«Pas touche au fiston!» Les mères orques âgées protègent leurs fils

ATS

21.7.2023 - 11:12

Le meilleur ami de l'orque mâle? Sa mère, surtout une fois que celle-ci a atteint l'âge de la ménopause, selon une étude publiée dans la revue scientifique Current Biology.

Les mâles se reproduisent avec des femelles d'autres groupes, mais reviennent ensuite dans leur propre cellule familiale, restant ainsi proches de leur mère toute leur vie.
Les mâles se reproduisent avec des femelles d'autres groupes, mais reviennent ensuite dans leur propre cellule familiale, restant ainsi proches de leur mère toute leur vie.
IMAGO/Zoonar

Keystone-SDA

Chez les animaux, la ménopause est extrêmement rare, et c'est précisément ce qui a suscité l'intérêt de l'autrice principale de cette étude, Charli Grimes. «Comment et pourquoi la ménopause est-elle apparue est une grande question dans l'histoire de l'évolution», a-t-elle dit à l'AFP.

«Dans les sociétés humaines, les femmes âgées jouent souvent un rôle de médiatrices dans les conflits, et cette étude montre maintenant que cela pourrait aussi être le cas chez les orques», a souligné la chercheuse en éthologie à l'Université d'Exeter, en Angleterre.

Ces travaux se sont intéressés à une population d'orques vivant dans l'océan Pacifique, au large des côtes d'Amérique du Nord. Ces orques vivent dans des cellules familiales centrées autour de la femelle: généralement, une grand-mère avec ses enfants mâles et femelles, et les petits de ces dernières.

Les mâles se reproduisent avec des femelles d'autres groupes, mais reviennent ensuite dans leur propre cellule familiale, restant ainsi proches de leur mère toute leur vie. Les orques peuvent vivre jusqu'à 90 ans, dont plus de 20 après la ménopause.

Marques de dents

Charli Grimes et ses collègues ont examiné l'accumulation de marques de dents sur les animaux, des blessures laissées lorsqu'une orque en mord une autre, en jouant trop fort ou en se battant.

«Ces marques sont vraiment géniales pour quantifier les interactions sociales, qui sont autrement très difficiles à observer puisque la plupart de ces comportements se passent sous la surface» de l'eau, a expliqué la chercheuse.

Le Centre pour la recherche sur les baleines, dans l'Etat américain de Washington, a réalisé des recensements photographiques de ces orques depuis 1976, en identifiant les différents individus grâce à leurs ailerons et leurs tâches uniques.

Les orques, surnommées «baleines tueuses», n'ont pas de prédateur naturel, et cette population-là se nourrit uniquement de saumon, non de proies pouvant mordre. Les morsures ne peuvent donc qu'avoir été infligées par des congénères.

Moins de blessures

En analysant des milliers de photos à l'aide d'un programme informatique, les chercheurs ont observé que les mâles vivant avec une mère n'étant plus en capacité de se reproduire avaient 35% de marques de dents en moins que ceux vivant avec une mère n'ayant pas encore atteint la ménopause, et 45% de moins que ceux vivant sans leur mère.

Les chercheurs pensent que ne plus se reproduire permet aux mères d'avoir davantage de temps et d'énergie pour protéger leurs fils. Peut-être utilisent-elles leurs connaissances sur les autres groupes d'orques pour éloigner leurs fils des fauteurs de troubles. Ou peut-être interviennent-elles plus directement, en utilisant leurs vocalises pour retenir leur progéniture.

Mais elles ne s'impliquent a priori pas physiquement, puisqu'elles ne présentent que peu de blessures elles-mêmes. Les filles, elles, n'avaient apparemment pas moins de marques de morsures, que leur mère soit présente ou non.

De précédentes études ont montré que les orques âgées partagent leur poisson, transmettent leurs connaissances concernant les lieux et moments où trouver de la nourriture, et augmentent ainsi le taux de survie de leurs petits-enfants.