Politique suisse Droits de douane de Trump : les partis et l’économie somment Berne de réagir

ATS

3.4.2025 - 18:33

Plusieurs partis – Centre, PS, PVL et Vert-e-s – de même qu'economiesuisse appellent le Conseil fédéral à agir face à la hausse des droits de douane annoncée par Donald Trump. Pour le PLR, la Suisse doit essayer de négocier des «exceptions». L'UDC croit à «une erreur», alors que pour l'USS, «il n'y a pas lieu de dramatiser».

Face aux tarifs douaniers annoncés par Donald Trump, plusieurs partis politiques et faîtières économiques pressent le Conseil fédéral d'agir pour protéger les intérêts de l’économie suisse.(archives).
Face aux tarifs douaniers annoncés par Donald Trump, plusieurs partis politiques et faîtières économiques pressent le Conseil fédéral d'agir pour protéger les intérêts de l’économie suisse.(archives).
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Keystone-SDA

«L'augmentation des droits de douane nuit à tout le monde – y compris la Suisse», estime le président du Centre Gerhard Pfister. La décision du président américain «augmente l'incertitude», ajoute le parti.

Le Centre attend du Conseil fédéral «une analyse approfondie et rigoureuse des conséquences pour notre économie». Il faut trouver des solutions pragmatiques pour les branches touchées. Et «il s'agit avant tout de renforcer davantage les relations commerciales avec nos partenaires commerciaux fiables», ajoute Gerhard Pfister.

«Agir en concertation avec l'UE»

Pour le PS, le Conseil fédéral doit «agir en étroite concertation avec l'UE». «Il ne doit pas «tomber dans le piège de l'UDC, qui cherche à se rapprocher de Trump et à présenter la Suisse comme une traîtresse de l'Europe», juge le parti.

«Trump et son entourage ne poursuivent que leurs propres intérêts financiers. C'est pourquoi la réponse de la Suisse et de l'Europe devrait viser spécifiquement les profiteurs de ce régime néofasciste, en particulier les oligarques de la tech qui gravitent autour d'Elon Musk», estime Cédric Wermuth, coprésident du PS.

Pour le parti à la rose, «la présidente de la Confédération Karin Keller-Sutter doit adopter une position claire et condamner les tentatives d'intimidation agressives de Trump. Ce serait une erreur de continuer à miser sur la complaisance, l'évitement et l'apaisement».

Ces derniers développements «soulignent une fois de plus la nécessité pour la Suisse d'entretenir des relations stables avec l'UE, son principal partenaire commercial», ajoute le PS.

Echec de la «stratégie de séduction»

Les Vert-e-s constatent aussi que «la stratégie de séduction de Trump par le Conseil fédéral et Karin Keller-Sutter a échoué», la Suisse se retrouvant «seule» et «confrontée à l'arbitraire». Ils exigent «un plan clair» et une coopération étroite avec l'UE.

Le gouvernement doit «prendre un nouveau cap» et renforcer, avec nos partenaires européens, l'indépendance vis-à-vis de Washington. Il doit dans ce cadre impérativement s'engager en faveur des accords avec l'UE (Bilatérales III) et «accélérer le mouvement» en ce sens. Un accord de libre-échange avec les Etats-Unis s'éloigne lui de plus en plus du «faisable».

Les Vert'libéraux soulignent aussi l'importance de soigner les relations avec l'UE. «Depuis hier, il y a 31 nouvelles raisons pour les Bilatérales III», écrit sur X le président du parti Jürg Grossen, en référence aux droits de douane de 31% imposés par Donald Trump à la Suisse.

PLR pour un programme de revitalisation

Pour le PLR, la Suisse a besoin d'un programme de revitalisation après l'annonce de Donald Trump. Parallèlement, le Conseil fédéral doit essayer de négocier «des exceptions» avec le gouvernement américain.

Les autorités suisses doivent rappeler aux Etats-Unis que la Confédération est un investisseur important, mais renoncer à des contre-mesures sous forme de droits de douane sur les produits américains. Ceux-ci entraîneraient une augmentation du coût de la vie pour les consommateurs suisses et affaiblirait la compétitivité internationale de l'industrie d'exportation.

«Une erreur» pour l'UDC

Pour le conseiller national Thomas Matter (UDC/ZH), l'annonce de Donald Trump cache sans doute une erreur de données ou de calcul provenant d'une agence de presse économique, que Berne doit essayer de corriger.

Selon le Zurichois, il faut trouver une solution constructive avec les Etats-Unis. Pour lui, il est possible d'y arriver et un accord de libre-échange avec Washington serait certainement utile.

Eviter l'escalade, dit economiesuisse

Economiesuisse appelle elle aussi le gouvernement à négocier rapidement des solutions avec Washington. Pour l'économie exportatrice suisse, c'est «un coup dur», estime la faîtière, qualifiant les nouveaux tarifs de «nuisibles et injustifiés».

«Une nouvelle escalade du conflit commercial doit absolument être évitée», prévient-elle, à l'instar de l'Union suisse des arts et métiers (Usam), opposée à des mesures de rétorsion. Les Etats-Unis sont le principal marché d'exportation de la Suisse, devant l'Allemagne, rappelle economiesuisse.

USP «étonnée»

L'Union suisse des paysans (USP) a «pris connaissance avec étonnement» de l'annonce de Donald Trump. Dans l'ensemble, les Etats-Unis profitent fortement du commerce avec la Suisse et bénéficient d'un accès au marché sans droits de douane pour les produits industriels, argumente-t-elle.

«Ce n'est que pour les produits sensibles de l'agriculture suisse qu'il existe des droits de douane élevés (...). Ils sont nécessaires pour maintenir la production nationale, vu les très grandes différences de coûts en raison des exigences en Suisse», écrit l'association.

«Pas lieu de dramatiser» pour l'USS

«Les droits de douane américains sont certes gênants pour l'économie d'exportation suisse, mais il n'y a pas lieu de dramatiser», affirme pour sa part l'économiste en chef de l'Union syndicale suisse (USS) Daniel Lampart.

L'analyse des effets de l'introduction des droits de douane américains de 20% sur les marchandises chinoises en 2018 montre qu'ils ont été payés en grande partie par les Américains, dit-il.

Selon M. Lampart, il serait utile que le franc se déprécie par rapport au dollar, comme on peut théoriquement s'y attendre en cas d'introduction de droits de douane par les Etats-Unis. La Banque nationale devrait orienter sa politique monétaire en conséquence, ce qui atténuerait les effets économiques. Il n'y a pas de risque de renchérissement pour la Suisse, assure Daniel Lampart.

La Suisse devrait également «œuvrer activement à une alliance des pays démocratiques et sociaux avec l'UE et le Canada, afin que ces régions ne s'imposent pas mutuellement des droits de douane, mais coopèrent».