Stefano Domenicali «Si des écuries de F1 avaient fait moins d'erreurs...»

AFP

10.11.2022

Heureux de la popularité «incroyable» de la Formule 1, son président Stefano Domenicali explique à l'AFP les raisons de ce succès et récuse les critiques relatives aux droits humains au Moyen-Orient ou à l'empreinte carbone du championnat, qu'il voit comme un «accélérateur de changements».

Stefano Domenicali, patron de la F1, s’est confié à l’AFP.
Stefano Domenicali, patron de la F1, s’est confié à l’AFP.
Keystone

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Rencontré à Mexico fin octobre, l'Italien défend le futur calendrier record de 24 Grands Prix, dont quatre au Moyen-Orient, dans des pays régulièrement accusés de bafouer les droits humains par des ONG. Interview...


Comment expliquez-vous cette popularité retrouvée ?

«Le succès est incroyable au niveau mondial. On a un retour des fans, au niveau commercial, des promoteurs ou des médias, qui est exceptionnel. Il y a beaucoup de raisons à cela, à commencer par notre système inclusif avec tous les pilotes qui sont proches de nos fans sur les réseaux sociaux. On offre beaucoup de possibilités à tous nos partenaires commerciaux pour développer leurs activités. D'un autre côté, Netflix a aidé pour qu'arrivent de nouvelles classes de fans. On doit avoir la flexibilité de comprendre que certains fans veulent tout connaître des voitures -et on doit leur donner les informations qu'ils méritent- et que d'autres sont attirés par le lifestyle, l'entertainment (divertissement) et le business qu'on a créés».

Sportivement, la saison 2021 a été extraordinaire avec le duel Verstappen-Hamilton, mais cette année le Néerlandais a tué tout suspens. N'y a-t-il pas un risque de lassitude ?

«Non, je ne pense pas. Toutes les courses ont été à guichets fermés. Et puis Verstappen et Red Bull ont fait un travail magnifique, peut-être que les autres ont fait des choses moins bien. Si d'autres équipes avaient fait moins d'erreurs, on aurait eu une situation très différente (...). Je suis sûr que l'année prochaine, on aura un championnat très serré. Et, dans tous les cas, on a déjà vendu un nombre de billets incroyable».

Vingt-quatre Grands Prix sont programmés en 2023, un record. Est-ce la limite ?

«Avec 24, on approche de la limite. Mais on ne peut jamais dire que c'est terminé. La F1 a eu des périodes avec 17 Grands Prix vraiment difficiles à trouver. Aujourd'hui nous en sommes-là car notre succès est incroyable. Mais si on doit trouver un équilibre, je pense que 24 c'est bien. Il y a beaucoup d'autres pays qui voudraient accueillir un Grand Prix. Demain matin, on pourrait signer avec sept ou huit autres pays en plus. Mais on ne peut pas le faire».

Quatre courses au Moyen-Orient (le Qatar rejoint Bahreïn, Abou Dhabi et l'Arabie saoudite) ou encore une en Azerbaïdjan: quel est le sens sportif et celui des droits humains ?

«On dit la même chose à chaque fois. Nous sommes un système très ouvert. Il y a des pays qui veulent changer les choses, et on pense qu'être là porte un coup de projecteur pour que les choses changent. On travaille avec les Nations unies, il n'y a aucun problème, on n'a rien à cacher. (...) Ce n'est pas mon rôle de discuter de politique, mais ces pays veulent changer de cultures, qui sont millénaires, est-ce que vous pensez que c'est possible du jour au lendemain ? La F1 est un accélérateur de changements. Si on n'était pas là, on parlerait moins de ces pays, ce serait plus négatif».

Vous vous positionnez donc comme la Fifa au Qatar pour sa Coupe du monde, avec une problématique similaire ?

«Je ne pense pas. J'ai lu des choses sur la Fifa et le Qatar qui n'ont rien à voir avec notre situation avec le Qatar. La piste est là depuis dix ans (le circuit de Losail pourrait néanmoins être remplacé par un nouveau dans le futur, ndlr). On doit avoir une approche très sérieuse. On vérifie, quand on va dans un pays, que le promoteur respecte certains points. Si le promoteur ne les respecte pas, il y a des clauses dans le contrat, qui peut se terminer immédiatement».

Par ailleurs, la F1 compte être neutre en carbone d'ici 2030. Comment y parvenir en organisant de plus en plus de courses ?

«On a une responsabilité importante, la F1 peut pousser pour le changement dans un cadre mondial. On va utiliser dans le futur un carburant durable. Nous sommes un championnat mondial, donc pour aller partout dans le monde nous avons une empreinte carbone. Mais on pense qu'avec le carburant durable, cela sera résolu. On a des objectifs et on pense peut-être les atteindre avant. Dans le cadre de notre mobilité, il y a le bateau, l'avion, et jamais ils n'utiliseront l'électrification totale. Donc on va utiliser le carburant durable pour avoir un effet plus important. Aussi avec tous les promoteurs, on a un programme d'utilisation d'énergie renouvelable. En piste, on a les moteurs hybrides les plus performants, les plus efficients au monde».

Les F1 seront-elles 100% électriques un jour ?

«Je ne pense pas. Le sport a deux éléments très importants, technique et passionnel. Si on n'a pas cette combinaison, on perd tout».