Sciences & Technique Une "tiquothèque" pour connaître l'insecte suceur de sang

AFP

30.9.2018 - 18:09

L'Institut national de la recherche agronomique (Inra) à Champenoux (Meurthe-et-Moselle) a lancé auprès des particuliers une collecte de tiques pour créer une "tiquothèque" et mieux connaître l'acarien suceur de sang, potentiellement vecteur de pathologies, dont la maladie de Lyme.

Dans un bac, une pile d'enveloppes attend d'être ouverte : collées avec du ruban adhésif, un morceau d'essuie-tout ou du papier toilette, une ou plusieurs tiques de toutes tailles ont été dénichées en plein festin sur un humain ou un animal.

Et dans un tube, de gros spécimens gorgés de sang ont été prélevés sur les oreilles d'un renardeau.

Ce jour-là, les 35 enveloppes reçues proviennent de toute la France: Pyrénées-Atlantiques, Sarthe, Pas-de-Calais, Puy-de-Dôme, Meurthe-et-Moselle, et les départements savoyards.

Les bestioles sont placées dans un sac en plastique avec deux numéros permettant de remonter aux conditions de leurs prélèvements (animal ou humain piqué, sexe et âge de la personne, date, lieu).

L'ADN est ensuite extrait et étudié dans le laboratoire de Champenoux ou sur un site de l'Inra à Maisons-Alfort (Val-de-Marne) qui observe le parasite suceur de sang depuis les années 2000.

Avec cette collecte inédite, l'institut souhaite créer une "tiquothèque" pouvant servir aux chercheurs du monde entier.

"C'est très précieux ce qu'il y a là-dedans, beaucoup d'investissement des citoyens et une banque de données très riche", dit Mme Frey-Klett en refermant la porte du congélateur où tout est précieusement conservé.

L'Inra a lancé à l'été 2017, dans le cadre du projet Citique, une collecte auprès des particuliers pour dresser une cartographie des tiques piqueuses et déterminer les différents agents infectieux transmis par ce parasite.

"Le projet est né de la volonté d'avoir d'un côté la recherche, et de faire avancer nos connaissances en profitant de l'observation des citoyens de leur environnement", déclare Pascale Frey-Klett, directrice de recherches à l'Inra à Champenoux.

- Réservoir à micro-organismes -

Une application "Signalement tique" a été lancée, en partenariat avec le ministère de la Santé et l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation et du travail (Anses). Plus de 11.000 signalements ont déjà été recensés, dont 7.000 au premier semestre 2018.

Des kits de collecte contenant une pince à tique et un tube de stockage sont régulièrement distribués au public arpentant forêts et prairies: professionnels, scouts, promeneurs, sportifs.

Plus de 3.100 missives ont été reçues au centre de Champenoux. "Plus on aura d'échantillons, plus on aura d'informations sur la tique, son comportement, sa répartition géographique", dit la directrice de recherche.

"Pour avoir une prévention efficace, il faut connaître de manière précise l'écologie des tiques", souligne-t-elle.

Entre juillet 2017 et avril 2018, 4.198 piqûres sur des humains ont été signalées, principalement sur des adultes de 20 à 60 ans (56%), le plus souvent dans les massifs forestiers (53%), mais aussi dans les jardins privés (27%).

La tique se nourrit de sang depuis son stade larvaire jusqu'à sa vie d'adulte. Depuis le sol, elle grimpe sur un animal ou un humain, parcourt son corps en détectant avec ses papilles un vaisseau sanguin auquel s'accrocher, en privilégiant les endroits chauds.

L'acarien à huit pattes est un réservoir à micro-organismes. Bactéries, virus et autres parasites transitent par ses glandes salivaires à chaque "repas de sang".

Il existe près de 900 espèces de tiques dans le monde, mais quelques-unes seulement transmettent des maladies. La plus connue est la borreliose de Lyme, qui peut entraîner notamment fatigue, douleurs articulaires et problèmes cardiovasculaires ou neurologiques. En France, 25.000 nouveaux cas sont recensés chaque année.

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