«Douleur et fierté». La légende du football ukrainien Andriy Shevchenko a exprimé à l’AFP la «douleur atroce» ressentie en février au moment de l'invasion de son pays par l'armée russe et son «admiration» pour le peuple ukrainien.
Dans cet entretien réalisé le 17 octobre par échange de mails, celui qui est aujourd'hui ambassadeur d'une organisation caritative, United24, explique pourquoi il a décidé de récolter des fonds pour financer l'aide urgente à son pays plutôt que de prendre les armes comme l'ont fait certains sportifs ukrainiens.
«Nous sommes sur le point d’annoncer le premier projet (...). Au total, plus de 200 millions de dollars ont été collectés en cinq mois. Des personnes de 110 pays ont contribué», se réjouit le Ballon d'Or 2004, qui «pense avoir pris la bonne décision».
L'ancien buteur du Milan AC a voulu se rendre «utile» après avoir «vu des enfants jouer dans un champ au milieu des cratères de missiles» à Irpin, une ville en banlieue de Kiev.
L'ex-sélectionneur de l'Ukraine (2016-2021) se dit «submergé par l'émotion» devant cette détermination des jeunes à continuer à jouer au foot au milieu d'un paysage dévasté.
Sympathie et admiration
Shevchenko, 46 ans, fils d’un «militaire, qui, malgré son éducation, s'est opposé aux guerres toute sa vie», se souvient de sa colère après l'invasion russe en février: «J'ai ressenti une douleur si atroce que je ne pouvais même pas respirer».
«Je ne pouvais pas comprendre que des bombes tombent au centre de l'Europe démocratique», se remémore-t-il. «Je devais rapidement décider comment aider mon pays. J'ai choisi d'utiliser mon nom, me battre publiquement.»
Le vainqueur de la Ligue des champions 2003 avec l'AC Milan et la joueuse de tennis Elina Svitolina ont «immédiatement» accepté une invitation du président Volodymyr Zelensky les appelant à devenir ambassadeurs de United24.
Shevchenko a rencontré le président à Kiev le 18 mai. «C'était la première fois que je me rendais en Ukraine depuis le 24 février (et le début du conflit). La guerre durait déjà depuis deux mois et demi.» «J’ai vu une Kiev vide mais indomptable. C’était un moment très émouvant pour moi», se rappelle-t-il.
L’organisation caritative a été mise en place par Zelensky pour collecter des dons afin de couvrir les besoins les plus urgents: défense et déminage, aide médicale et reconstruction du pays.
Shevchenko, dont la mère et la soeur ont pu quitter Kiev six semaines après l’invasion, n’a «jamais cessé d’être étonné par la résilience de (ses) compatriotes».
«Des gens que j’ai rencontrés à Borodianka (banlieue de Kiev), dans une maison temporaire construite pour 22 familles, nous ont accueillis avec le sourire aux lèvres, déclare-t-il. Même si ces personnes ont tout perdu, elles continuent de profiter de la vie.»
«Les Ukrainiens suscitent non seulement la sympathie, mais aussi l'admiration du monde entier», affirme celui qui a aussi porté les maillots du Dynamo Kiev et de Chelsea.
Le soutien de Lewandowski
Dans son nouveau combat, Shevchenko peut compter sur le soutien de l'AC Milan: «il n’y a pas de mots pour décrire ce que j’ai ressenti lorsque mon ancien club a mis en vente un t-shirt spécial, frappé de mon numéro, en soutien à l’Ukraine».
Une vente qui a permis de récolter 200.000 euros destinés à reconstruire un terrain de football pour enfants à Irpin détruit par des missiles russes. Egalement touché par le «soutien constant» de l'attaquant polonais de Barcelone Robert Lewandowski, l'icône ukrainienne est inquiète devant la capacité de la Russie à frapper.
«Il y a une semaine, j’ai quitté Kiev en train, le jour des frappes les plus dévastatrices depuis le 24 février. Aujourd’hui (le 17 octobre), la Russie a de nouveau attaqué des civils.»
Comme ses compatriotes, l'ancien joueur se veut pourtant résilient et croit en des jours meilleurs: «Au milieu de l'horreur, je veux retenir cette photo d'un sauveteur sortant un petit chaton des décombres.»