Scénario français d'un clap de fin ou hypothèse allemande d'une reprise? Les clubs italiens veulent reprendre leur championnat, mais les obstacles restent considérables: nouveaux cas positifs parmi les joueurs, tests, désaccords avec les autorités sanitaires.
«Dites-nous ce qu'il faut faire pour retourner jouer». C'est ainsi que, selon les médias italiens, le président de la Fédération italienne (FIGC) Gabriele Gravina s'est adressé jeudi au Comité technique et scientifique (CTS) qui conseille le gouvernement sur le redémarrage progressif d'un pays entièrement confiné entre le 9 mars et le 4 mai.
Le fossé est illustré par le directeur sportif du Milan AC, Paolo Maldini, et un des membres du CTS, Alberto Villani. Jeudi, le premier, lui-même testé positif en mars, a insisté sur Instagram sur «le devoir d'essayer de revenir sur le terrain».
«Ecoutez... Ce virus a paralysé la planète, a répondu le praticien dans les colonnes de La Repubblica. Il y a des milliers de morts, notre système sanitaire a failli s'effondrer, avec un personnel médical épuisé (...) Quelqu'un poserait la question du football si les bombes tombaient? Considérez que nous sommes en guerre, qu'il y a un tremblement de terre, qu'un tsunami est en cours».
«Signaux négatifs»
«Certains pays comme la France et les Etats-Unis se sont moqués de nous, désormais ils nous prennent pour modèles», a-t-il rappelé. En France, les autorités ont sifflé la fin de la saison de football. Aux Etats-Unis, malgré des enjeux financiers également considérables, la plupart des franchises du championnat NBA de basket ne semblent pas prêtes à reprendre l'entraînement rapidement.
Quasiment pendant la réunion entre le CTS et les instances du football, deux clubs, la Fiorentina et la Sampdoria Gênes annonçaient dix cas positifs, sept joueurs et trois membres de l'encadrement de la Viola, tous asymptomatiques. La veille, le Torino en avait identifié un, alors que les entraînements individuels reprennent. Autant de «signaux extrêmement négatifs pour un redémarrage du championnat», estime le quotidien Il Messagero.
D'autant qu'il se heurte au noeud gordien des discussions. Le monde du football souhaite un scénario à l'allemande, où seuls les infectés seraient mis à l'isolement. Le comité scientifique insiste pour que le Calcio se soumette à la règle générale: doivent être isolés ceux qui ont été en contact avec des cas positifs. Le moindre dépistage positif après la reprise des entraînements collectifs, espérée pour le 18 mai, mettrait sur la touche toute l'équipe...
Autre obstacle: le protocole présenté au CTS prévoit un dépistage régulièrement répété pour chaque joueur, ce qui suppose l'acquisition d'un nombre considérable de kits. La promesse de les chercher ailleurs que dans les régions en tension, notamment la Lombardie, éteindra-t-elle toute critique dans un pays qui en a un besoin considérable? Enfin que se passera-t-il si dans ce pays décentralisé, des régions interdisaient l'entrée de visiteurs de secteurs touchés?
Les stars étrangères rentrent
«Il faut être prudent mais ne pas reprendre serait un désastre, à tout point de vue. La France a eu tort d'arrêter», a jugé Paolo Maldini. Une à une les stars étrangères rentrent: Cristiano Ronaldo (Juventus) en début de semaine, Franck Ribéry (Fiorentina) vendredi, bientôt Zlatan Ibrahimovic (AC Milan), signe que les clubs comptent ne rien lâcher.
Alors que Serie B et Serie C (2e et 3e divisions) semblent proches d'annoncer la fin de leur saison, la décision sur l'élite pourrait intervenir lors du prochain du Conseil des ministres dans quelques jours. «Je ne me risque pas à des prévisions en ce moment, nous devons être prudents et espérer que d'ici au 18 mai» et la reprise des entraînements collectifs, «les données sur la contagion seront positives afin de reprendre doucement», a déclaré le ministre des Sports Vincenzo Spadafora. S'il devait y avoir reprise, ce sera à huis-clos, a-t-il prévenu.
«Nous vivons dans un contexte européen, nous devons chercher à harmoniser», a déclaré vendredi un des principaux responsables sanitaires d'Italie, Silvio Brusaferro. Un avis qui ne donne aucun indice: certains regarderont vers l'Allemagne, les autres vers la France.