Du haut de ses trois mètres, le singe gigantopithèque a longtemps prospéré dans les forêts d'Asie avant d'être rayé de la surface de la Terre il y a plus de 200'000 ans. Ce géant de 3 mètres pesant entre 200 et 300 kg n'a pas su s'adapter au changement de son environnement, selon une étude parue mercredi.
George York, à droite, concepteur de la réplique du Gigantopithecus, attache un bras à sa création après l'avoir installée au Musée de l'Homme à Balboa Park.
La trop grande taille du gigantopithèque a fini par causer sa perte.
«Gigantopithecus blacki» n'a laissé derrière lui que quelques mâchoires et des dents, retrouvées par centaines dans des grottes de la province de Guangxi, dans le sud de la Chine.
Cette photo non datée montre une dent fossilisée du singe géant Gigantopithecus blacki, découverte par des scientifiques dans la région autonome du Guangxi Zhuang, dans le sud de la Chine. Subissant un «stress chronique sur le long terme», qui se lit dans la dentition, la population s'est peu à peu réduite et l'espèce a fini par s'éteindre.
La grotte chinoise où les fossiles du plus grand primate de tous les temps ont été retrouvés.
George York, à droite, concepteur de la réplique du Gigantopithecus, attache un bras à sa création après l'avoir installée au Musée de l'Homme à Balboa Park.
La trop grande taille du gigantopithèque a fini par causer sa perte.
«Gigantopithecus blacki» n'a laissé derrière lui que quelques mâchoires et des dents, retrouvées par centaines dans des grottes de la province de Guangxi, dans le sud de la Chine.
Cette photo non datée montre une dent fossilisée du singe géant Gigantopithecus blacki, découverte par des scientifiques dans la région autonome du Guangxi Zhuang, dans le sud de la Chine. Subissant un «stress chronique sur le long terme», qui se lit dans la dentition, la population s'est peu à peu réduite et l'espèce a fini par s'éteindre.
La grotte chinoise où les fossiles du plus grand primate de tous les temps ont été retrouvés.
L'extinction du plus grand primate de tous les temps était l'une des grandes énigmes de la paléontologie depuis la découverte des premières traces de la bête dans les années 1930. Un paléontologue allemand était alors tombé sur une «dent de dragon» chez un apothicaire à Hong Kong.
«Elle était trois à quatre fois plus grosse que celle de n'importe quel grand singe. Cela l'a intrigué et c'est là qu'ont démarré les recherches», a raconté à l'AFP Renaud Joannes-Boyau, professeur à l'université australienne Southern Cross, l'un des auteurs de l'étude publiée dans Nature.
Des mâchoires et des dents
«Gigantopithecus blacki» n'a laissé derrière lui que quelques mâchoires et des dents, retrouvées par centaines dans des grottes de la province de Guangxi, dans le sud de la Chine. Mais malgré dix ans de fouilles, les scientifiques n'arrivaient pas à déterminer quand et pourquoi l'espèce s'était éteinte, explique le professeur Yingqi Zhang de l'institut de paléontologie de l'académie chinoise des sciences, co-auteur de l'étude.
Plutôt que d'enquêter site par site, une équipe de scientifiques chinois, australiens et américains a travaillé sur un ensemble de 22 grottes en Chine, dont certaines n'avaient encore jamais été fouillées, contenant des dents fossilisées: des plus anciennes, vieilles de 2 millions d'années, aux plus récentes, il y a environ 250'000 ans.
Ils y ont combiné six différentes méthodes de datation, dont l'analyse des sédiments par luminescence, qui permet de savoir quand ces dépôts ont été exposés pour la dernière fois à la lumière du jour. Mais aussi la datation des pollens, précieux indices de l'évolution de la végétation, le tout afin «d'avoir une chronologie complète de l'environnement de chaque site, y compris ceux où Gigantopithecus blacki n'apparaissait plus», explique le Pr Joannes-Boyau, expert en géochimie.
«Enorme erreur»
Leurs résultats ont permis de déterminer une «fenêtre d'extinction» de l'espèce: entre 295'000 ans et 215'000 ans. Cela correspond à une vaste période de cycles glaciaires dite du pléistocène moyen, où la planète a connu un refroidissement global.
Conséquence: dans les forêts tropicales luxuriantes où prospérait le colosse, des saisons plus contrastées ont «transformé la végétation et entraîné des périodes de pénurie de fruits», décrypte la chercheuse Kira Westaway de l'université Macquarie en Australie, également coauteure.
Gigantopithecus blacki, qui évoluait au sol, a vu sa zone de recherche de nourriture se clairsemer et s'est rabattu sur des écorces et des brindilles. «Il a commis une énorme erreur en se spécialisant sur ces aliments de secours, très fibreux et moins nutritifs», détaille Yingqi Zhang.
Sa trop grande taille a freiné l'agilité nécessaire pour trouver des ressources plus variées. Ce handicap n'a fait qu'empirer, car «de façon surprenante, sa taille a augmenté» au fil du temps, remarque Kira Westaway.
Les orangs-outans survivent
Subissant un «stress chronique sur le long terme», qui se lit dans la dentition, la population s'est peu à peu réduite et l'espèce a fini par s'éteindre.
A l'inverse, ses contemporains orangs-outans de l'espèce Pongo weidenreichi, proches du Gigantopithecus, ont perduré. Plus petits, plus agiles, ils étaient capables de se mouvoir dans la canopée pour y cueillir des aliments diversifiés (feuilles, noix, insectes, petits mammifères). Cette polyvalence salvatrice s'est renforcée à mesure que leur taille, elle, décroissait dans le temps.
Le gigantopithèque ne fut pas le seul animal de la mégafaune du pléistocène à disparaître. Selon Kira Westaway, «explorer ces extinctions non résolues permet de comprendre les mécanismes de résilience chez les grands animaux, dans le passé comme dans le futur, alors que plane la menace d'une sixième extinction de masse» depuis l'apparition du vivant.