MenacesDick Marty placé sous très haute protection policière
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10.4.2022 - 16:22
L'ex-procureur Dick Marty, 77 ans, réputé pour ses enquêtes internationales, y compris sur le trafic d'organes au Kosovo, a révélé être menacé de mort par des «milieux des services de renseignement serbes». Il vit sous protection policière depuis plus d'un an.
10.04.2022, 16:22
ATS
«Le 18 décembre 2020, j'ai reçu un appel de la police qui m'informait que j'étais menacé de mort et m'annonçait que j'allais être mis immédiatement sous haute protection policière», déclare Dick Marty, dans l'émission «Mise au point», qui sera diffusée dimanche soir sur la RTS.
Le danger était alors qualifié de degré 5, le maximum. Le protocole dans ce cas était de le faire disparaître, en déménageant et en changeant d'identité. Mais pour l'ancien procureur, «c'était totalement exclu», dit-il dans le reportage, relayé dans un tweet d'Anne-Fédérique Widmann, la journaliste de l'émission «Mise au point».
Maison truffée de caméras
Sous degré 4 depuis plus d'un an, «jamais personne en Suisse n'a été placé si longtemps à un tel niveau de danger», poursuit-il.
Sa maison est truffée de caméras, équipée d'alarmes et d'une pièce sécurisée, une «safe room», où Dick Marty, également ancien conseiller aux Etats (PLR/TI), doit se réfugier en cas d'attaque.
Le Ministère public de la Confédération (MPC) a confirmé l'existence d'une «menace sérieuse» à l'encontre de l'ancien procureur général du canton du Tessin depuis fin 2020, et la mise en place d'"un vaste dispositif de mesures».
«Les mesures de sécurité et de protection sont toujours maintenues, raison pour laquelle – afin de ne pas nuire inutilement à leur efficacité – aucun détail n'est communiqué à ce sujet», a indiqué le MPC, sans donner de détails sur l'origine de la menace.
Tueurs professionnels
Selon Dick Marty, «la menace vient de certains milieux des services de renseignement serbes qui ont demandé à la pègre, à des tueurs professionnels de me liquider tout simplement pour faire retomber la faute sur les Kosovars».
Ancien rapporteur du Conseil de l'Europe, Dick Marty a enquêté sur les centres de détention secrets de la CIA en Europe et sur des crimes présumés commis par l'ancienne guérilla kosovare de l'UCK, dont un trafic d'organes prélevé sur des prisonniers essentiellement serbes à la fin des années 90.
Fin 2020, le tribunal spécial pour le Kosovo, instance de droit kosovar installée à La Haye par souci de protection des témoins et chargée d'enquêter sur les crimes présumés commis par l'UCK pendant et après le conflit de 1998-99, a inculpé de crimes de guerre l'ancien chef de l'UCK Hashim Thaçi, devenu président du Kosovo, et ce dernier a dû démissionner de son poste.
Intervenir auprès de Belgrade
Le conflit (1998-1999), qui a fait 13'000 morts, a opposé, dans ce qui était à l'époque une province du sud de la Serbie, la guérilla indépendantiste aux forces serbes.
Selon un document du MPC que la RTS a pu se procurer, une source confidentielle aurait indiqué en 2020 aux services de renseignement suisses: «Dick Marty doit être assassiné sur ordre des services secrets serbes», et «afin de profiter de l'attention de la presse liée à l'inculpation de Hashim Thaci, le meurtre devrait être présenté comme étant imputable au gouvernement kosovar/albanais (ex-UCK) afin de le discréditer au niveau international.»
«Apparemment, un service étatique veut m'éliminer pour discréditer son adversaire, c'est absolument inacceptable», déclare à la RTS Dick Marty, qui estime que les autorités suisses devraient intervenir auprès de la Serbie.
Mesure insuffisante
Selon ses propos, les autorités judiciaires helvétiques auraient décidé «d'envoyer fin avril des policiers à Belgrade pour s'entretenir avec leurs collègues serbes», une mesure que l'ancien procureur tessinois juge insuffisante.
«A mon avis, on ne peut pas continuer de cette façon, à se limiter à la seule protection de la cible, sans avoir une stratégie de neutralisation de la menace», a poursuivi Dick Marty. Pour lui, le blocage actuel ne peut plus durer.
Dick Marty est considéré comme un des politiciens les plus connus de Suisse. On lui doit notamment la plus grosse saisie d'héroïne en Suisse lorsqu'il était procureur au Tessin.
En général, les personnalités en Suisse bénéficient d'assez peu de mesures de sécurité par rapport à d'autres pays, même si les autorités les ont durcies d'un cran face au mouvement antivax, très virulent depuis la pandémie de Covid-19.