De retour après plus d'un an et demi de galères, Camille Rast entend bien se battre avec les meilleures cet hiver. La Valaisanne affiche en tous les cas une belle confiance à Zermatt pendant la préparation.
Le sport et le ski alpin en particulier regorgent d'histoires cruelles et de destins brisés. Comme beaucoup d'autres avant elle, Camille Rast en a fait la douloureuse expérience. Débarquée telle une fusée sur le circuit de Coupe du monde à 17 ans, la Vétrozaine avait scotché tout le monde en prenant la 9e place du géant de Plan de Corones en janvier 2017 pour sa cinquième course sur le Cirque blanc.
Puis une mononucléose a tout déréglé. Vidée de son énergie, plongée dans l'incompréhension face à cette maladie insidieuse, Camille Rast a lutté contre un ennemi invisible. «La mono, c'était un signal d'alerte de mon corps pour me dire de calmer le jeu, image la Valaisanne. Parce que je courais beaucoup à cette époque entre les compétitions juniors, la Coupe d'Europe et la Coupe du monde.»
Après la mono, le genou
Et alors que l'adepte de VTT retrouvait la confiance et les points en Coupe du monde en mars 2019 à Spindleruv Mlyn avec un 23e rang en géant, la poisse s'en est à nouveau mêlée. Médaillée d'argent au géant des Mondiaux juniors, puis titrée en géant aux championnats de Suisse devant Wendy Holdener (!), la Valaisanne se déchire le ligament croisé antérieur et le ligament collatéral tibial du genou droit lors du slalom de ces mêmes championnats de Suisse.
«J'avais de bonnes sensations, se remémore Camille Rast. C'était ma dernière course de la saison, après je devais finir ma matu. Et voilà que ça lâche. On doit repartir de zéro. Même moins que zéro. Et souvent une blessure en mars signifie qu'on ne va pas avoir de saison l'année d'après. Et pour ajouter encore un obstacle, je reviens et on a le COVID qui vient tout chambouler.»
A 21 ans, Camille Rast a dû apprendre la patience et l'écoute de son corps. «Lors de ce fameux slalom où je me blesse, j'ai presque eu un petit excès de confiance. Le feeling était super bon et j'étais super contente de mon titre la veille. Je finis en plus 6e en slalom aux finales de Coupe d'Europe. J'en ai peut-être trop voulu. On dit souvent qu'une blessure arrive quand elle doit arriver. J'ai dû l'accepter. Mais j'avoue que la blessure au genou a été plus facile à gérer que la mononucléose parce qu'on a une échelle de ce que l'on peut faire. Une mono, c'est au jour le jour, on ne peut rien planifier.»
Une nécessaire rééducation
Alors la Valaisanne a rééduqué son genou. Elle l'a fait avec Florian Lorimier, l'ancien préparateur physique de Dicier Cuche, à Neuchâtel. «Cela fait une année que je travaille avec Florian, raconte-t-elle. Il a su me transmettre cette motivation pour repousser mes limites. Je le remercie de m'avoir fait souffrir autant d'heures. Je me sens physiquement en forme et j'espère revenir le plus tôt possible.»
Trois ans que Camille Rast n'avait plus skié l'été sur glacier. Mais l'envie et le plaisir demeurent immaculés. La Valaisanne a pris son temps. «J'aurais pu me dépêcher de revenir l'année passée, explique-t-elle. Seulement j'ai préféré patienter. Je pense que la mono m'a appris à être patiente. Je ne voulais pas prendre le risque de tout précipiter pour me reblesser droit derrière. J'ai pris le temps de faire une rééducation complète et correcte, ce qui fait que je n'ai eu aucune appréhension lorsque je suis remontée sur les skis à Noël.»
Gérer la peur d'échouer
Alors qu'elle avait planifié une vingtaine de jours de ski à Zinal, la pandémie de COVID-19 a rebrassé les cartes. Il a fallu s'adapter. Il manquera peut-être quelques kilomètres de course à Sölden, mais le moral tutoie les sommets. «Je n'ai mal nulle part, je n'ai peur de rien et je suis super contente de pouvoir m'entraîner normalement, confie-t-elle dans un large sourire. Je suis dans le coup aux entraînements, les chronos sont bons. Le travail fait en salle de force paie. Je dois juste transposer cette forme physique sur les skis.»
Habituellement prévu fin octobre sur le glacier de Sölden, le début de la Coupe du monde a été avancé d'une semaine. Cela veut dire dans un peu plus de deux mois. De quoi titiller la jeune athlète. «Je n'ai pas mis de dossard depuis plusieurs centaines de jours, conclut Camille Rast. Cela me fera un petit coup d'adrénaline et j'espère pouvoir gérer cette envie de bien faire et la peur d'échouer.»