Le maire de la ville de Berne «Il faudrait louer les portables, pas les acheter»

Alec von Graffenried, maire écologiste de la ville de Berne, s’engage en faveur d’une attitude positive face aux progrès du numérique et estime qu’il faudrait louer les portables plutôt que de les acheter.

«Bluewin»: Monsieur von Graffenried, l’ère numérique influence-t-elle le développement urbain?

Alec von Graffenried: Certaines technologies sont indispensables pour vivre le développement durable. L’utilisation efficiente des ressources – l’énergie par exemple – exige des outils intelligents. Les concepts rétrogrades comme «économiser davantage» ou «restreindre davantage» n’apportent aucune solution. Car nous voulons nous développer afin de retrouver l’équilibre à un autre niveau.

Quels défis politiques bénéficient des outils numériques?

L’ère numérique est à même d’apporter des améliorations dans tous les domaines, dans la communication par exemple: grâce aux outils de traduction, le plurilinguisme ne présentera bientôt plus aucun problème. Il y a encore vingt ans, personne n’aurait pu imaginer ce que le progrès technologique nous permettrait un jour d’accomplir. L’évolution se poursuit et peut nourrir certaines craintes, notamment lorsque les mutations du monde professionnel mettent votre emploi en péril. Une situation à laquelle nous avons déjà été confrontés par le passé. La crainte n’est pas de mise, nous ferions mieux de nous montrer curieux et de nous ouvrir aux nouvelles possibilités qui s’offrent à nous. Tout en évitant bien sûr qu’une partie de la population ne décroche. Bénéficier au mieux des opportunités de l’ère numérique, c’est prendre chacun à bord. Il faut qu’il n’y ait que des gagnants, pas de perdants.

Alec von Graffenried, maire écologiste de la ville de Berne

La politique et l’économie se mettent-elles des bâtons dans les roues en matière de développement urbain?

Non, pas à mon sens. Peut-être l’économie trouve-t-elle le rythme de la politique un peu lent (il rit). Mais les conflits sont rares. Il me semble important que les objectifs communs en matière de développement durable soient plus contraignants, voire plus ambitieux. En Suisse, les processus de négociation politiques prennent du temps, certains estiment qu’ils en prennent trop. C’est aussi ce qui fait notre pays.

Quels projets smart city sont en cours ou prévus à Berne?

Ils sont nombreux! Nous sommes en train d’optimiser l’éclairage public. Avec une gestion plus efficace et de nouvelles ampoules, nous économisons 50% d’électricité et l’éclairage gagne en qualité. L’incinération des ordures forme une immense centrale de cogénération qui produit du courant électrique et de la chaleur en fonction des besoins. En ce qui concerne la mobilité intelligente, notre but est de permettre aux usagers de choisir le moyen de déplacement le mieux adapté. Les villes suisses ont beaucoup investi dans les transports publics, négligeant parfois la mobilité douce. En Allemagne, aux Pays-Bas et au Danemark, les villes sont plus avancées et disposent déjà d’excellentes infrastructures cyclistes, qui s’avèrent en outre meilleur marché. Les villes suisses ont un fort potentiel de rattrapage. Certes la topographie joue un rôle non négligeable, mais les vélos électriques permettent de surmonter cette difficulté.

Quelle est la première chose à mettre en place dans une ville intelligente?

Pour une ville, il est crucial de pouvoir compter sur un réseau de transports intelligent et performant aux émissions aussi faibles que possible. Ce qui nous manque encore à Berne, c’est un système de location de vélos. Mais il est planifié. Les gens auront tendance à renoncer à leur propre vélo pour recourir à la location, qui comprend les frais d’entretien. Je serais d’ailleurs favorable à ce que Swisscom fasse la même chose avec les portables. Ce que nos enfants dépensent aujourd’hui pour leurs smartphones est tout simplement indécent (il rit). Ils dépensent tout leur argent de poche pour réparer leur écran endommagé. Par le passé, les PTT louaient aussi leurs téléphones.

Alec von Graffenried, maire écologiste de la ville de Berne

Que faut-il pour que les Bernoises et les Bernois adoptent ce processus de changement avec enthousiasme?

Je crois que l’enthousiasme est déjà présent, seules quelques peurs les freinent encore. Vaincre ces peurs fait partie de mes tâches. Force est de constater que nous allons très bien, mieux qu’il y a une vingtaine ou une cinquantaine d’années. Le tournant numérique a rendu beaucoup de choses possibles, sans nous rendre malheureux. Il est de notre ressort que la nouvelle étape de la transition numérique contribue à la satisfaction et au bien-être de tous. Il faudrait que la population considère le numérique avec davantage de curiosité, en voie les possibilités plutôt que de se polariser sur les peurs et les risques.

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