Qui a dit que la Suisse ne battait jamais les grandes équipes ? En l'espace de quinze mois, elle a éliminé la France de l'Euro 2021, devancé l'Italie dans le tour préliminaire de la Coupe du monde, battu le Portugal à Genève avant de s'imposer devant l'Espagne à Saragosse. On veut croire désormais que le ciel est sa seule limite.
Samedi à Saragosse, Murat Yakin est devenu le premier sélectionneur de l'histoire à mener la Suisse à la victoire en Espagne. Il y est parvenu grâce à un choix fort, avec Haris Seferovic relégué sur le banc, à un dispositif tactique en 4-2-3-1 pour fermer admirablement les petits espaces et, surtout, au soir de grâce de Manuel Akanji.
Auteur de l'ouverture du score à la 21e de la tête pour son premier but en 42 sélections et d'un magnifique assist sur le 2-1 de Breel Embolo à la 58e, le Zurichois a survolé cette rencontre de toute sa classe. Comme si son récent transfert à Manchester City l'avait amené dans une autre «dimension».
«L'équipe a appris de ses erreurs»
Manuel Akanji ne fut toutefois pas le seul héros de la soirée. Yann Sommer a confirmé qu'il était bien l'un des tous meilleurs gardiens au monde. La vitesse avec laquelle il est allé au sol sur la frappe de Soler dans le temps additionnel l'a démontré. En ligne médiane, Granit Xhaka et Remo Freuler ont fait valoir leur sens de l'anticipation pour couper les lignes de passes.
«Leur rôle fut déterminant, remarque Johan Djourou, l'oeil de la RTS sur l'équipe de Suisse. Ils n'ont pas permis à Pedri et à Gavi de prendre l'intérieur. Ils n'avaient pas pu le faire en juin dernier à Lisbonne face au Portugal. Et l'on voit que cela change tout.»
Pour Murat Yakin, la défaite 4-0 du 5 juin contre Cristiano Ronaldo et les siens s'expliquait par une trop grande «naïveté». «Heureusement, l'équipe a appris de ses erreurs», souligne le coach national.
Enchaîner maintenant
Maintenant, il convient de bien enchaîner pour capitaliser cette victoire historique en Aragon. Mardi à Saint-Gall, la Suisse, qui sera privée de Manuel Akanji suspendu, devra prendre au moins un point devant la République tchèque pour assurer son maintien parmi les seize meilleures équipes de la Ligue des Nations.
On rappellera les incidences d'une relégation: la perte du statut de tête de série pour le tirage au sort du tour préliminaire de l'Euro 2024 qui aura lieu le 9 octobre prochain à Francfort et, surtout, le manque d'attractivité des adversaires en Ligue B de cette Ligue des Nations qui se répercutera bien sûr sur les affluences.
Mardi, Murat Yakin et ses joueurs espèrent ainsi jouer dans un stade plein pour prendre congé du public suisse comme il se doit à deux mois de la Coupe du monde. Face à des Tchèques qui ont, à leur tour, subi la foudre portugaise pour une défaite 4-0 à domicile samedi soir, les Suisses devront, cette fois, convaincre dans un autre registre: celui du jeu offensif. «Nous ne jouerons pas le 0-0», assure Murat Yakin qui ne devrait pas, à priori, apporter beaucoup de modifications dans son onze de base.
Remplaçant du remplaçant
Buteur lors du succès 1-0 contre le Portugal le 12 juin, Haris Seferovic n'a eu droit qu'à une petite poignée de minutes à Saragosse. Introduit à la 87e minute, le Lucernois a perdu son rang. Il n'est plus aujourd'hui que le remplaçant... du remplaçant.
Noah Okafor, qui a dû décliner sa sélection en raison de maux dentaires, et Ruben Vargas le devancent désormais dans l'esprit de Murat Yakin pour entourer les deux incontournables que sont Breel Embolo et Xherdan Shaqiri. A Saragosse, la titularisation de Vargas a surpris. Elle fut, toutefois, couronnée de succès dans la mesure où le Lucernois a eu la bonne idée de botter les corners qui ont amené les deux buts.
Si Murat Yakin conserve toujours cette main heureuse, tous les espoirs sont permis pour la prochaine Coupe du monde. Au Qatar, la Suisse sera confrontée à une tâche bien ardue face au Brésil, sans doute «le» favori cette Coupe du monde, face à une Serbie qui a également marqué les esprits samedi avec un succès 4-1 devant la Suède, et le Cameroun, un adversaire capable vraiment du meilleur comme du pire. «Sortir de ce groupe sera une très grande performance», glisse Johan Djourou. Mais elle est à la portée d'une équipe qui a témoigné d'un tel esprit de corps à Saragosse.
ld, ats