Pandémie Comment l’armée est ressortie gagnante de la crise

De Julia Käser

22.11.2020

Bien que la confiance de la population envers l’armée n’ait pas augmenté, les Suisses en sont plus satisfaits qu’ils ne l’étaient avant la pandémie. 
Bien que la confiance de la population envers l’armée n’ait pas augmenté, les Suisses en sont plus satisfaits qu’ils ne l’étaient avant la pandémie. 
Keystone

Lors de la première vague de la pandémie, la confiance envers le Conseil fédéral s’est accrue. L’armée s’en sort également bien, comme le montre une nouvelle étude – un sociologue militaire attribue cela au service d’assistance assuré durant la crise.

La confiance de la population envers le Conseil fédéral a augmenté à la suite de la crise du coronavirus, comme le montre le nouveau baromètre des préoccupations du Crédit Suisse. Le Parlement et l’administration publique présentent également un bon bilan. Ce n’est toutefois pas le cas de l’armée: malgré la plus grande mobilisation depuis la Seconde Guerre mondiale, l’armée n’est pas parvenue à tirer son épingle du jeu durant la crise.

C’est ce que montre également une enquête de l’Académie militaire de l’Ecole polytechnique fédérale de Zurich (ETH Zürich), dont les résultats ont été publiés récemment. D’après l’enquête, le Conseil fédéral jouit aujourd’hui d’une confiance encore plus grande que les tribunaux et se trouve ainsi en deuxième position derrière la police. Si le Parlement et l’économie bénéficient également d’une plus grande confiance qu’en janvier, l’évaluation de l’armée est restée la même qu’avant la pandémie.

A propos de l’étude

L’Académie militaire de l’Ecole polytechnique fédérale de Zurich (ETH Zürich) réalise chaque année une étude sur la sécurité en collaboration avec le Center for Security Studies (CSS). En raison de la pandémie de coronavirus, l’Académie militaire a mené une enquête complémentaire auprès de 1016 électeurs suisses entre le 6 et le 25 juillet 2020.

Un changement significatif concerne toutefois la satisfaction à l’égard de l’armée. Celle-ci a augmenté suite à la crise – toutes catégories confondues, comme l’affirme à «blue News» Tibor Szvircsev Tresch, sociologue militaire et coauteur de l’étude. «La satisfaction à l’égard de l’armée a augmenté dans toutes les couches de la population et est plus élevée que jamais. Même les personnes de gauche sont plus satisfaites de l’armée que d’habitude.»

Un taux de satisfaction élevé suite à la mobilisation au printemps contre le coronavirus

Le soutien en faveur d’une armée «très bien formée» et «entièrement équipée» s’est également accru. Selon Tibor Szvircsev Tresch, tout cela est lié à la mission d’assistance assurée par l’armée lors de la première vague de la pandémie.

Lorsque les cantons ont appelé l’armée à l’aide, elle a répondu présente et s’est acquittée de diverses tâches pour contribuer à la lutte contre la pandémie. «Les gens l’ont vu et lui en sont reconnaissants», indique Tibor Szvircsev Tresch.

Comme le précise l’expert, il existe une différence importante entre confiance et satisfaction. «La confiance est toujours liée à une question de légitimité. Une personne favorable à l’abolition de l’armée fait automatiquement peu confiance à l’institution.»

Un désintérêt bienveillant

Par conséquent, il est fondamentalement plus difficile pour l’armée de gagner la confiance des gens que pour un gouvernement ou l’économie, indique le spécialiste. De plus, poursuit-il, les questions relatives à l’armée impliquent toujours un enjeu idéologique. «Beaucoup éprouvent un désintérêt bienveillant pour l’armée. Si elle fait bien son travail, les gens sont satisfaits. Mais cela n’augmente pas la confiance», explique Tibor Szvircsev Tresch.

Contrairement au gouvernement, l’armée est souvent jugée sur la base d’un rapport coût-avantages, comme l’a montré la campagne qui a précédé la votation sur les avions de combat, où l’aspect financier a été un thème récurrent, explique le spécialiste.



De plus, l’armée est un prestataire de services, ajoute-t-il. «La population paie sa contribution à l’armée, donc on attend d’elle qu’elle fournisse aussi un certain service», indique Tibor Szvircsev Tresch.

Le rôle de chef de file du gouvernement perçu positivement

Les choses sont différentes pour le gouvernement. Selon Tibor Szvircsev Tresch, il convient de noter que l’enquête complémentaire à l’étude de l’Ecole polytechnique fédérale de Zurich tout comme le baromètre des préoccupations ont été établis respectivement en juillet et en août.

«A cette époque, il n’y avait pratiquement plus de cas de coronavirus. On pensait que la pandémie avait pu être rapidement maîtrisée grâce aux mesures du Conseil fédéral.» D’après le sociologue militaire, le rôle de chef de file du gouvernement a été perçu positivement.

Selon lui, il est tout à fait possible que la confiance envers le Conseil fédéral soit retombée compte tenu de la deuxième vague et du nombre élevé de cas. «En janvier, la confiance envers le gouvernement devrait selon moi se situer au niveau observé avant la pandémie.»

Toutefois, selon Szvircsev Tresch, l’écart s’est probablement creusé. «Certains font désormais davantage confiance au Conseil fédéral en raison de la crise et des mesures prises. D’autres sont au contraire devenus plus sceptiques.»

La population se sent en sécurité – malgré le coronavirus

En fin de compte, la pandémie n’a pas affecté le sentiment général de sécurité et d’optimisme quant à l’avenir. Selon l’enquête complémentaire, ces valeurs sont restées au même niveau qu’avant la pandémie.

Le sentiment subjectif de sécurité dans l’espace public a même augmenté: 87% des personnes interrogées ont déclaré se sentir «très» ou «plutôt» en sécurité dans l’espace public. Selon les auteurs de l’étude, ceci est lié au fait que le nombre de cas en Suisse est rapidement reparti à la baisse au cours de la première vague. «La population suisse n’a pas ressenti de sentiment d’insécurité lors de la première vague», conclut l’étude.

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