Musique classique Une réouverture à 50 personnes n'est d'aucune aide pour l'OSR

bu, ats

18.3.2021 - 10:03

L'Orchestre de la Suisse romande (OSR) est suspendu aux décisions du Conseil fédéral comme le reste de la société et du milieu culturel. «Une réouverture à 50 personnes ne nous est hélas d'aucune aide. Cela n'aura pas d'impact sur notre activité», explique le directeur général de l'OSR, Steve Roger, à Keystone-ATS.

L'Orchestre de la Suisse romande (OSR) est suspendu aux décisions du Conseil fédéral comme le reste de la société et du milieu culturel. (archives)
L'Orchestre de la Suisse romande (OSR) est suspendu aux décisions du Conseil fédéral comme le reste de la société et du milieu culturel. (archives)
KEYSTONE/SALVATORE DI NOLFI

Keystone-SDA, bu, ats

Le Victoria Hall compte 1600 places: «500 personnes, cela me semblerait raisonnable. A partir de 300, on pourrait envisager une reprise des concerts en présentiel», observe Steve Roger, qui a retrouvé son poste de directeur général à la tête l'OSR en 2019, huit ans après l'avoir quitté.

Même si l'OSR est subventionné, il a des cachets à verser aux solistes et aux chefs, des montants qui sont en général compensés par les recettes. Sans elles, les subventions ne suffisent pas: «Il y a quand même un équilibre à trouver.»

Si la reprise à 50 personnes relève d'un problème économique, elle pose aussi la question de la sélection du public. «Comment choisir? On tire au sort? On accueille le sponsor prévu? Mais ce ne serait pas juste non plus, car nos concerts sont possibles grâce aux subventions.»

Concerts en tête-à-tête

Depuis un an, l'OSR, qui compte 112 musiciens dans ses rangs, n'a pas manqué de ressort. L'orchestre a par exemple donné plus de 130 concerts en tête-à-tête (#1to1concerts) dans différents lieux à Genève.

Un musicien joue devant un auditeur pendant un quart d'heure: ce dernier ne sait pas quelle pièce sera jouée. Certains, trop émus, se lèvent ensuite et s'en vont silencieux. D'autres vont échanger quelques mots avec l'artiste.

Cette semaine, trois séries de mini-concerts ont lieu au rooftop42. Mercredi, c'est une flûtiste de l'OSR, Jerica Pavli, qui a joué un extrait de Syrinx de Claude Debussy et de Méditation de Jules Massemet devant quatre participants: «Dans notre quotidien de musicien d'orchestre, nous ne sommes normalement pas si proche du public», dit-elle à Keytone-ATS Vidéo. «C'est une expérience magnifique.»

«C'est un moment assez unique en temps de pandémie», note pour sa part une auditrice. «Un quart de bonheur dans une après-midi banale: c'est un petit voyage en fait.»

«Ce sont des musiciens de l'orchestre qui m'ont parlé de ce système lancé à Stuttgart», poursuit le responsable, âgé de 50 ans. «C'est presque un modèle déposé. Nous sommes les premiers en Suisse à nous être calqués sur lui.»

D'autres ont suivi et pas uniquement dans le domaine de la musique classique. Mais ces concerts n'ont pas pour vocation de se poursuivre après la pandémie, même si Jerica Pavli et les auditeurs plébiscitent la formule.

Des moyens comme jamais auparavant

Les concerts one-to-one ne sont pas les seules nouveautés que l'OSR a proposées pendant la pandémie. «En mai et juin derniers, tout le monde a tout annulé alors que l'on aurait dû fêter les 250 ans de Beethoven. J'ai pris le contre-pied et proposé à la RTS que l'on joue la 9e Symphonie, ce qui a priori était impossible avec un choeur et un orchestre en raison de la situation sanitaire.»

«Et nous avons eu des moyens de la RTS comme jamais auparavant. Tous leurs camions étaient libres parce que les activités sportives avaient stoppé. Nous avons joué en juin une 9e de Beethoven complètement dispatchée dans le Victoria Hall. Cela nous a valu notamment de passer sur Arte.»

Reste que l'OSR est privé de public depuis des mois, le dernier concert remontant à octobre dernier: «95% de l'activité de l'orchestre, c'est de jouer pour du public». Paradoxalement, la formation classique aura pu toucher davantage de personnes pendant la pandémie, compte tenu de la diversité des canaux de diffusion utilisés, que lors d'une saison normale.

Le Boléro, mis en ligne dès les premières fermetures, a fait par exemple plus de 500'000 vues sur Youtube. «Nous étions très étonnés de ces chiffres que l'on n'a pas l'habitude de voir dans le classique.»

L'OSR a également pu profiter de ce temps particulier pour enregistrer trois disques prévus, mais auxquels sont venus s'ajouter deux autres. Ces derniers-nés sont issus du «coup de foudre» qui s'est produit entre le chef d'orchestre Daniel Harding et l'orchestre.

Pour ces enregistrements, l'OSR a pu profiter des disponibilités, liées aux annulations, du Victoria Hall. Côté répétition, la pandémie n'a pas vraiment changé la donne sauf pour le temps de travail. «Les musiciens ont connaissance du programme entre une semaine et un mois à l'avance. En temps normal, c'est un an.»

L'OSR a aussi acheté une roulotte de cirque, transformée en scène mobile. Des musiciens de l'orchestre ont ainsi donné plus de 30 concerts pour les résidents d'EMS et d'autres institutions dans les cantons de Genève, de Vaud et du Valais.

Une roulotte dans les cours d'école

Cette semaine, c'est un ensemble de cuivre qui joue depuis la roulotte. Elle se déplace d'école en école dans le cadre d’un festival voulu par la conseillère d'Etat Anne Emery-Torracinta pour soutenir le moral des enfants et des adolescents.

Au total, toutes formes confondues, l'OSR a donné 160 concerts depuis le début de la pandémie. En situation normale, il propose entre 50 et 60 concerts, dont une dizaine à l'étranger, auxquels s'ajoutent 50 représentations d’opéras.

L'orchestre a lancé encore diverses initiatives pendant l'année comme un festival en plein air à Genève-Plage fin août, une formule reconduite cet été. Le directeur musical Jonathan Nott a également permis aux internautes de suivre des répétitions en direct «un peu à l'image de ce qu'avait fait Bernstein, mais de façon beaucoup plus modeste en matière de moyens techniques», relève le directeur.

On ne mentionnera pas toutes les propositions de l'OSR depuis un an. Si les musiciens, privés de public, ont pu continuer à jouer, «pour le personnel administratif et technique, cette période aura représenté le double de travail par rapport à d'habitude», souligne Steve Roger.