«C'est évident, il est au-dessus de moi» Même la légende Eddy Merckx s'incline devant Tadej Pogacar

ATS

30.9.2024 - 17:00

«Ce qu'il a réalisé est inimaginable» : Tadej Pogacar, adoubé par Eddy Merckx en personne, s'invite de plus en plus dans la discussion sur le plus grand coureur cycliste de tous les temps. A seulement 26 ans.

Keystone-SDA

L'hommage vient directement du maître lui-même et ses mots témoignent de la dimension prise par le Slovène, vainqueur de son premier titre mondial dimanche à Zurich au bout d'un raid impensable de 100 kilomètres.

«C'est évident qu'il est maintenant au-dessus de moi. Je le pensais déjà un peu au fond de moi-même quand j'avais vu ce qu'il avait fait sur le dernier Tour de France, mais ce soir il n'y a plus de doute», a lancé Eddy Merckx dans les colonnes du journal L'Equipe.

«Moi, je n'attaquais pas à 100 kilomètres de l'arrivée aux championnats du monde», a insisté la légende belge de 79 ans, en louant «un immense champion», «hors norme», qui a réalisé quelque chose «d'inimaginable».

La triple couronne

Jusque-là, Merckx, unanimement considéré comme le plus grand coureur de tous les temps, avait seulement désigné Pogacar comme son héritier. Cette fois, il va plus loin, même si, en termes de palmarès, celui qu'on appelait «le cannibale» garde un avantage conséquent (5 victoires dans le Tour de France à 3, 19 Monuments à 6, 3 championnats du monde à 1).

Au lendemain d'un chef d'œuvre où tous ses rivaux ont pris le roi pour «un fou», le débat autour du GOAT ("The Greatest of All Time"), est rouvert.

Cela fait des années que le phénomène slovène, si précoce, alimente la discussion qui, comme dans d'autres sports, est sans doute impossible à trancher tant les époques sont difficilement comparables. Elle a ressurgi cet été lorsqu'il est devenu le premier depuis Marco Pantani en 1998 à remporter la même année le Tour d'Italie et le Tour de France.

A Zurich, il a couronné sa «saison parfaite» pour un triplé Giro-Tour-Mondiaux réalisé seulement par Merckx, en 1974, et Stephen Roche, en 1987.

«D'un autre monde»

Il fait même mieux en rajoutant la conquête d'un Monument en 2024, Liège-Bastogne-Liège. Et il peut encore en gagner un deuxième, le Tour de Lombardie, où il reste sur trois succès de rang et qu'il disputera le 12 octobre avec le maillot arc-en-ciel sur les épaules.

«C'est juste exceptionnel, d'un autre monde», souligne Stephen Roche. «Il gagne des grands Tours, des courses d'un jour, des contre-la-montre, des étapes de montagne et même des sprints. Avec lui et Merckx, je suis en bonne compagnie».

Jusqu'où ira-t-il ? Les trois prochains championnats du monde, à Kigali, Montréal et Sallanches, en France, présentent des parcours durs et parfaits pour lui.

Parmi les grandes courses, en dehors des JO, il ne lui en reste plus que trois à gagner: le Tour d'Espagne, qui paraît largement à sa portée, Milan-Sanremo, où il n'est pas passé loin déjà, et Paris-Roubaix, un défi qu'il se réserve pour plus tard.

Ses rivaux sont unanimes

La grandeur d'un champion ne se lit pas seulement à son palmarès, mais aussi à l'empreinte qu'il laisse sur son sport. A ce niveau-là aussi, le Slovène avance des arguments, par son panache, ses prises de risques, son côté joueur et sa fantaisie.

«Parfois j'aimerais savoir ce qu'il se passe dans sa tête. Partir si tôt, c'était de la folie. Seul en plus! Je n'en revenais pas», glissait dimanche soir le vétéran allemand Simon Geschke.

Au dernier Tour de France, la large domination de Pogacar avait fait ressurgir des questions sur le dopage, sans aucune preuve pour alimenter d'éventuels soupçons, et «Pogi» a assuré être propre, comme tant d'autres grands champions avant lui qui ont fini rattrapés par la patrouille, durant ou après leur carrière.

«On est dans l'ère Pogacar»

L'Australien Michael Matthews, son grand ami dans le peloton et partenaire d'entraînement à Monaco où ils résident, préfère retenir que Pogacar lui a «redonné l'amour du cyclisme» tellement «il s'amuse sur un vélo».

S'ils sont parfois découragés, les collègues de Pogacar se disent aussi souvent admiratifs. «Ce que Tadej a fait n'est pas possible normalement. Mais cette année, il n'est pas normal», soulignait Remco Evenepoel à l'arrivée.

Et selon Mathieu van der Poel, ce n'est pas fini. «On est dans l'ère Pogacar», dit le Néerlandais. «Je n'ai aucune idée combien de temps elle va durer. Mais on a l'impression que ce n'est que le début».