Votation communale La Tour-de-Peilz: un donjon cristallise les tensions

nt, ats

19.11.2021 - 10:05

Les habitants de la Tour-de-Peilz (VD) votent le 28 novembre sur la rénovation de leur Château qui abrite le Musée du jeu. Soutenu par la Municipalité, le projet à 10 millions est combattu par un large front politique. Un restaurant dans le donjon cristallise les tensions.

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Mûri de longue date, le projet de l'exécutif prévoit une réfection de l'ensemble du site: le château d'importance nationale, la maison du jardinier, auxquels s'ajoute l'aménagement d'un restaurant dans les ruines d'un ancien donjon.
Mûri de longue date, le projet de l'exécutif prévoit une réfection de l'ensemble du site: le château d'importance nationale, la maison du jardinier, auxquels s'ajoute l'aménagement d'un restaurant dans les ruines d'un ancien donjon.
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Mûri de longue date, le projet de l'exécutif prévoit une réfection de l'ensemble du site: le château d'importance nationale, la maison du jardinier, auxquels s'ajoute l'aménagement d'un restaurant dans les ruines d'un ancien donjon. Or, l'objet divise fortement la population boélande et les partis.

Dégradé par le passage du temps

Pour la Municipalité, les travaux proposés garantissent la pérennité du monument et de ses bâtiments. Ils correspondent aux besoins de la commune, propriétaire et du Musée suisse du jeu, locataire. Ce dernier pourra se redéployer et se moderniser dans le corps de logis.

Le bâtiment principal du château, qui n'a pas été rénové depuis 30 ans, a subi des dégradations, a expliqué à Keystone-ATS Yves Roulet, chef du service domaines et bâtiments à la commune de la Tour-de-Peilz. La maison du jardinier, actuellement dans un état pitoyable, sera entièrement réhabilitée, détaille-t-il. Elle abritera les expositions temporaires du musée et pourra accueillir séminaires, conférences, banquets et mariages.

«Quant aux murs d'enceinte, les pierres tombent. Il est là aussi impératif d'agir», souligne le chef de service.

Confortable en toute saison

Les vestiges du donjon primitif seront valorisés et complétés avec du bois et des briques pour y abriter un restaurant. L'équipement est estimé à 1,85 million, le coût total à 3,3. La Municipalité relève qu'il «sera confortable en toute saison et aux normes énergétiques». Le canton a octroyé les autorisations nécessaires. Le revenu du loyer, estimé à 80'000 francs par an, permettra d’autofinancer ces coûts.

Amortis sur 30 ans, les investissements consentis ne représentent que 0,25 % du budget communal. Ils n'auront pas d’effet pour le contribuable, affirme l'exécutif qui ajoute que des subventions cantonales et fédérales réduiront la facture finale.

Délabrement programmé

A relever que l'Office fédéral de la culture a donné une autorisation formelle au projet sous conditions, souligne Yves Roulet. Cela signifie que des ajustements pourront être effectués pendant les travaux, notamment quant aux dimensions de la fenêtre prévue dans le restaurant.

Un groupe interpartis composé de 44 conseillers communaux soutient la proposition municipale. Il souligne qu'il est normal que les bâtiments historiques évoluent au fil du temps. Pour lui, ne rien faire implique de laisser le château, un attrait touristique important pour la ville, se délabrer.

Sarcophage de béton

Le groupe référendaire, dont les membres viennent également de tous horizons politiques, se dit tout à fait convaincu de la nécessité de rénover légèrement le Château et complètement la maison du jardinier. Il craint en revanche une «dépense somptuaire» pour créer un restaurant sur ce site archéologique.

Cet établissement sera un «sarcophage de béton» posé sur les vestiges uniques d'un donjon découverts pendant les fouilles à l'emplacement prévu pour le restaurant, a relevé Jean-Yves Schmidhauser, porte-parole du groupe référendaire et conseiller communal socialiste.

Une action qui aura un impact irréversible sur les vestiges, ce qui est non conforme aux règles en la matière, a-t-il souligné, déplorant que le projet n'ait pas été revu.

Impact financier

Le groupe référendaire s'insurge aussi contre l'impact financier de cet établissement. Sur le budget de dix millions, deux sont déjà investis. Il en reste huit. La Municipalité veut en dépenser 3,3 uniquement pour le restaurant, soit 41,% du montant total.

«C'est totalement excessif», estime M. Schmidhauser. «Ce montant ne pourra jamais être amorti: la différence, c'est le contribuable qui va la payer. Cela revient à subventionner un privé, exactement ce que vient de reprocher la Cour des comptes genevoise aux Bains des Pâquis», a-t-il observé.

Fantasmes du musée

Le groupe référendaire ne veut pas non plus d'un projet dont l'idée générale est d'attribuer l'entier des surfaces au seul bénéfice du Musée suisse du jeu. Cette institution est en baisse de fréquentation constante et n'a pas réussi à réunir les fonds pour sa nouvelle scénographie, relève-t-il.

«On répond aux fantasmes de ce musée, qui impliquent de construire un restaurant extérieur. Ce dernier pourrait être réintégré dans le corps de logis, ce qui permettrait de réduire l'investissement de deux millions», a estimé M. Schmidhauser.

Permis de construire délivré

La population boélande tranchera. Le législatif qui a opté pour un référendum facultatif a déjà approuvé à mi-septembre le crédit de construction de 10 millions. Fin octobre, le permis de construire a été délivré.

Si le projet est refusé dans les urnes, un nouvel appel d'offres en procédure ouverte et probablement à l'international sera nécessaire. Construit au 13e siècle, le Château abrite le Musée suisse du jeu depuis 1987.