un «génocide» après la mise au jour de dizaines de cadavres portant des vêtements civils à Boutcha et dans d'autres localités près de la capitale ukrainienne, interviendra devant le Conseil de sécurité pour la première fois depuis l'invasion de son pays, a indiqué le Royaume-Uni, qui préside actuellement cette instance des Nations unies.

La Russie a protesté de son côté contre ce qu'elle a présenté comme un refus de Londres de réunir à sa demande le Conseil de sécurité, pour une réunion sur la situation à Boutcha, selon l'agence Tass.

Dans une vidéo diffusée dans la nuit de lundi à mardi, M. Zelensky a confirmé qu'il interviendrait par vidéo devant le Conseil, sans que l'on sache si son allocution sera en direct ou en différé.

Un jour, «chaque Russe apprendra toute la vérité sur [ceux de ses] compatriotes [qui ont] tué [ou ont] donné les ordres», a-t-il déclaré dans cette vidéo, appelant à renforcer les sanctions contre Moscou et à livrer davantage d'armements à son pays.

«Femmes violées, enfants tués»

Sur le théâtre des opérations militaires, plusieurs bombardements ont touché dans la nuit de lundi à mardi Kramatorsk, grande ville contrôlée par Kiev dans l'Est de l'Ukraine sous la menace d'une offensive des troupes russes.

Selon un journaliste de l'AFP, ces tirs, probablement de missiles ou de roquettes longue portée, ont notamment détruit une école du centre-ville, voisine d'un bâtiment de la police. Aucun bilan officiel n'a été communiqué à la suite de ces frappes.

A Genève, le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a annoncé la libération, dans la nuit, d'une de ses équipes détenue depuis lundi par la police dans une zone contrôlée par les troupes russes près de Marioupol, ville assiégée depuis plusieurs semaines.

L'équipe «se concentre désormais sur la poursuite des opérations d'évacuation humanitaire», a précisé le CICR, pour qui cet incident «montre la volatilité et la complexité» de cette opération.

Lundi, portant un gilet pare-balles, M. Zelensky s'était rendu à Boutcha où des dizaines de cadavres ont été retrouvés dans cette petite localité située à une trentaine de kilomètres au nord-ouest de Kiev, après le retrait des forces russes.

«Vous êtes ici et vous pouvez voir ce qui s'est passé. Nous savons que des milliers de personnes ont été tuées et torturées, ont eu des membres déchirés, des femmes ont été violées et des enfants tués», a-t-il déclaré lors d'un point de presse improvisé.

«Guerre de l'information»

La Russie a nié toute responsabilité, assurant lundi qu'elle allait présenter des «documents» montrant, selon elle, la «vraie nature» des événements intervenus à Boutcha.

«Tout à coup (ces corps) apparaissent dans les rues, étendus au sol, un par un, qui à droite, qui à gauche, certains bougeant, d'autres montrant des signes de vie», a affirmé l'ambassadeur russe aux Nations unies, Vassily Nebenzia, dénonçant une mise en scène «arrangée par la machine de guerre de l'information ukrainienne».

Dans un communiqué publié mardi, le ministère de la Défense russe a accusé les «services spéciaux» ukrainiens d'avoir «tourné, le soir du 4 avril, une nouvelle mise en scène filmée de civils prétendument tués par des actions violentes de l'armée russe dans le village de Mochtchoun, à 23 km au nord-ouest de Kiev».

«Des événements similaires sont en train d'être organisés par [ces services] à Soumy (nord-est), Konotop (nord-est) et dans d'autres villes», a-t-il ajouté.

Des images satellite de la ville publiées lundi par la société américaine Maxar Technologies semblent néanmoins réfuter les affirmations russes selon lesquelles les cadavres de personnes en vêtements civils trouvés à Boutcha y ont été placés après que les troupes russes avaient évacué les lieux.

Ces «images haute résolution (...) corroborent de récentes vidéos et photos sur les réseaux sociaux révélant la présence de corps étendus dans les rues (de Boutcha) et abandonnés depuis plusieurs semaines», a indiqué Maxar Technologies dans un communiqué.

Samedi, l'AFP a vu à Boutcha les cadavres d'au moins 22 personnes portant des vêtements civils dans des rues de la ville. L'une d'elles était couchée près d'un vélo et une autre avait des sacs à provisions à côté d'elle. Un cadavre avait les mains liées dans le dos.

«Fosses communes»

Dans la ville libérée, un habitante a raconté à l'AFP avoir vu «devant [ses] yeux» des membres des forces russes tirer «sur un homme qui allait chercher de la nourriture au supermarché».

Selon le maire de Boutcha, Anatoly Fedorouk, 280 personnes ont dû être enterrées par les Ukrainiens ces derniers jours dans des «fosses communes» à Boutcha, le nombre de cadavres s'accumulant.

Ces découvertes macabres ont provoqué l'indignation des alliés occidentaux de l'Ukraine qui ont promis de nouvelles sanctions «cette semaine» contre la Russie.

Selon un responsable européen, les 27 pays de l'UE discutent de sanctions sur les importations de charbon et pétrole russes.

«Il faut qu'il rende des comptes», a affirmé lundi le président américain Joe Biden, à propos de son homologue russe Vladimir Poutine, en répétant qu'il le considérait comme un «criminel de guerre».

Pékin, qui a refusé à plusieurs reprises de condamner Moscou pour l'invasion de l'Ukraine, a réitéré mardi son appel à des pourparlers de paix pour résoudre le conflit.

L'UE a annoncé que la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen et le chef de la diplomatie de l'UE Josep Borrell se rendraient «cette semaine» à Kiev pour y rencontrer M. Zelensky.

Lundi, Mme von der Leyen avait annoncé la mise en place par l'UE d'une équipe «conjointe avec l'Ukraine pour (...) enquêter sur les crimes de guerre et les crimes contre l'humanité».

Les Etats-Unis, veulent eux s'efforcer d'obtenir cette semaine la suspension de la Russie du Conseil des droits de l'Homme de l'ONU. La Russie a réagi en qualifiant cette démarche d'"incroyable» et en jugeant qu'elle ne faciliterait pas les «pourparlers de paix» entre Russes et Ukrainiens.

Après le retrait russe autour de Kiev, l'Ukraine se prépare désormais à une «attaque massive» dans la région de Lougansk, dans l'est de l'Ukraine, a annoncé lundi son gouverneur, Serguiï Gaïdaï.

Environ 30’000 personnes supplémentaires en 24 heures ont fui l’Ukraine, selon les données mardi du Haut-Commissariat pour les réfugiés (HCR) à Genève. Elles sont plus de 4,2 millions depuis le début de la guerre.