Sciences & Technique Brexit: l'industrie spatiale britannique mise sur un décollage en douceur

AFP

7.3.2018 - 15:12

Vêtue d'une combinaison de protection blanche, l'astronaute britannique Tim Peake écoute religieusement les détails techniques d'un nouveau satellite, fruit d'un partenariat européen, y voyant peut-être un modèle pour l'industrie spatiale de son pays après le Brexit.

La présentation se passe à Portsmouth (sud de l'Angleterre), sur un site de la division espace et défense de l'avionneur Airbus, et illustre selon l'astronaute toute la pertinence des collaborations multilatérales dans le domaine de l'espace.

Car ce satellite de communication, Eutelsat Quantum, a tout d'un projet européen: conçu avec l'Agence spatiale européenne (ASE), il est construit au Royaume-Uni avec des pièces venant d'Espagne, et sera testé en France, avant son lancement l'année prochaine.

"Pour réussir dans le domaine spatial, il est crucial de s'inscrire dans des partenariats internationaux", dit Tim Peake à l'AFP.

Bien que l'ASE soit une agence intergouvernementale regroupant 22 Etats, elle travaille étroitement avec l'UE, et le Brexit a jeté le trouble sur le rôle que pourront à l'avenir jouer les Britanniques dans cette organisation.

A l'Agence spatiale britannique, l'optimisme est de mise, même si son directeur, Graham Turnock, reconnait qu'il faudra du temps pour trouver un nouveau mode de fonctionnement.

"Cela dépendra beaucoup de ce qui se passera au cours des prochains mois dans les négociations (avec Bruxelles sur le Brexit), mais nous avons fait savoir que nous voulions continuer à coopérer dans les domaines de la science, de la recherche technologiques, y compris l'espace", souligne-t-il.

Du côté de l'exécutif britannique, la Première ministre Theresa May a promis de contribuer au budget actuel de l'UE, qui court jusqu'en 2020, dans le cadre d'une période de transition qui débuterait après le Brexit, prévu le 29 mars 2019.

- 'Avenir prometteur' -

"Nous continuerons à participer à des programmes financés par ce (budget de l'UE), y compris dans le domaine spatial, mais nous discuterons également avec l'UE de la manière dont nous pourrons aller de l'avant sur la base de notre coopération" passée dans ce domaine, a-t-elle déclaré devant le Parlement britannique fin février.

En attendant, le Brexit a d'ores et déjà des conséquences. Preuve en est, la Commission européenne a décidé de faire déménager en Espagne un mini-site du programme de navigation européen autonome Galileo.

"La Commission prend les mesures opérationnelles nécessaires pour assurer la continuité des opérations et préserver la sécurité du système Galileo", a justifié la commissaire européenne à l'Industrie, Elzbieta Bienkowska.

En outre, le rôle des Britanniques dans un deuxième projet de l'UE, Copernicus, un réseau de satellites d'observation et de surveillance de la Terre, en cours de déploiement, est incertain.

Le Royaume-Uni est "fortement impliqué dans ces deux projets", note Tim Peake, en "espérant" que les négociations avec Bruxelles ne changeront pas la donne.

Bien que distincte de l'UE, l'ASE est chargée de mettre en oeuvre ces deux programmes, entre autres, et les fonds européens représentent environ 20% de son budget de 5,6 milliards d'euros, ce qui pourrait constituer un autre problème pour les Britanniques.

Il est en effet "obligatoire que les entreprises qui participent obtiennent des fonds et sont candidates à des contrats (entre l'ASE et l'UE) fassent partie d'un pays membre de l'UE", a souligné en novembre, Simon Henley, président de la Royal Aeronautical Society, une association promouvant l'aventure spatiale, devant une commission parlementaire.

"Nous voyons déjà des contrats refusés à l'industrie britannique en raison de l'incertitude" inhérente à la sortie de l'UE, a-t-il ajouté.

"Nous avons tous des doutes et nous voulons tous savoir ce qui va se passer", renchérit Colin Paynter, directeur général de la division espace et défense chez Airbus au Royaume-Uni, à l'AFP.

Néanmoins, étant donné les investissements britanniques dans le secteur -le budget de l'agence spatiale britannique est de 434 millions d'euros cette année-, "je crois que le Royaume-Uni a devant lui un avenir plutôt prometteur".

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