Canton de Vaud Christelle Luisier: «L'heure est grave, la situation est critique et préoccupante»

ATS

10.4.2025 - 13:57

Les comptes du canton de Vaud plongent dans le rouge. Pour 2024, le déficit s'élève à 369,2 millions de francs, soit 120 millions de plus par rapport au budget. Pour la première fois depuis 22 ans, des mesures d'assainissement doivent être prises, à hauteur de 94 millions. Le budget 2026 sera aussi fortement impacté.

La présidente du gouvernement Christelle Luisier : «Nous ne sommes pas dans un sprint, mais dans une course de fond», a-t-elle voulu illustrer.
La présidente du gouvernement Christelle Luisier : «Nous ne sommes pas dans un sprint, mais dans une course de fond», a-t-elle voulu illustrer.
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Keystone-SDA

Les temps changent dans le canton de Vaud. De 2005 à 2022, les comptes affichaient systématiquement des chiffres noirs.

«Depuis, deux ans, on assiste à une forte dégradation», a affirmé jeudi sans détour le ministre des finances ad intérim Frédéric Borloz, remplaçant de l'ex-argentière du canton Valérie Dittli, écartée des finances à la suite d'un audit pointant des dysfonctionnements dans le département.

«La situation est critique, délicate et préoccupante»

«L'heure est grave pour le canton. La situation est critique, délicate et préoccupante», a renchéri la présidente du gouvernement Christelle Luisier, aux côtés de son collègue PLR et de la ministre socialiste de la santé Rebecca Ruiz.Les trois sont membres de la délégation aux affaires financières à la suite de la réorganisation des départements liée à l'affaire Dittli.

Mais Mme Luisier s'est voulu rassurante aussi. «Il faut garder confiance en notre canton, son attractivité, sa force et sa résilience, confiance en nos institutions et en un Conseil d'Etat uni dans les efforts indispensables à faire à l'avenir pour contenir la hausse des charges», a-t-elle déclaré.

«Nous ne sommes pas dans un sprint, mais dans une course de fond», a-t-elle voulu illustrer.

Facteurs multiples

La situation actuelle s'explique par une forte hausse des charges liées à des facteurs multiples, a expliqué M. Borloz. Les causes principales sont des effets automatiques: la hausse des primes maladie, qui induit une hausse des subsides, ou l'indexation des salaires due, elle, à l'inflation.

Il y a aussi la succession des crises, d'abord l'Ukraine puis la crise énergétique. Les effets démographiques pèsent aussi fortement sur les charges, a-t-il poursuivi. A cela s'ajoutent encore les mesures prévues par le Programme de législature, comme le plan de lutte contre la pénurie dans les métiers de soins, ou l’évolution de la politique socio-éducative. L'absence de distribution de bénéfices de la Banque nationale suisse (BNS) a aussi eu un impact.

Dans le détail, les charges ont dépassé la prévision budgétaire de 568 millions de francs à 12,2 milliards (+4,9%). Du côté des recettes, les revenus opérationnels ont grimpé à 11,83 milliards de francs, soit 448 millions de francs de plus (+3,9%) qu'au budget. Mais insuffisant pour compenser la hausse des charges.

Mesures d'économies dans les sept départements

Avec le déficit, la limite du mécanisme constitutionnel du «petit équilibre» – soit la couverture des charges par les recettes avant amortissement des éléments du patrimoine administratif de l'Etat – n'est pas respectée pour 94 millions. Comme le prévoit la loi sur l'assainissement financier (LAFin), des mesures d'assainissement s'imposent. Une première depuis 2003 dans le canton.

Les trois membres du gouvernement ont annoncé mettre en place un dispositif d'allègement des charges immédiatement dans le budget 2025 pour 79 millions de francs et sur le budget 2026 pour les 15 millions restants.

Ces mesures d'assainissement toucheront les sept départements. Mais ceux de la santé (24,2 mio), des infrastructures (20,3 mio) et de la formation (13,5 mio) seront les plus affectés.

«Nos efforts devront se poursuivre au-delà de 2026»

Concrètement, pour cette année déjà, des mesures seront prises, principalement dans le secteur des achats, ont indiqué les conseillers d'Etat. Pêle-mêle, ils ont cité «la remise en cause» d'achats de mobilier, d'appareils, de machines, de véhicules, mais aussi de matériel d'enseignement ou de collections muséales.

Des économies seront aussi réalisées sur l'entretien des routes, des cours d'eau, des bâtiments, des forêts, ou encore en matière d'équipement informatique. Des contrats et conventions de subventionnement (CHUV, UNIL, etc) seront aussi réévalués.

«Nos efforts devront se poursuivre au-delà de 2026. Des mesures d'économie d'environ 300 à 400 millions seront nécessaires dans le budget 2026 déjà pour respecter le cadre légal du petit équilibre», a prévenu Mme Luisier. Il s'agira de prioriser les projets, de les adapter dans leur contenu et rythme de réalisation, selon elle. Le Conseil d'Etat veut viser le petit équilibre budgétaire dès l'an prochain.