"La Suisse complice"Le rassemblement interdit des anti-Biya à Genève tourne à l'émeute
ats
18.7.2021 - 17:58
«Paul Biya assassin, la Suisse complice». Malgré l'interdiction de manifester, plus d'une centaine de Camerounais ont protesté samedi sous bonne garde contre la présence du président de leur pays à Genève. Le rassemblement a tourné à l'émeute.
ats
18.07.2021, 17:58
18.07.2021, 20:09
ATS
Pendant une heure et demie, manifestants et policiers anti-émeutes se sont fait face déjà, à quelques dizaines de mètres de distance. Le «général» des opposants a demandé à parler aux autorités, en vain.
S'en est suivie une course avec la police entre les grilles du Palais des Nations, qu'un manifestant a tenté de franchir, et le début de la rue qui mène à l'Intercontinental. Le président de 88 ans est arrivé dimanche à Genève pour l'un de ses voyages privés réguliers dans cet hôtel, dénoncés par les opposants.
Quatre heures après le début de la manifestation, les opposants ont alors tenté à plusieurs reprises de forcer le cordon policier, lançant aussi plusieurs oeufs sur les forces de l'ordre. Celles-ci ont répondu à coups de canons à eau, de balles en caoutchouc et de gaz lacrymogènes, a constaté sur place un journaliste de Keystone-ATS.
Après plusieurs dizaines de minutes, la police a resserré son étreinte, poussant les opposants à se disperser dans plusieurs parcs de la ville. Deux personnes ont été légèrement blessées et emmenées à l'hôpital pour contrôle. Et une a été interpellée. Les autorités ont précisé dimanche que cette dernière a été condamnée à 40 jours-amende avec sursis.
Zone largement sécurisée
Auparavant, les manifestants avaient dénoncé la présence de Paul Biya et mis en cause la Suisse. «Nous allons montrer aux colons suisses que nous ne sommes pas venus pour rien», scandait l'un d'eux. Accusée de protéger un «dictateur génocidaire» auquel les manifestants attribuent 30'000 victimes contre la minorité anglophone dans le nord-ouest et du sud-ouest du pays, la Suisse a été priée de ne plus laisser le président entrer sur son territoire.
«Paul Biya tue son propre peuple et vient se faire soigner en Suisse. Nous disons non», criait l'un deux, venu à deux mètres des membres des forces de l'ordre. Les Camerounais s'en sont pris également à la police et aux multinationales actives dans le commerce des matières premières, établies à Genève.
Chants, sifflets et animations se poursuivaient sans interruption. La manifestation avait été interdite vendredi par les autorités, en raison de «possibles débordements» comme lors du précédent rassemblement contre le président camerounais il y a deux ans.
La police, qui avait recommandé à la population de fermer ses fenêtres et de ne pas se déplacer dans le quartier, avait quadrillé la zone de la Place des Nations. Des routes avaient été fermées et la dispersion du rassemblement a ensuite encore provoqué d'importants embouteillages.
A l'écart du groupe de manifestants, plusieurs Camerounais favorables au chef de l'Etat relayaient leur «honte». «Paul Biya, c'est le meilleur président», disait l'une d'entre eux, dénonçant des «anarchistes».
Pétition rejetée récemment
Depuis les révélations de l'arrivée de Paul Biya dimanche dernier, plusieurs petits groupes d'opposants avaient dû être dispersés. Trois personnes avaient été interpellées en début de semaine, dont une en infraction avec la loi sur les étrangers. Vendredi, une dizaine d'autres ont également été appréhendées par la police, a expliqué le porte-parole de la police genevoise Jean-Philippe Brandt.
Suite à ces interpellations, dix personnes ont été condamnées à des jours-amende avec sursis. Une a été condamnée à une peine privative de liberté de 180 jours avec sursis.
Au total, une coalition de dix organisations d'opposants, nommée «diaspora résistante camerounaise», avait appelé au rassemblement. Elle demande à la Suisse de ne plus laisser le président Biya entrer sur son territoire et de geler ses avoirs. Une pétition sur cette question avait été rejetée au Grand Conseil genevois.
La coalition accuse également le chef de l'Etat d'"élections truquées», de détournements de fonds «massifs» ou encore de violations des droits de l'homme.
Il y a deux ans, lors du précédent séjour du président camerounais, des violences avaient été observées entre pro-Biya et opposants, nécessitant l'intervention de la police. Un journaliste suisse avait été molesté et dépouillé par les gardes du président camerounais. Ceux-ci avaient été condamnés par la justice genevoise à des peines de prison avec sursis.
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