«Préparer pour le cas où...» Une première pour un avenir en biathlon sans neige et sur roues ?

Nicolas Larchevêque

18.10.2025

Face au changement climatique et des hivers de plus en plus doux, le biathlon explore la piste d'épreuves sur ski-roues, avec un festival ce week-end au parc olympique de Munich et une première compétition officielle organisée par la Fédération internationale.

Agence France-Presse

A Munich en cette seconde quinzaine d'octobre, les pelouses du parc olympique sont vertes et depuis quelques jours, les feuilles aux arbres affichent toute la gamme automnale du jaune à l'orange. En revanche, pas un seul centimètre carré de blanc, la neige fera peut-être son apparition dans quelques semaines, au coeur de l'hiver.

Et pourtant, c'est bien une compétition de biathlon, réunissant les meilleurs de la planète, qui va se dérouler autour du lac, en contre-bas de la colline qui surplombe l'ancien stade du Bayern, et le long de l'enceinte construite pour les Jeux olympiques de 1972.

Les techniciens préparant habituellement les skis seront à l'arrêt, puisque la glisse se fera à l'aide de roulettes placées sous les skis, et non sur la neige comme ce sera le cas dans six semaines à Östersund en Suède pour l'ouverture de la Coupe du monde.

Les principes restent toutefois quasiment les mêmes: une boucle (1,8 km), un pas de tir (posé sur le lac), cinq cibles à blanchir, et un anneau de pénalité (60 m). Et plus de 20’000 spectateurs espérés dimanche.

En départ groupé, format plus télégénique, la compétition se déroule en deux temps. D'abord quatre séries de 15 biathlètes avec trois boucles et deux passages au tir, puis une finale réunissant les trois premiers de chaque série et les trois meilleurs temps, avec cinq boucles et quatre passages au tir.

«Préparer pour le cas où...»

«Nous voyons toujours le biathlon comme un sport d'hiver, l'hiver reste notre ‘focus’. Mais nous souhaitons aussi nous préparer pour le cas où il n'y aurait peut-être plus de neige. On a avec le ski-roues une alternative», explique Daniel Böhm, ancien champion olympique avec le relais allemand en 2014 et désormais directeur sportif de l'IBU.

Ces formats de course existent depuis longtemps pour la préparation estivale, mais la compétition munichoise est la première organisée par la Fédération internationale (IBU), qui veut en faire son événement de début de saison.

Si le format et le timing sont loin de faire l'unanimité, notamment pour une saison olympique, l'événement a le mérite de se pencher sur le futur de la discipline, alors que «les hivers ont tendance à devenir plus courts, ou bien à se déplacer vers d'autres régions», constate Böhm, avec un «coeur d'hiver de la mi-décembre à la fin février».

De là à offrir une alternative crédible à l'avenir pour la Coupe du monde ? «On n'est pas encore arrivé au point de devoir faire cela», estime Böhm, soulignant une limite maximale atteinte dans le calendrier. «Nous voulons être préparés au cas où nous devrions le faire. On a cette alternative et on peut construire pas à pas là-dessus.»

«Ce serait foncer tête baissée dans un mur»

«On a la chance d'avoir un sport télégénique qui aujourd'hui a trouvé son public. Il garderait tout son attrait même si on devait passer en tant que sport d'été sur des ski-roues. Le sport reste le même, les règles restent les mêmes, il y aurait autant de suspense donc on a cette chance», estime Emilien Jacquelin, l'un des leaders de l'équipe de France.

Son jeune coéquipier Eric Perrot, champion du monde en titre de l'individuel (20 km), est partagé entre «passion» et «raison». «Ma passion, c'est la glisse et le ski, c'est le contact de la neige. Après, il y a la raison. Aujourd'hui, il faut qu'on s'adapte à notre environnement, sinon, ce serait foncer tête baissée dans un mur.»

«Il n'y a pas beaucoup de sports d'hiver qui peuvent se recycler en sport d'été, je pense que le biathlon en fait partie», estime pour sa part le patron du biathlon français, Stéphane Bouthiaux, espérant toutefois que cela se produise «le plus tard possible, ou jamais».