René Fasel Fasel: "Les signaux indiquent que le Mondial n'aura pas lieu"

ATS

15.3.2020

L'étau se resserre pour les organisateurs du Mondial de Zurich et Lausanne, qui doit débuter le 8 mai. «Les signaux indiquant que le tournoi n'aura pas lieu s'intensifient. Mais il est encore trop tôt pour une annulation définitive», lâche le président de la Fédération internationale (IIHF), le Fribourgeois René Fasel, dans une interview accordée à Keystone-ATS.

René Fasel quittera son poste à la tête de l'IIHF en septembre prochain.
René Fasel quittera son poste à la tête de l'IIHF en septembre prochain.
Keystone

Monsieur Fasel, comment allez-vous?

«Compte tenu des circonstances, je vais bien, merci. Nous vivons une période mouvementée, avec des développements difficilement prévisibles et des mauvaises nouvelles qui tombent quotidiennement. Nous avons déjà dû annuler six tournois prévus en avril. Au total, nous avons déjà dû en annuler 16 cette année. Ne restent plus que le championnat du monde A de Zurich et Lausanne ainsi que les tournois de Division 1 en Slovénie et en Pologne. Pour l'instant.»

La saison a été interrompue en Suisse et dans de nombreux autres pays européens. La NHL est à l'arrêt pour au moins deux semaines. Quand allez-vous décider d'annuler le Mondial en Suisse?

«La décision ne nous appartient pas. Elle est du ressort de la Confédération et des Cantons. De notre côté, nous continuons à travailler de telle sorte que le tournoi puisse commencer le 8 mai. L'espoir est le dernier à mourir. Nous sommes à l'écoute des experts, mais les opinions divergent. Certains prévoient le pic de la pandémie en Europe pour la fin avril, d'autres évoquent le mois de mai. J'ai même déjà entendu que le pire viendrait cet automne. En tant que dentiste et médecin, je juge peut-être la situation avec un peu plus de sensibilité. Mais même moi n'ai aucune réponse. Je suppose que nous en saurons plus concernant le Mondial dans deux semaines au plus tard.»

Mais il n'est déjà plus réaliste de maintenir ce championnat du monde. Il n'est par exemple pas concevable que l'Italie dispute ce tournoi...

«...vous avez raison. Les patinoires sont fermées en Italie, comme au Danemark et en Norvège. Le championnat a été stoppé en Allemagne, en Autriche et en Suisse. Dans ces circonstances, il sera très difficile pour les équipes nationales de se préparer. Je vais être clair: notre bateau vogue sur une mer tempétueuse. Il s'agit maintenant de rester calme et d'analyser la situation de manière réaliste. Nous devons penser à tout le monde: aux fans qui ont déjà acheté des billets et réservé des hôtels, aux joueurs, aux Fédérations, aux équipes. Les signaux indiquant que le tournoi n'aura pas lieu s'intensifient. Mais il est encore trop tôt pour une annulation définitive.»

Plus de 300'000 billets ont déjà été vendus. Les acheteurs seraient-ils remboursés en cas d'annulation?

«A 100%. Si le Mondial est annulé, notre priorité sera de limiter les dégâts à tous les niveaux. Notre objectif est de réduire les effets autant que possible que ce soit chez les fans, les sponsors ou les organisateurs locaux.»

Etes-vous assurés contre ce genre de dommage?

«Oui. Nous sommes assurés contre la guerre, le terrorisme et les catastrophes naturelles. Après avoir évalué les risques en 2012, nous avions conclu une assurance pour la période 2013 à 2022. La prime s'élève à 260'000 francs par an. En outre, nous avons pu établir des réserves d'environ 25 millions de francs au cours des dernières années. Ce qui représente à peu près l'équivalent des bénéfices d'un championnat du monde. Je peux donc dire que nous avons une certaine sécurité sur le plan économique.»

Mais le manque à gagner sera également grand pour Swiss Ice Hockey et les villes organisatrices...

«Malheureusement, c'est vrai. En général, l'organisateur local a un bénéfice garanti de 1,5 million de francs. Le secteur privé et l'industrie hôtelière seraient probablement encore plus touchés. Au total, la valeur ajoutée d'un tel tournoi est d'environ 100 millions de francs.»

A-t-on sous-estimé l'impact potentiel du coronavirus?

«Certainement pas à l'IIHF. Nous avons décidé d'annuler des tournois dès que nous avons découvert des cas positifs chez des joueurs en Asie et en Afrique du Sud. Nous avions d'ailleurs été critiqués pour cela au début. N'oublions pas que les organisateurs travaillent dur pendant très longtemps et que la déception est toujours énorme après une annulation. Mais avec le recul, on peut dire que nous avons fait tout juste. Notre commission médicale a évalué la situation de manière très précise et correcte, dès le début.»

Le championnat du monde 2021 pourrait-il avoir lieu en Suisse?

«Nous devrions en discuter le cas échéant. Mais les cinq éditions suivantes ont été attribuées: en 2021 à Minsk et Riga, en 2022 à Tampere et Helsinki, en 2023 à St-Pétersbourg, en 2024 à Prague et Ostrava, en 2025 à la Suède et au Danemark. Les intérêts commerciaux et stratégiques sont trop grands dans un championnat du monde du groupe A pour qu'un report soit simple à décider. Ce serait envisageable dans les divisions inférieures. En l'état, le Mondial 2021 aura lieu au Bélarus et en Lettonie.»

L'année 2020 s'annonçait grandiose sur le plan sportif, avec également un championnat d'Europe de football et des Jeux olympiques. Ces manifestations seront-elles annulées selon vous?

«J'ai constaté au cours des dernières semaines que la situation évoluait très rapidement. Cela n'a aucun sens de se projeter aussi loin. Nous devons réévaluer chaque jour la situation. Personne ne sait où nous en serons en juin. Personne ne connaît vraiment ce virus.»

Vous céderez votre poste de président en septembre. Mais vous ne pouvez pas vous en aller sur un Mondial annulé...

«(rires) Si, si. Mon successeur doit être désigné en septembre. Je suis fier de pouvoir lui transmettre les rênes d'une Fédération en bonne santé financière. Mais je ne partirai pas tant que la tempête ne sera pas passée. Un capitaine ne doit pas abandonner son navire dans cette situation.»

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