Croix gammées ou salut hitlérien devraient être interdits dans l'espace public suisse. Le Conseil fédéral a mis vendredi en consultation un avant-projet de loi spéciale visant les symboles nazis.
Les symboles nazis devraient être interdits en Suisse
Croix gammées ou salut hitlérien devraient être interdits dans l'espace public suisse. Le Conseil fédéral a mis en consultation un avant-projet de loi spéciale visant les symboles nazis. Le projet, qui répond à une demande du Parlement, vise les représentations les plus connues du national-socialisme: croix gammée, salut hitlérien ou encore les chiffres 18 et 88 utilisés comme signes de reconnaissance. Une amende de 200 francs est prévue en cas d'infraction.
13.12.2024
Il y a urgence à agir. «La Suisse ne peut pas tolérer le racisme et l'antisémitisme. C'est inacceptable dans une société libérale démocratique comme la nôtre», a lancé le ministre de justice et police Beat Jans devant les médias à Berne.
Mais la «triste réalité» est que les incidents antisémites se multiplient en Suisse. Depuis l'attaque du Hamas contre Israël le 7 octobre 2023, les symboles nazis assimilant le peuple juif et l'Etat d'Israël au régime nazi fleurissent dans l'espace public.
En Suisse romande, les incidents antisémites graves ont augmenté de pas moins de 68%, a précisé le ministre. Leur nombre a aussi pris l’ascenseur en Suisse alémanique et au Tessin.
Symboles du Troisième Reich
La nouvelle loi vise les représentations les plus connues du national-socialisme: croix gammée, salut hitlérien, rune de la victoire (le S stylisé de Siegrune qui, doublé, servait d'insigne aux SS). Ces symboles représentent la déportation et le génocide, la destruction des droits et libertés des citoyens, la guerre et l'anéantissement, selon le gouvernement.
L'interdiction porte également sur les variations des symboles nazis, notamment les chiffres 18 et 88 qui représentent la première et la huitième lettre de l'alphabet (A et H pour Adolf Hitler ou Heil Hitler). Le contexte sera pris en compte; ainsi porter un maillot de foot avec le numéro 18 ne sera pas punissable, a précisé M. Jans.
Les drapeaux, les insignes, les emblèmes ou encore les objets qui représentent ou contiennent de tels symboles ou leurs variations seront confisqués. Ces symboles nazis impliquent aussi l'exclusion et la persécution de personnes en raison de leur orientation sexuelle ou de leur identité de genre, de leur couleur de peau, de leur appartenance politique, religieuse ou ethnique ou de leur handicap mental ou physique.
Selon le Conseil fédéral, ils constituent une menace pour la paix publique et créent un climat d’insécurité générale. Plusieurs cantons romands ont déjà agi contre leur utilisation.
Amende de 200 francs
Le but est de protéger les libertés de la population que veulent justement détruire ces symboles, a avancé M. Jans. «En tant que société, nous devons dire ce que nous tolérons ou pas et poser des limites claires.»
Une amende de 200 francs est prévue en cas d'infraction. Elle devra être payée immédiatement et ne sera pas consignée, a encore indiqué le Bâlois. La somme reste identique même en cas de récidive.
Des exceptions sont prévues lorsque ces symboles sont utilisés à des fins éducatives, scientifiques, artistiques ou journalistiques. Ainsi, reporter des faits dans les médias, exposer des drapeaux dans un musée, ou encore monter une satire ou faire une caricature ne tombent pas sous le coup de la nouvelle loi.
L'utilisation de symboles religieux existants (notamment bouddhistes, hindouistes, jaïnistes) qui sont identiques ou semblables à des symboles nazis ne sera pas interdite non plus. Mais certaines limites devront être respectées.
Combler une lacune
Aujourd'hui, le code pénal permet de punir ceux qui utilisent un symbole raciste, extrémiste, nazi ou faisant l'apologie de la violence de manière à propager une idéologie. Ces personnes risquent une peine privative de liberté de trois ans maximum ou une amende.
Certains actes passent entre les mailles du filet. La nouvelle loi spéciale doit combler cette lacune le plus rapidement possible. Elle vise en particulier le fait d’utiliser, de montrer, d'arborer ou de diffuser des symboles nazis sans propager une idéologie auprès de tiers, sans porter atteinte à la dignité humaine et sans discriminer ou rabaisser une personne ou un groupe de personnes.
Le projet du Conseil fédéral répond à une demande du Parlement qui veut interdire les symboles racistes et extrémistes. Le Conseil fédéral propose une mise en oeuvre par étapes.
Dans un premier temps, les symboles liés au Troisième Reich seront interdits. L'utilisation en public de symboles racistes, faisant l'apologie de la violence et extrémistes devrait être prohibée dans un deuxième temps. Ce qui ne rend pas moins légitime leur punissabilité, précise le gouvernement.