Cortina Le retour de Lara la lionne

jfd, ats

8.2.2021 - 10:14

Irrésistible en Super-G, à nouveau compétitive en géant, Lara Gut-Behrami se profile comme l'une des grandes favorites des Mondiaux de Cortina. La Tessinoise s'alignera dans quatre disciplines.

Lara Gut-Behrami est clairement de retour.
Lara Gut-Behrami est clairement de retour.
Keystone

Si Lara Gut-Behrami était une athlète américaine, elle aurait eu droit à une bande-annonce hollywoodienne avant ces Mondiaux. Un montage de ses doutes, de sa blessure pendant les Mondiaux de St-Moritz en 2017, de ses larmes aux JO de Pyeongchang et de ses récents exploits sur une bande-son signée Hans Zimmer pour terminer sur un «SHE.IS.BACK» saccadé.

Parce que oui, la Tessinoise est clairement de retour. Sur le trône? Il est sans doute trop tôt pour l'affirmer, mais au plus haut niveau, cela ne fait pas l'ombre d'une discussion. Cette Lara 2021 ressemble à la Lara de 2016, façonnée à l'expérience et modelée par la vie.

«Je ne crois pas qu'il y a eu un déclic, lance la Tessinoise. Ces dernières années, je peinais à trouver cette fluidité et les détails qui manquaient. Mais le travail quotidien a fini par payer et j'ai réussi à mettre les pièces du puzzle ensemble et à retrouver cet enchaînement de manches à très haut niveau.»

Droite dans ses bottes

Quatre succès consécutifs en Super-G et 30 victoires en Coupe du monde, de retour sur le podium en géant, toujours rapide en descente, «LGB» retrouve son appétit de lionne tout en restant elle-même. Là où une Michelle Gisin se montre avenante et sans doute politiquement bien plus correcte, Lara Gut-Behrami laisse échapper ce qu’elle a sur le cœur. Et tant pis si cela ne plaît pas.

Impossible à faire entrer dans un moule, la Tessinoise n’hésite en revanche jamais à rentrer dans le cadre. Ennuyée par une question au sortir d’une performance moyenne, elle préférera un style lapidaire à une réponse bateau. Heureuse, la Tessinoise se fendra de réponses détaillées et profondes, notamment concernant son entraîneur Alejo Hervas qui la suit depuis maintenant deux ans.



«Alejo, c'est la pièce du puzzle qui me permet d'avancer, d'optimiser, avoue-t-elle. J'ai retrouvé beaucoup de marge d'amélioration. Je ne pensais pas arriver à 30 ans et me sentir aussi bien physiquement. J'apprends de nouvelles techniques d'haltérophilie et je suis toujours aussi curieuse de trouver de nouvelles choses pour repousser mes limites et relever de nouveaux défis. J'ai du plaisir à découvrir de nouvelles choses. Avec Alejo et mon père, on échange beaucoup, c'est positif et ça me permet d'évoluer.»

L'Espagnol et la Tessinoise ont fait en sorte de reconstruire le ski de la Luganaise étape par étape. Sans en brûler aucune. Et cela se ressent en géant où l'abus de drift semble appartenir au passé. «Le géant est la discipline qui me permet d'être régulière dans les autres disciplines, argumente la skieuse de Comano. Quand je suis à un très bon niveau en géant, tout va mieux», lâche-t-elle.

«Peu importe la neige, le tracé ou les conditions, enchaîne-t-elle. Cela me donne une base très solide pour les autres disciplines. Je comprends que l'on aimerait que je donne une raison particulière pour expliquer ça, mais il n'y a pas de potion magique. Chaque jour, tu dois avoir de petites victoires, une courbe réussie ici, un bon enchaînement là. Et c'est en les alignant que tout devient plus simple.»

Elle skie pour elle

Lara Gut-Behrami a toujours tracé son chemin sans concession ou presque. A ses débuts, elle se posait en état dans l’état avec sa structure privée et son coach Mauro Pini. A l’heure des conférences de presse, il y en avait une pour l’équipe de Suisse féminine et une pour la Tessinoise qui avait sa propre attachée de presse. Aujourd'hui encore, Lara Gut-Behrami ne skie que pour elle et il n’y a aucun mal à ça dans un sport individuel.

«Je comprends qu'on parle de médaille d'or, accepte la dauphine de Petra Vlhova au général de la Coupe du monde. On ne va pas aux Mondiaux pour simplement bien skier, mais j'ai appris par le passé que tu n'as rien gagné avant les courses. Pour l'instant, j'ai juste gagné le droit d'être au départ dans quatre disciplines en sachant que je n'ai rien à perdre, rien à défendre et rien à craindre.»

Impétueuse, tumultueuse et tueuse sur la piste, elle ne craint pas de prendre la presse à rebrousse poils, quitte à parfois vexer les journalistes. A Crans-Montana lors de son triomphe en Super-G, l'un d'eux a qualifié sa manche de démonstration. Plutôt que de confirmer, la Tessinoise s’est inspirée des contrepieds de son mari footballeur pour désarçonner son auditoire avec un «Non» affirmé, suivi d’une solide argumentation. Non pas par bravade, mais par perfectionnisme.

Sur l’échelle du talent, Lara Gut-Behrami ne se situe pas très loin d’une Martina Hingis. Sa première course de Coupe du monde en descente à St-Moritz en 2008, alors qu’elle n’avait que 16 ans, avait marqué les esprits. Partie avec le dossard 32, la toute jeune Lara avait terminé 3e en chutant à une vingtaine de mètres de l’arrivée pour couper la cellule sur le dos avec un seul ski.

Sereine et mentalement au top

A bientôt 30 ans, Lara Gut-Behrami aborde ces Mondiaux avec sérénité. «Janvier fut un mois long et compliqué avec passablement de voyages, pas mal de sollicitations et je pense que c'est ressorti à Crans-Montana. J'avais des tensions qui se sont manifestées et sont devenues insupportables. Là mentalement je me sens bien», glisse-t-elle.

«Et les Mondiaux qui s'annoncent seront particuliers. Pas de public ni d'événement tout autour. Les journées de course vont ressembler à celles que l'on vit en Coupe du monde, alors qu'aux Mondiaux les sollicitations sont d'habitude bien plus importantes, surtout lorsque tu fais une médaille», explique-t-elle.

Celle qui en 2018 a décidé de fermer son compte Instagram fort de plus de 300'000 followers et de tirer un trait sur sa vie sur les réseaux sociaux pourrait bien profiter de la «bulle» de Cortina pour sortir le champagne et fêter un premier titre mondial.



Mais en Super-G mardi, Lara Gut-Behrami devra faire attention à ses rivales Mikaela Shiffrin, tenante du titre, Federica Brignone, un peu en retrait cette saison mais prête à rugir en Italie, la championne olympique Ester Ledecka et Petra Vlhova, brillante 2e à Garmisch.

Il ne faut cependant pas oublier non Corinne Suter, bronzée à Are en 2019 dans la discipline, et qui n'a plus quitté le haut de tableau depuis, parvenant même à s'offrir le globe de la descente et du Super-G la saison passée. Et qui sait, peut-être que Michelle Gisin retrouvera son ski en vitesse pour se mêler à la lutte pour les médailles...

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