Guanziroli au tribunalDes médecins zurichois accusés d’homicide par négligence
Silvana Guanziroli
11.1.2019
Cette opération de l’estomac devait être une intervention de routine – mais le patient est décédé. Aujourd’hui, les deux médecins ayant participé à l’opération comparaissent devant la justice pour soupçon d’homicide par négligence.
Pendant une semaine, Paul G.* se bat pour sa vie au sein du service de soins intensifs de la clinique. Fraîchement opéré, l’homme souffre de graves complications: une septicémie menace ses poumons et son système de coagulation sanguine. Les médecins doivent le mettre sous respiration artificielle, mais ne parviennent pas à le stabiliser. L’homme est victime d’une grave hémorragie cérébrale et décède.
Voilà ce qui figure dans l’acte d’accusation du ministère public IV du canton de Zurich, en charge des infractions avec violence. Les autorités sont convaincues que les deux intervenants, le chirurgien et le médecin spécialiste en soins intensifs, ont provoqué le décès du patient par négligence. Car s’ils avaient agi à temps, l’homme serait très probablement encore en vie à l’heure qu’il est. La procureure en charge de l’affaire exige que le chirurgien soit condamné à une peine pécuniaire de 360 000 francs et le médecin spécialiste en soins intensifs à 180 000 francs.
Cette opération fatale n’avait jamais été portée à l’attention du public avant aujourd’hui. Cette faute professionnelle présumée s’est pourtant produite en novembre 2012, au sein de la «Klinik im Park» de Zurich. Cette clinique privée fait partie du groupe Hirslanden, qui gère 18 hôpitaux en Suisse. Aujourd’hui, six ans après les faits, le chirurgien désormais âgé de 69 ans et le spécialiste en soins intensifs de 62 ans doivent comparaître devant la justice. Le procès s’est ouvert au tribunal de district de Zurich peu après huit heures ce vendredi.
Une sonde gastrique au lieu d’un scanner
Mais comment les médecins en sont-ils arrivés à commettre cette faute professionnelle majeure? Avant l’opération, le patient Paul G. souffrait d’une rupture du diaphragme. Dans le cadre de cette maladie, une partie de l’estomac remonte dans la cage thoracique par l’ouverture prévue pour l’œsophage. Cette affection n’est pas mortelle. Les personnes concernées souffrent de brûlures d’estomac, de douleurs derrière le sternum, de troubles de la déglutition et, dans certains cas, d’anémie. Lorsque les symptômes empirent, les patients sont contraints de subir une opération au cours de laquelle le diaphragme est refermé chirurgicalement. C’est ce qui est arrivé à Paul G.
Nous sommes le 31 octobre 2012 et il est 8 h 20. Les infirmières emmènent Paul G. dans la salle d’opération de la «Klinik im Park». Au premier abord, l’opération semble être une réussite, le patient est placé en salle de réveil vers 15 h 45. Paul G. se réveille de l’anesthésie et est parfaitement lucide. Au bout de quelques heures cependant, les choses se compliquent. Les médecins constatent que Paul G. a du mal à respirer, mais décident dans un premier temps de ne rien faire.
Le patient ne passera un examen radiographique que le lendemain matin. Grâce aux images obtenues, le spécialiste en soins intensifs comprend pourquoi Paul G. présente des difficultés respiratoires – une partie de son estomac est à nouveau remontée dans la cage thoracique. Il contacte le chirurgien. Cependant, ce dernier ne prend pas les résultats de son collègue au sérieux. Il dit avoir besoin de meilleurs éléments de preuve. Et c’est là que, d’après le ministère public, les deux médecins commettent une grave erreur. Au lieu de procéder immédiatement à un scanner, qui aurait pu démontrer l’urgence d’une deuxième intervention, ils décident de lui placer une sonde gastrique.
En introduisant la sonde gastrique, le spécialiste en soins intensifs blesse l’œsophage du patient, une blessure qui entraîne une infection. Pour le ministère public, il y a 65 à 70 % de probabilité que cette infection ait conduit à la septicémie et enfin au décès de Paul G. Voilà ce que le ministère public écrit au sujet du spécialiste en soins intensifs dans son acte d’accusation: «En raison de sa position et de sa responsabilité, l’inculpé aurait dû procéder à un scanner, même si cela allait à l’encontre de l’avis du chirurgien.»
Jusqu’à 3000 décès par an dus à des erreurs médicales
Les erreurs médicales sont chaque année à l’origine de quelque 2000 à 3000 décès et de plus de 60 000 problèmes de santé dans les hôpitaux suisses de soins aigus. Ces chiffres, l’Office fédéral de la santé publique (OFSP) ne peut que les estimer, car en Suisse, les erreurs médicales ne font pas l’objet d’un recensement systématique. Il n’y a cependant «aucune raison de penser que nos médecins font moins d’erreurs que les médecins pratiquant dans des pays similaires», a confié Manfred Langenegger, responsable qualité auprès de l’OFSP, aux médias à plusieurs reprises. En matière d’assurance qualité, la Suisse se situe loin derrière «d’autres systèmes de santé modernes».
Ceux qui souhaitent faire reconnaître une erreur médicale doivent souvent faire face à une multitude d’obstacles juridiques. Principale raison: la charge de la preuve incombe entièrement à la victime.
Voilà ce que vous pouvez faire en tant que patient:
- Renseignez-vous sur le médecin, l’hôpital et les options de prise en charge avant l’opération. Existe-t-il d’autres solutions que l’intervention? Demandez toujours un deuxième avis.
- Exigez du médecin ou de l’hôpital qu’il vous remette une copie de votre dossier médical, reprenant l’ensemble des examens réalisés en externe, des clichés radiographiques et des rapports d’opération.
- Demandez à un bureau de conseil aux patients de vous aider à comprendre si vous avez été victime d’une erreur médicale. Important: si un médecin ne vous a pas suffisamment informé des suites possibles d’un traitement, il devra répondre de tous les risques associés à l’intervention.
- Faites valoir vos droits à temps, car il y a des délais. En cas de préjudice grave, faites appel à un avocat spécialisé.
- En l’absence d’accord avec l’assurance du médecin, il ne vous reste qu’à porter plainte. Souscrivez rapidement à une assurance de protection juridique. Car ces procédures sont risquées et peuvent coûter cher.
Procès retardé
Dans le cas de Paul G., il a fallu attendre un certain temps avant l’ouverture du procès pénal. Motif: jusqu’à il y a peu, les affaires impliquant des médecins étaient encore gérées par une unité spécialisée du ministère public. Cependant, l’unité disposant de capacités insuffisantes, les retards se sont accumulés. En juin 2018, cela a même poussé la Direction de la justice du canton de Zurich à ouvrir une enquête contre le ministère public.
Ces affaires ont désormais été transférées au ministère public IV en charge des infractions avec violence et y sont traitées en priorité.
Les deux médecins inculpés vont enfin devoir répondre de leurs actes devant la justice. Cependant, ils pourraient s’en tirer à bon compte. Tous deux devraient au maximum être condamnés à une peine pécuniaire qui, dans les deux cas, pourrait être assortie d’un sursis.
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