Techno Avec Microsoft Flight Simulator, un studio de Bordeaux fait le grand saut

AFP

14.8.2020 - 08:49

Dix-huit ans après sa création à Bordeaux par une bande de copains, Asobo fête sa majorité en livrant à Microsoft la dernière et très attendue mouture du jeu vidéo Flight Simulator, qui pourrait le consacrer comme un studio majeur.

Avec ce jeu vidéo historique, qui mobilise depuis 1982 une large communauté de passionnés, Asobo joue gros: que son +Flight Sim+ pour PC ravisse les fans de la franchise et ce sera l'assurance de voler dans des cieux cléments. Mais que leurs espoirs soient déçus et ce sera peut-être l'atterrissage forcé.

«Quand il y a une attente aussi importante, il ne faut pas décevoir», explique à l'AFP Laurent Michaud, économiste spécialisé dans l'univers des jeux vidéos. «La réputation d'Asobo est en jeu.»

Avec les jeux de ce type, «le couperet tombe vite», assure l'expert, citant l'exemple de «Battlefront» de l'éditeur américain Electronic Arts, qui reprend la Guerre des Etoiles: la «vindicte des joueurs» a été telle que la licence «s'est cassée».

Pour l'heure, tout sourit au studio bordelais, dont le nom veut dire «Amusons-nous» en japonais: il surfe depuis mars sur son triomphe aux tout premiers «Pégases», les «Césars» du jeu vidéo, grâce à «A Plague Tale», qui a séduit plus d'un million d'acheteurs et raflé six récompenses dont celle du meilleur jeu.

Sorti en mai 2019, ce titre permet d'incarner un frère et une sœur qui tentent de survivre, pourchassés par l'Inquisition, tandis qu'une épidémie de peste noire ravage un royaume médiéval infesté de rats.

Un univers aux antipodes de Flight Simulator -et des jeux Pixar (comme Ratatouille) avec lesquels Asobo a commencé à percer- mais qui prouve la versatilité du studio, à l'aise dans «des technicités» et des mondes très différents, analyse Laurent Michaud.

Si Asobo réussit son coup avec Flight Simulator, ce sera un tremplin vers des «jeux, des budgets, des équipes plus importants», dit-il. Et, pour Microsoft, un point marqué dans la «guerre des consoles» entre sa prochaine Xbox et la future PS5 de Sony, qui se mène sur le front du matériel comme sur celui des contenus, notamment des jeux exclusifs.

- «Culture garage» -

«On a travaillé dur pour faire le meilleur honneur possible à la franchise Flight Simulator», explique à l'AFP David Dedeine, cofondateur d'Asobo et directeur créatif sur le jeu, qui estime que cette collaboration avec Microsoft va «marquer un nouveau tournant dans l'histoire» du studio.

Une histoire qui a commencé en 2002 avec douze copains installés sur des tréteaux dans le salon d'un l'appartement bordelais. «On est issu de la +culture garage+», glisse David Dedeine.

«A l'époque, une livraison manquée et c'était +game over+ tout de suite», abonde Martial Bossard, autre cofondateur d'Asobo et ingénieur logiciel en chef sur Flight Simulator.

La différence entre ces premiers pas et le travail actuel avec Microsoft, «c'est comme apprendre à piloter sur un petit avion et à la fin être pilote d'Airbus», assure Martial Bossard, en filant la métaphore aéronautique: «Au début on a peu de systèmes, peu d'instruments. On peut voler à vue. S'il y a une rafale, on ajuste et ça va bien se passer. Là non: il y a 208 personnes à Asobo dont 120 sur +Flight Sim+...»

Les deux quadragénaires prennent des leçons de pilotage depuis quatre ans. «C'était indispensable», notamment pour introduire «quelque chose de sensitif dans le jeu», souligne Martial Bossard.

«Quelles sensations ressent un pilote? Qu’est-ce qu’il entend? Comment sa tête bouge? Comment l'avion réagit-il sous un nuage ou au-dessus de la mer? Dans les simulations par le passé, c’était un peu rigide tout ça», dit-il, se félicitant également que les technologies de Microsoft aient permis à Asobo de reproduire suffisamment fidèlement notre planète pour introduire le vol à vue.

Avec Flight Simulator, «monument de l'histoire vidéo-ludique», dixit David Dedeine, la pression est en tout cas montée d'un cran du côté de Bordeaux.

«On a eu tellement de témoignages (de fans) de partout, de tous les âges, y compris dans le monde de l'aviation où plein de gens voulaient nous aider à faire le meilleur +soft+ possible...«, confie-t-il. «Là, on touche à quelque chose qui va bien au-delà du produit.»

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