Techno La France dévoile son plan pour devenir un leader de l'intelligence artificielle

AFP

29.3.2018 - 11:33

Pour que la France "ne rate pas le train de l'intelligence artificielle" (IA), Emmanuel Macron présente jeudi un plan ambitieux pour développer cette nouvelle technologie en passe de révolutionner l'économie et la société, actuellement dominée par les États-Unis et la Chine.

Attirer les meilleurs chercheurs, créer un centre français de niveau international, développer une politique des données, faire émerger des champions français et engager une réflexion sur l'éthique et la régulation de ces innovations qui inquiètent: voici les grands axes que doit annoncer le chef de l’État, accompagnés d'une enveloppe financière conséquente.

Son programme s'inspire du rapport commandé en septembre au mathématicien et député (LREM) Cédric Villani, qui a piloté plus de 300 auditions auprès d'experts du monde entier.

Parmi les pistes envisagées figure la création d'un "cloud souverain européen" qui pourrait s'appuyer sur le groupe français OVH (fournisseur de cloud) et la création d'une agence publique sur le modèle de la DARPA américaine, qui fut à l'origine d'internet.

L'objectif est de propulser la France parmi les champions de ce domaine où elle dispose d'un savoir théorique indéniable et de cerveaux recherchés, mais manque encore de groupes leaders.

Coup d'envoi de cette initiative, plusieurs géants internationaux ont annoncé mercredi soir l'implantation en France de grands centres de recherche en intelligence artificielle.

Le coréen Samsung va installer à Paris son troisième plus grand centre de recherche, fort à terme de plus de cent chercheurs, et le japonais Fujitsu y ouvrira son premier centre de dimension européenne. DeepMind, société créatrice d'AlphaGo, ouvrira en France son premier centre de recherche européen et Google va parrainer une chaire IA à Polytechnique. D'autres grands groupes devraient faire des annonces dans la journée.

Des décisions liées à l’attractivité retrouvée de la France, qui profite aussi du Brexit et d'un "effet Trump", selon l’Élysée, qui avait organisé un sommet à Versailles, "Choose France", en janvier, pour convaincre des grands groupes d'investir en France.

C'est aussi dans cet esprit que le président a reçu à dîner mercredi à l’Élysée une quinzaine des sommités mondiales du secteur, dont le Français Yann Le Cun (chef de l'IA chez Facebook), la Japonaise Noriko Araï, qui a conçu un robot capable de réussir un examen d'entrée à l'université et le Britannique Demis Hassabis, fondateur de DeepMind. Il a également reçu le DG de Samsung Young Sohn.

Lors de ce dîner, a expliqué à l'AFP Marie-Paule Cani, qui animera la nouvelle chaire Google/Ecole Polytechnique, "une bonne partie" de la discussion a porté sur la meilleure manière d'accompagner les changements majeurs apportés par l'intelligence artificielle dans ses aspects éthiques, et comment rendre ces changements profitables à l'humanité".

- Craintes -

Jeudi s'est ouvert au Collège de France le colloque "Intelligence artificielle pour l'humanité" rassemblant les grands noms du secteur, qui sera clôturé par le chef de l’État.

Avant d'intervenir, Emmanuel Macron s'est rendu à l’Institut Curie pour découvrir les applications de l’IA dans le domaine de la santé, en particulier en cancérologie.

L'enjeu est aussi de faire revenir en France ces chercheurs français devenus des stars à l'étranger, comme Luc Julia, l'inventeur de Siri chez Apple passé chez Samsung, qui dirigera le futur centre de recherche parisien du groupe coréen.

Le président devrait également annoncer des mesures pour encourager l'utilisation de l’IA par les services publics et soutenir les projets de recherche et les start-up.

La stratégie française veut s'inscrire dans un cadre européen, pour que l'UE devienne un grand acteur mondial du secteur, explique l’Élysée.

L'intelligence artificielle, qui rend possibles des technologies comme la voiture autonome, les commandes vocales, la traduction automatique, la reconnaissance faciale, l'anticipation des comportements ou les robots capables de tâches encore inimaginables, suscite aussi de fortes craintes.

Beaucoup craignent des atteintes à la vie privée ou une destruction massive d'emplois que des machines intelligentes pourraient occuper. Seuls 44% des salariés sont prêts à travailler avec l'IA, selon un sondage paru mercredi.

La France a en tout cas beaucoup à faire pour rattraper le peloton de tête -- États-Unis, Chine, Grande-Bretagne, Canada et Israël.

Le rapport Villani met donc l'accent sur les efforts à faire pour garder en France les cerveaux, en recommandant un doublement des salaires des chercheurs en début de carrière et un environnement de travail favorable.

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