Gabriel de Montmollin, le directeur du Musée International de la Réforme (MIR), à deux pas de la Cathédrale de Genève, a concocté une exposition sur les gravures de Rembrandt.
Une croix huguenote géante, revisitée par un joaillier genevois, trône dans la cour intérieure de la maison Mallet où se trouve le Musée International de la Réforme (MIR).
Les gravures «divines» de Rembrandt à (re)découvrir à Genève - Gallery
Gabriel de Montmollin, le directeur du Musée International de la Réforme (MIR), à deux pas de la Cathédrale de Genève, a concocté une exposition sur les gravures de Rembrandt.
Une croix huguenote géante, revisitée par un joaillier genevois, trône dans la cour intérieure de la maison Mallet où se trouve le Musée International de la Réforme (MIR).
Dans un Musée International de la Réforme (MIR) de Genève récemment rénové, on peut découvrir jusqu'en mars une exposition consacrée aux gravures bibliques de Rembrandt (1607-1669), un des seuls grands peintres protestants avec Van Gogh et Mondrian.
L'un des enjeux de la multiplication des expositions temporaires et des conférences – le MIR a notamment accueilli Enki Bilal, le dessinateur de bandes dessinées lors d'un précédent événement – est de faire revenir des visiteurs au MIR, fermé pendant deux ans pour travaux. «Deux d'entre eux sont venus spécialement de Bruxelles pour visiter cette exposition, consacrée à Rembrandt», a dit à Keystone-ATS le directeur du musée Gabriel de Montmollin.
Parmi les 70 gravures proposées au public jusqu'au 17 mars, le dernier portrait que Rembrandt a gravé de lui-même. «Il se représente tel qu'il est et pas de la manière qu'il aimerait se voir. On voit aussi souvent le peintre hollandais figurant dans ses propres gravures», explique le directeur.
Au XVIIe siècle – après la Renaissance (XIVe-XVIIe siècles) -, la peinture ou gravure religieuse n'est plus l'activité principale des artistes. Chez Rembrandt, parmi ses 314 gravures qu'il a faites, 89 sont religieuses et la majorité d'inspiration biblique.
Plusieurs gravures d'un même tableau
«Il ne les faisait ni pour lui ni pour l'Eglise, mais pour gagner sa vie». Très coté comme peintre de son vivant, il peut avec des gravures réaliser plusieurs ventes d'un même tableau.
Grand collectionneur de gravures – il en possède près de 4000 -, mais aussi d'objets qui débarquent des comptoirs hollandais dans les colonies, il a de grands besoins financiers.
«C'est un personnage très incarné, qui a une vie sentimentale assez active. Il a par exemple vécu en concubinage avec sa bonne après le décès de sa femme, ce qui lui a valu quelques démêlés avec l'église réformée de son époque.»
Et cette proximité de la vie telle qu'elle est se voit dans ses oeuvres. «Si on prend par exemple la gravure d'Adam et Eve, ce ne sont pas des jeunes gens idéalisés, mais des personnages vieillissants: il donne aux spectateurs de son époque la capacité de se projeter», poursuit le Neuchâtelois.
Une clientèle variée
Le calvinisme, religion officielle des Provinces-Unies au temps de Rembrandt, est hostile à la représentation visuelle de la Bible. Mais si cette interdiction est strictement appliquée dans les églises, les collections d'art religieux ne sont pas bannies, lit-on dans le catalogue de l'exposition.
«Il y a donc une privatisation de l'utilisation de motifs bibliques, ce qui laisse un champ de l'inspiration beaucoup plus large, contrairement à l'époque catholique, où la représentation biblique était très codifiée», rappelle le directeur du MIR.
Rembrandt a une clientèle variée, formée de réformés, mais aussi de juifs ou de catholiques, les réformés ne représentant que 20% de la population néerlandaise à cette époque. Il propose ainsi des nativités, des Vierges à l'enfant pour un public catholique. Mais il les humanise, les désacralise de telle sorte à combler aussi les acheteurs protestants.
Une Nativité avec deux boeufs
Rembrandt a également représenté des scènes bibliques qui n'avaient encore jamais été imagées auparavant dans l'histoire de l'art. Il a par exemple réalisé une Nativité avec deux boeufs (et non un âne et un boeuf comme on le fait généralement) parce que l'âne n'a jamais été mentionné dans la Bible, à l'exception de certains textes apocryphes.
Rembrandt s'est appuyé sur trois bibles pour réaliser ses gravures: la «Vulgate» en latin, la première bible traduite en néerlandais – à partir de la bible d'Olivétan, c'est-à-dire à partir de la première bible traduite en français à Neuchâtel en 1535 – et la bible des Etats.
Le MIR présente chacune de ses éditions, comme toutes les premières éditions des bibles en français, allemand, anglais, italien et hollandais, dans son exposition permanente sur une histoire de la Réforme.
Même si la Réforme rejette l'image – «Ce que contestent les protestants, c'est la superstition liée aux images»-, celle-ci garde une portée pédagogique importante. A peine un siècle après la Réforme, seul 10% de la population sait lire. Et parmi elle, de nombreuses femmes, que Rembrandt représente un livre à la main.