Pierre angulaire du jeu helvétique, Roman Josi est la véritable star de cette équipe de Suisse. A bientôt 29 ans, le capitaine des Nashville Predators s'impose dans le vestiaire par ses actes.
Roman Josi est un immense fan de tennis et plus précisément de Roger Federer. Peut-être le Bernois a-t-il, sans le vouloir, hérité de certains traits de caractère de l'homme aux 20 titres du Grand Chelem? Charismatique et discret, le défenseur ne joue pas les vedettes, malgré un physique de mannequin. Toujours très poli, il incarne presque le Suisse parfait que l'on se représente. Même lorsqu'on le chatouille en lui demandant si les neuf dernières années aux Etats-Unis l'ont fait devenir yankee, le numéro 90 coupe: «Non non, je me sens toujours plus suisse qu'américain.» Le tout dans un sourire pour rassurer tous les éventuels sceptiques.
Roman Josi dispute son huitième Championnat du monde. Dix ans après sa première expérience. C'était chez lui, à Berne, en 2009. On a l'impression que l'homme fait «partie des meubles» en équipe de Suisse alors qu'il évolue en NHL depuis 2011 et que le calendrier nord-américain ne se soucie pas de l'agenda de l'IIHF. Chaque fois qu'il le peut, le Bernois arrive quand on l'appelle. «J'aime jouer pour mon pays, c'est normal, appuie-t-il. Si je suis disponible et que je ne suis pas blessé, je viens, parce que c'est un honneur de porter ce maillot. Et c'est l'occasion de revoir des gens que j'apprécie. On vit des expériences incroyables, notamment ces deux médailles d'argent.»
L'échec de Copenhague en mémoire
A Stockholm et à Copenhague, Roman Josi a montré le chemin à suivre. Sa science du jeu a simplifié la vie de tout le groupe. Si le revers de 2013 est oublié, celui de 2018 demeure très présent dans son esprit: «En 2013 je dirais qu'on était déçu, mais que dans un sens c'était quand même une victoire d'être parvenu jusqu'en finale en remportant tous nos matches. On était fier de ce qu'on avait fait. Le groupe avait su créer un superbe état d'esprit tout au long de la quinzaine. L'année dernière, on était si proche que c'est difficile à avaler. Encore aujourd'hui je ne peux pas effacer ce souvenir.»
Point commun entre les deux épopées argentées, la présence de Nino Niederreiter, autre figure tutélaire de cette Suisse qui regarde désormais les grandes nations dans les yeux. Coup de chance, le Grison a débarqué en Slovaquie lundi et il sera là mardi contre les Tchèques, ainsi que pour le quart de finale de jeudi. Le Bernois se réjouit de pouvoir compter sur un apport aussi précieux: «Tu vas toujours trouver un moyen d'utiliser un joueur comme Nino. Franchement il est incroyable. Devant le filet il met une pression dingue, il va vraiment pouvoir nous aider.»
Mark Streit le mentor
On le sait, la NHL a métamorphosé le hockey suisse. La récurrence des parties à haute intensité a transformé les meilleurs éléments helvétiques. Pour Roman Josi, c'est là qu'il faut chercher la progression de la sélection nationale: «On a plus de gars qui jouent en NHL et les jeunes ont un état d'esprit différent. Tout cela fait que la confiance augmente et que dans une compétition comme le Championnat du monde, tu sais maintenant que tu peux battre tout le monde. Et surtout je pense que Mark Streit a fait évoluer les mentalités en Suisse. Les gens ont vu que c'était possible.»
Mark Streit, le pionnier. Ou presque. Celui qui a dit au revoir au cocon suisse pour aller tenter sa chance en Amérique du Nord et s'y imposer. Un mentor pour Josi et une saine émulation pour toute la nouvelle génération. D'ailleurs aujourd'hui, c'est lui qui reproduit ce schéma avec un garçon comme Janis Moser par exemple. «Plus tu engranges de l'expérience, plus tu sais que tu peux être un exemple pour les jeunes, raconte-t-il avec humilité. Je me souviens en 2009 comme j'observais Streit et je copiais certaines choses qu'il faisait. Je tente de faire pareil avec les jeunes et je n'hésite pas à parler avec eux s'ils ont des questions.»
Un prochain contrat mammouth
Fort de ses racines helvétiques, Roman Josi a malgré tout embrassé le style de vie d'un véritable habitant du Tennessee. Bientôt marié à une Américaine (le 20 juillet), le Bernois écoute de la country une fois qu'il enclenche son barbecue. Au bénéfice d'une année de contrat, il risque bien de faire sauter la banque à l'occasion de son prochain deal. A Nashville de préférence. «J'espère resigner, avoue-t-il. C'est clair que j'aimerais rester à Nashville. J'y ai joué toute ma carrière en NHL, je me suis fait plein d'amis, même en dehors du hockey. Je n'y ai pas encore trop pensé. On verra ça à partir de la saison suivante.»
Ce qui est sûr, c'est que le défenseur fait partie des meilleures «affaires» de NHL avec son précédent contrat signé en 2013 pour 28 millions de dollars sur sept ans. Un bail au rabais pour de nombreux observateurs a posteriori. Josi s'en défend: «On est toujours plus malin après. A l'époque où j'ai signé, c'était un super contrat pour moi. J'avais à peine une centaine de matches en NHL et ils m'ont proposé un bail de sept ans. Je ne me suis pas intéressé aux gens qui ont dit que j'aurais pu faire davantage d'argent. Si je devais le refaire, je le referais.»