Votation Initiative pour l'avenir : le Conseil fédéral craint de lourdes pertes

ATS

13.10.2025 - 14:30

L'initiative populaire de la Jeunesse socialiste «Pour l'avenir» pourrait provoquer des pertes fiscales. Le Conseil fédéral, qui a lancé lundi sa campagne pour la votation du 30 novembre, craint l'exil des plus fortunés.

Le Conseil fédéral craint des pertes fiscales avec l'initiative populaire de la Jeunesse socialiste "Pour l'avenir", qui veut un impôt sur les successions des grandes fortunes (archives).
Le Conseil fédéral craint des pertes fiscales avec l'initiative populaire de la Jeunesse socialiste "Pour l'avenir", qui veut un impôt sur les successions des grandes fortunes (archives).
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Keystone-SDA

L'initiative «Pour une politique climatique sociale financée de manière juste fiscalement» (initiative pour l'avenir) demande un impôt de 50% sur les successions et les donations à partir d'un montant exonéré de 50 millions de francs. Cet argent servirait à financer des mesures climatiques, insuffisantes à ce jour aux yeux des initiants, tout en contribuant à réduire les inégalités qui se creusent.

Afin de prévenir la fuite des grosses fortunes, le texte devrait entrer en vigueur le jour de la votation avec effet rétroactif. Selon les calculs des initiants, cet impôt rapporterait environ six milliards de francs par an, à hauteur de deux tiers pour la Confédération et d'un tiers pour les cantons.

Texte «problématique»

«Le réchauffement climatique est un des grands défis de notre temps. Le Conseil fédéral partage l'objectif de l'initiative. Mais une politique climatique n'existe pas sans financement stable et efficace», et l'initiative ne le garantit pas, a assuré la ministre des finances Karin Keller-Sutter en conférence de presse à Berne.

Le texte ne respecte pas non plus le fédéralisme, qui laisse aux cantons leur autonomie en matière de fiscalité. Il ne garantit pas que chaque franc soit utilisé là où il est bénéfique. Et il est contraire au principe du pollueur-payeur. Tout cela est bien «problématique» aux yeux du Conseil fédéral.

Baisse des recettes ?

Les 1% des contribuables les plus riches paient déjà près de 40% de l’imposition, soit plus de 5 milliards de francs de recettes fiscales par an. La mise en oeuvre de l'initiative pourrait pousser ces personnes et des entreprises à quitter la Suisse, a poursuivi la ministre PLR.

Selon une analyse commandée par l'administration fédérale, ces personnes sont très mobiles et nombreuses à changer de domicile lorsque les impôts sur les successions augmentent. Le nouvel impôt risquerait en outre de dissuader d'autres personnes à haut revenu de s'installer en Suisse.

Actuellement, on ne sait pas combien de personnes seront directement concernées par l'initiative, a précisé Mme Keller-Sutter. Selon les estimations de l’Administration fédérale des contributions, quelque 2500 contribuables en Suisse disposaient en 2021 d'une fortune supérieure à 50 millions de francs, pour une fortune imposable globale qui se monterait à 500 milliards de francs environ.

Les recettes effectives que pourraient amener le nouvel impôt sur les successions dépendront donc fortement de la réaction des personnes fortunées: si elles sont nombreuses à quitter la Suisse ou à renoncer à s’y installer, le nouvel impôt rapportera beaucoup moins que ce qui est théoriquement possible, voire provoquera des pertes fiscales. L'administration estime ces pertes entre 200 millions et 3,6 milliards de francs, selon les scénarios, lit-on à ce sujet dans la brochure de votation.

Les cantons veulent décider

Aujourd'hui, la Confédération ne prélève pas d'impôt sur les successions et les donations. En revanche, presque tous les cantons le font, en général avec des exemptions pour les conjoints survivants et les descendants. Pour ce qui est de la part des impôts sur les successions et les donations dans les recettes fiscales totales, la Suisse se situe dans la moyenne des pays industrialisés, selon la Confédération.

Les cantons sont convaincus qu'ils doivent pouvoir choisir eux-mêmes comment ils affectent leurs moyens en faveur de la population. L'initiative empièterait sur leur marge de la manoeuvre, a dit Markus Dieth, président de la Conférence des gouvernements cantonaux, également présent.

Le titre de l'initiative est «séduisant». Mais ce n'est pas le moment de se lancer dans des expérimentations, a conclu le ministre argovien.