OGM Règles assouplies de nouvelles biotechnologies

ATS

29.4.2021 - 18:22

L'UE a ouvert jeudi la voie à ce que certains produits agricoles au génome modifié échappent aux règles drastiques encadrant les OGM. Il s'agit d'encourager l'essor de biotechnologies dans l'agro-alimentaire, au grand dam des ONG environnementales.

Des manifestants lors d'une marche pour contester des OGMs. (image d'illustration)
Des manifestants lors d'une marche pour contester des OGMs. (image d'illustration)
KEYSTONE

Plus rapides et plus précises, de nouvelles techniques «génomiques» ont permis de développer des variétés de semences résistantes à certains herbicides ou adaptées à la sécheresse – cultivées à titre expérimental dans l'UE (en Belgique, Suède, Espagne...) mais pas encore commercialisées.

En 2018, la Cour de justice de l'UE avait jugé que ces produits issus de «mutagenèse» étaient bien des organismes génétiquement modifiés (OGM) et devaient être soumis aux mêmes règles strictes (autorisation, traçabilité, étiquetage et surveillance).

Alors que les OGM classiques sont issus de l'introduction d'un gène extérieur dans une semence, la mutagenèse modifie le génome d'une espèce vivante avec des «ciseaux» moléculaires mais sans y insérer d'ADN étranger.

A la suite de l'arrêt de la Cour, la Commission européenne avait commandé une étude à ses services pour déterminer si ces biotechnologies pouvaient être exemptées des obligations de sa directive OGM (datant de 2001) ou si cette dernière devrait être modifiée.

Nouvelle législation préconisée

Le rapport, publié jeudi, se prononce en faveur d'une nouvelle législation: selon ses auteurs, la directive OGM «n'est pas adaptée» aux «progrès scientifiques et technologiques».

Principal argument: faute de présence d'ADN étranger, il est impossible de déterminer à quoi sont dues les modifications du génome: mutagenèse, mécanisme naturel (sélection, croisement...) ou autres techniques (chimiques, radiations...). Ce qui rend impossible tout moyen de détection «fiable».

La Commission a promis jeudi «une vaste consultation pour discuter de l'élaboration d'un nouveau cadre juridique pour ces biotechnologies», de concert avec les Etats et les eurodéputés. Tout en «gardant la sécurité des consommateurs et de l'environnement comme principe directeur», selon la commissaire Stella Kyriakides.

Selon l'étude, ces biotechnologies «peuvent contribuer à rendre les systèmes alimentaires plus durables, en rendant les plantes plus résistantes aux maladies, aux conditions environnementales et au changement climatique», ou en créant «des produits aux qualités nutritionnelles supérieures».

Exigence d'organisations agricoles

De grandes organisations agricoles réclamaient de longue date l'exclusion de ces nouvelles techniques du champ de la directive OGM, y voyant une nécessité pour «rester compétitif» et se réclamant du soutien d'au moins une douzaine d'Etats membres.

Pour Rachel Blumel, directrice générale de l'Union française des semenciers, «la règlementation actuelle soulève des problèmes d'interprétation qui ne créent pas un climat de confiance», alors que les techniques génomiques permettraient de s'adapter au changement climatique et d'utiliser moins d'engrais et de pesticides.

Son organisation dénonce en outre les «longues et coûteuses démarches d'homologation» imposées pour les OGM.

Les ONG inquiètes

Mais des ONG environnementales s'inquiètent d'un assouplissement des règles. «La Commission suggère de rompre avec des décennies régies par le principe de précaution, en autorisant ces 'nouveaux OGM' dans nos champs et nos assiettes», déplore Mute Schimpf, de Friends of the Earth.

«L'argument porté par les semenciers, c'est qu'on n'introduit pas de gène étranger et donc que le produit final comporterait beaucoup moins de risques», mais «le risque d'erreur génétique est présent de la même manière», assure à l'AFP Suzanne Dalle, chargée de campagne agriculture Greepeace France.

«Si les semenciers demandent à être exemptés de la règlementation OGM, c'est pour éviter l'obligation de traçabilité et d'étiquetage» car ils savent que «les consommateurs, en particulier en France, ne veulent pas d'OGM dans leur assiette», estime-t-elle.

ATS