La Suisse n'a toujours pas remporté de victoires en 2020. Et ce rassemblement d'octobre a presque tourné au fiasco comptable pour l'équipe nationale, qui voit sa place en première division de la Ligue des Nations s'éloigner, malgré des prestations honorables.
Tout est relatif dans le monde de l'équipe de Suisse. Elle ne gagne pas, mais elle ne joue pas mal. Elle perd 1-0 en Espagne, mais elle a été solide défensivement. Elle marque trois buts en Allemagne, mais elle est en prend trois aussi. Elle n'a au final perdu aucune de ses deux confrontations contre la Mannschaft, mais elle a pourtant de grandes chances de terminer à la dernière place de son groupe et d'être reléguée en Ligue B.
Et puis, on se demande si c'est grave. Ce n'est pas vraiment le cas. Cette Ligue des Nations est un excellent moyen de remplacer les matchs amicaux par un petit peu d'enjeu contre de belles équipes, mais elle n'a pas la même valeur que n'importe quelle autre compétition internationale. S'il faut passer par un échec à l'automne pour arriver avec une équipe performante à l'Euro l'été prochain et y réaliser un beau parcours, alors cela aura été un mal pour un bien.
Progression et frustration
«Nous sommes sur le bon chemin», disait Vladimir Petkovic après ce match nul 3-3 en Allemagne mardi. Evidemment, il a raison. La Suisse progresse dans le jeu et tente à chaque match de corriger ses errements. La verticalité qui lui a manqué en Espagne samedi est devenue un axe prioritaire à Cologne trois jours plus tard.
Cela a fonctionné, les trois buts en sont une certaine illustration, notamment les deux derniers (de Freuler, puis le second de Gavranovic). Le premier, l'ouverture du score de Mario Gavranovic, a beau être venu d'un corner, il ne s'agit pas d'occulter que celui-ci a été obtenu après une séquence de pressing haut dans le camp allemand. Cet élément qui fait déjà partie de la palette de cette équipe depuis les rencontres de septembre.
Pas de quoi atténuer la frustration. A bien dérouler son jeu mais à ne pas gagner, la Suisse nourrit un sentiment d'échec match après match. «Encore une fois, je dois commenter une partie où l'on méritait mieux», soupirait Petkovic. Ses cadres ont eu le même discours et c'est à s'interroger sur ce qui déraille vraiment: le plan de jeu ou son application ? En clair, la Suisse fait-elle réellement tout juste pour gagner des matchs face à des grandes nations ? Les deux petits points glanés en quatre rencontres (plus la défaite 2-1 en amical contre la Croatie la semaine dernière) balayent l'hypothèse de la seule malchance.
Elle ne serait quoiqu'il en soit pas crédible, lorsque l'on relève les buts encaissés par la Suisse contre l'Espagne et l'Allemagne. Une erreur de relance de Yann Sommer à Madrid, au moins deux légèretés de Fabian Schär à Cologne. «Des erreurs gratuites, des cadeaux», pour Petkovic, dont les idées se veulent impuissantes pour empêcher ce genre de choses. L'approche du Mister et de son équipe offre la prime au risque, il l'avait reconnu après la défaite en Espagne. Compatible avec la Suisse et ses limites d'autant plus criantes dans ce genre de cas ?
Le problème des individualités
Car c'est face à de tels adversaires que l'équipe nationale révèle ses carences. A vrai dire, elles sont surtout individuelles. Les contingents à disposition sont incomparables. Mardi, Joachim Löw pouvait se permettre de laisser sur le banc des Julian Draxler, Julian Brandt, Niklas Süle, Emre Can, et cela n'empêche pas la Mannschaft et son sélectionneur d'être en crise, de faire face aux critiques. Alors quand Petkovic doit s'appuyer sur des joueurs au temps de jeu variable dans des clubs qui ne jouent pas forcément le haut de tableau, il part de loin.
Et pourtant, la Suisse a tenu tête à l'Allemagne sans un certain nombre de joueurs importants: Manuel Akanji, Kevin Mbabu, Denis Zakaria ou Breel Embolo notamment. Leur statut en club et le niveau qu'ils sont capables d'atteindre devraient laisser un trou en sélection. Force est d'admettre qu'ils sont remplacés de manière honorable, même si leur retour en novembre est intensément escompté. «Comme pour Shaqiri, j'espère que certains joueurs seront plus en forme le mois prochain», a fait le voeu Petkovic.
Contre l'Espagne et l'Ukraine, il faudra prendre quatre points au moins, dont trois sans négociation possible contre la sélection d'Andriy Shevchenko. Et pour gagner, il est clair que Xherdan Shaqiri sera un atout de choix. Mercredi, en une heure de jeu, malgré des prises de balles défaillantes, des choix pas toujours opportuns, la Suisse s'est rappelée à son bon souvenir. Au saut de qualité que lui seul peut amener à l'équipe nationale, sur l'une ou l'autre séquence. Il lui a manqué de la consistance, du rythme aussi. C'est normal: en deux matches en sélection, il a plus joué que depuis le début de saison à Liverpool. Telle est la réalité de la Suisse. Celle qui lui permet de relativiser.