Lausanne Le MCBA se pare des couleurs vives et engagées de Lubaina Himid

sj, ats

3.11.2022 - 16:31

La nouvelle grande exposition du Musée cantonal des Beaux-Arts (MCBA) est consacrée à l'artiste contemporaine britannique Lubaina Himid, figure centrale du mouvement British Black Arts. Plus de 70 oeuvres aussi engagées que colorées revisitent 40 ans de création.

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Cette rétrospective est la plus grande exposition personnelle de l'artiste, née en 1954 à Zanzibar, et une première en Suisse. Les peintures, objets du quotidien, textes poétiques, installations monumentales ou environnements sonores de «Lubaina Himid. So Many Dreams» sont à découvrir jusqu'au 5 février prochain sur deux étages du MCBA.

L'exposition est organisée en collaboration avec la Tate Modern à Londres, où elle a été créée, et grâce à des prêts importants d'Europe et des Etats-Unis. Elle a été entièrement retravaillée avec l'artiste lauréate du prestigieux Turner Prize en 2017, qui vit et travaille à Preston en Grande-Bretagne, pour habiter au mieux les espaces intérieurs du musée vaudois, a expliqué jeudi devant la presse son directeur Juri Steiner.

La rétrospective offre un panorama coloré, lumineux et festif d'une oeuvre puissante et très engagée, notamment au sein du courant britannique, dans les années 1980, du mouvement culturel afro-américain Black Arts Movement des années 1960 et 1970.

Visuel, auditif et questionnant

S'inspirant de la passion de Lubaina Himid pour l'opéra et de sa formation de scénographie théâtrale, l'exposition est conçue comme une succession de scènes dont le public est partie prenante. Le visiteur est immédiatement immergé dans des couleurs vives, des tonalités marines, des échanges entre tableaux et personnages.

L'imaginaire poétique et onirique de l'artiste puise son inspiration dans l'histoire de la peinture occidentale, dans les motifs textiles d'Afrique et d'ailleurs, dans les rencontres humaines, dans les bleus ou les gris de la mer, du ciel et l'horizon. Dans le même temps, il ne cesse d'explorer et de revisiter les histoires coloniales et de leurs répercussions contemporaines.

«C'est autant un voyage visuel qu'une expérience auditive», explique la commissaire de l'exposition Nicole Schweizer. L'autre caractéristique de l'artiste est de faire rencontrer ses oeuvres et de les articuler autour de questions, ajoute-t-elle.

«Epoustouflante»

«Nous vivons à l'intérieur de vêtements et de bâtiments – sont-ils à notre taille», «Comment distinguer la sécurité du danger?», «A quoi servent les monuments?», «Quel son produit l'amour?»: autant d'interrogations invitant à réfléchir à comment l'environnement est bâti, aux lieux historiques et à leur mémoire, au colonialisme, aux responsabilités politiques et sociales, aux relations personnelles et aux conflits qui façonnent nos existences.

Des cycles de toiles, parmi lesquels «Revenge» (1991-1992), Plan B (1999) et Le Rodeur (2016-2018), sont réunis à Lausanne pour la première fois. Ils dialoguent avec des œuvres de toutes les périodes de création de Lubaina Himid, de la plus connue installation «A Fashionable Marriage» (1984) jusqu'aux installations sonores les plus récentes comme «Old Boat/New Money» (2019) et «Blue Grid Test» (2020).

Symboles, allégorie, satire, poésie, rêveries, lieux frontières, théâtralité, sonorité marine, musique et chanson: l'oeuvre expressive, éclectique et finalement d'une grande cohérence de l'artiste britannique contemporaine est effectivement «époustouflante», pour reprendre le mot de Juri Steiner.