Santé Les cancers rares ne le sont pas tant que ça

Relax

3.2.2024 - 19:42

(AFP) – Sarcomes, certains lymphomes ou mélanomes, glioblastomes, mésothéliomes... les cancers «rares» constituent une famille nombreuse et diverse, confrontée à des défis de diagnostic et de traitement. Tour d'horizon avant la Journée mondiale contre le cancer, dimanche. 

Les cancers rares sont souvent diagnostiqués avec retard, parfois à un stade avancé, voire métastatique.
Les cancers rares sont souvent diagnostiqués avec retard, parfois à un stade avancé, voire métastatique.
Mark Kostich / Getty Images

Qu'est-ce qu'un cancer rare?

Les cancers sont considérés comme «rares» quand le nombre de nouveaux cas est inférieur à 6 sur 100.000 par an. Mais aussi lorsqu'ils se trouvent dans une région spécifique et peu commune de l'organisme (la cornée par exemple), lorsqu'ils apparaissent dans certaines conditions (comme lors d'une grossesse) ou lorsqu'ils sont très complexes.

Chaque cancer rare ne touche qu’une faible proportion de personnes, mais ils pèsent ensemble 25 à 30% des diagnostics de cancer et 25% des décès, selon le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC), agence de l'Organisation mondiale de la santé.

Chaque année en France, les cancers rares, dont tous ceux des enfants, représentent 70.000 nouveaux cas.

Cerveau, os, tissus mous, viscères ou encore ovaires, toutes les parties du corps peuvent en être le théâtre.

«Les cancers rares sont individuellement rares mais globalement fréquents, et de mauvais pronostic, avec un taux de survie à cinq ans moins important» que des plus courants, a souligné le Pr Alain Puisieux, directeur du centre de recherche de l'Institut Curie, lors d'une récente conférence de presse.

Quels défis de diagnostic?

Double peine pour les patients, les cancers rares sont souvent diagnostiqués avec retard, parfois à un stade avancé, voire métastatique.

Les médecins les connaissent moins, d'autant qu'il y a quantité de sous-catégories.

Ainsi, le mélanome uvéal, tumeur maligne de l'oeil plus létale que les mélanomes cutanés: «Mes amis oncologues médicaux en France en voient un ou deux dans leur carrière, moi c'est trois à quatre nouveaux patients par semaine. Là où ils avancent vers l'inconnu avec les patients, connaître davantage permet de savoir quand s'inquiéter ou rassurer», a illustré Manuel Rodrigues, oncologue et chercheur à Curie.

Détecter plus tôt ces cancers permet de mieux cibler les traitements et généralement d'améliorer le pronostic.

En France, c'est l'un des objectifs des réseaux nationaux de référence et des centres experts.

Pour un meilleur diagnostic, les technologies de pointe (biomoléculaire, génomique...) jouent aussi.

L'intelligence artificielle peut aider à analyser une masse de données, via des algorithmes «entraînés» à reconnaître des marqueurs de tumeurs.

Par exemple, pour les cancers d'origine inconnue – découverts par la présence de métastases sans que l'organe primitif soit identifié -, un outil d'IA, conçu par l'équipe de Sarah Watson à Curie, parvient à détecter l'origine de certains, à partir de séquences ARN de tumeurs.

Quels traitements?

Souvent, les cancers rares font partie des plus difficiles à traiter.

C'est notamment parce que «la recherche fondamentale, les essais cliniques et les nouveaux traitements pour ces maladies rares font défaut», résume le CIRC.

La stratégie thérapeutique mène parfois à proposer la participation à un essai clinique ou des traitements innovants.

Beaucoup de recherches explorent l'immunothérapie, qui consiste à renforcer les défenses du corps contre la maladie, couronnée en 2018 par le prix Nobel de médecine.

Les progrès constants dans la détection de mutations génétiques font espérer l'identification de nouvelles cibles thérapeutiques.

D'autres pistes de recherche visent non pas la tumeur elle-même mais des cellules de son environnement pouvant interagir avec elle.

Les découvertes pour des cancers rares peuvent parfois bénéficier ensuite au traitement de cancers communs.

Quel financement pour la recherche?

La recherche sur les cancers rares pâtit de financements insuffisants, regrettent les associations de patients et les spécialistes.

S'il y a des fonds publics ou caritatifs, l’industrie pharmaceutique privilégie souvent des domaines touchant davantage de malades, jugés plus rémunérateurs.

Face à ce besoin financier, des familles se mobilisent, comme les proches de Clémentine Vergnaud, morte à 31 ans d'un cancer rare et très agressif des voies biliaires, qui ont lancé fin décembre une collecte pour des recherches contre le cholangiocarcinome.

La journaliste de franceinfo, qui a raconté 18 mois de «vie face au cancer» dans un podcast, ne voulait pas de fleurs à son enterrement, mais des dons.