Après Carlos Alcaraz dès ses 19 ans, Jannik Sinner à l'Open d'Australie: les étoiles montantes du tennis mondial grignotent le territoire longtemps resté exclusivité du «Big 3». Vont-elles bientôt le croquer à pleines dents ?
La passation de pouvoir n'est pas encore tout à fait à l'ordre du jour. Mais elle semble se préciser. Au lendemain de l'Open d'Australie qui a fait entrer Sinner, à 22 ans, dans le club des vainqueurs en Grand Chelem, Novak Djokovic, même déboulonné en demi-finale par le jeune Italien, entame sa 410e semaine record sur le trône du tennis mondial.
Mais derrière, incontestablement, ça pousse de plus en plus fort. Le top 4, complété par Alcaraz, Daniil Medvedev (battu en finale dimanche) et Sinner, se tient en à peine plus de 1500 points (un titre majeur en rapporte 2000). Et d'un terrain à l'autre, les signes que la jeune garde s'affirme se multiplient.
Il y a d'abord eu Wimbledon à l'été 2023, quand Alcaraz, seulement six matches joués sur herbe avant l'année dernière, a détrôné Djokovic au bout d'une finale épique, sur une surface où on le pensait encore à l'abri des assauts du flamboyant Espagnol. Il y a eu aussi les deux victoires en dix jours (et trois matches) de Sinner face au Serbe aux 24 trophées majeurs en novembre, au Masters (en phase de poules) et en Coupe Davis.
«Pas nécessairement le début de la fin»
Il y a maintenant Melbourne, où le Tyrolien aux boucles rousses, avant d'être couronné, a réussi ce que personne, jamais, n'avait réussi: stopper Djokovic sur son court fétiche une fois qu'il a atteint le dernier carré. Si bien que pour la première fois depuis près de vingt ans (2005 précisément), ni Roger Federer (retraité), ni Rafael Nadal, qui soumet son corps déglingué à une ultime tentative de retour à 37 ans, ni Djokovic, n'étaient au rendez-vous de la finale de l'Open d'Australie. Forcément, ce premier match perdu par «Djoko» depuis six ans – après 33 victoires de suite – sur son terrain de jeu préféré, quasi sa chasse gardée, interroge. La fin de règne guette-t-elle le Serbe de 36 ans?
«Je n'ai pas joué à la hauteur de mes standards ici mais ça ne veut pas nécessairement dire que c'est le début de la fin, répond Djokovic. Ce n'est que le début de la saison. J'ai toujours des ambitions élevées pour les autres Grand Chelem et les JO» en particulier. Cette ville est très spéciale pour moi. J'espère simplement que j'aurai la chance d'y revenir, de jouer au moins une autre fois.»
Invité à se comparer à Alcaraz notamment, «ce qu'on a en commun, c'est qu'on croit en nous-mêmes, identifie Sinner. En tennis c'est déjà beaucoup.»
«Se faire un nom»
«Ils ont une belle personnalité. C'est important qu'ils fassent ce que Jannik a été capable de faire: montrer que la nouvelle génération se bat jusqu'au bout du bout», estime son co-entraîneur Darren Cahill. «Ils veulent vraiment se faire un nom, et c'est ce que Jannik a fait. Carlos l'a déjà fait à plusieurs reprises, la finale qu'il a jouée à Wimbledon, c'était une performance exceptionnelle», poursuit-il.
Alcaraz-Sinner, c'est aussi la promesse de duels spectaculaires, à l'image de leur quart de finale époustouflant de l'US Open 2022. «Carlos et Jannik se ressemblent dans l'étincelle qu'ils apportent au jeu, ils s'apprécient, ils ont une saine rivalité, raconte Cahill. Quand ils s'affrontent, il y a de l'électricité dans l'air. Je ne crois pas qu'un de leurs face-à-face ait été ennuyeux.»
«Carlos a montré la voie. C'est un régal de le regarder jouer. On aspire à être aussi bon que lui, et, un jour peut-être, meilleur», ambitionne Cahill. Sinner, «c'est un gamin spécial», dit-il. «Quand vous avez sa frappe de balle, sa volonté de progresser, sa qualité de déplacement, vous allez réussir. Notre travail de coach, c'est de l'amener là où il veut le plus vite possible, pour qu'il puisse avoir une longue fenêtre au sommet du jeu. Il absorbe tout, il tente des choses nouvelles sur le court, il ne demande qu'à progresser. Je suis sûr que quand tout ça sera retombé, il ne se reposera pas sur ses lauriers.»
ATS