Le Sénat examine mardi et mercredi en première lecture le projet de taxe sur les géants du numérique, défendue par Bruno Le Maire
Le ministre de l'Economie Bruno Le Maire, le 15 mai 2019 à l'Elysée, à Paris
Recettes de la «taxe GAFA»
La taxe Gafa à l'épreuve du Sénat
Le Sénat examine mardi et mercredi en première lecture le projet de taxe sur les géants du numérique, défendue par Bruno Le Maire
Le ministre de l'Economie Bruno Le Maire, le 15 mai 2019 à l'Elysée, à Paris
Recettes de la «taxe GAFA»
Le Sénat examine mardi et mercredi en première lecture le projet de taxe sur les géants du numérique, défendue par Bruno Le Maire, qui suscite des interrogations au Palais du Luxembourg à majorité de droite.
La «taxe Gafa» (acronyme de Google, Amazon, Facebook et Apple), présentée par le ministre de l'Economie Bruno Le Maire comme étant à «l'honneur de la France» après l'échec d'une initiative européenne, a été adoptée en première lecture à l'Assemblée nationale.
Elle doit faire de la France un des pays pionniers en la matière, en dépit de l'opposition des Etats-Unis, mais «le gouvernement prend beaucoup de risques pour un affichage», estime le rapporteur général de la commission des Finances Albéric de Montgolfier (LR).
La taxe que la France souhaite instaurer s'inspire largement d'un projet européen qui n'a pas abouti en raison des réticences de l'Irlande, la Suède, le Danemark et la Finlande.
Pour le ministre, elle servira de «levier» dans les négociations internationales. Une solution unilatérale temporaire, donc, dans l'attente d'un aboutissement des travaux de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).
Concrètement, la taxe doit concerner les activités numériques qui «créent de la valeur grâce aux internautes français».
Elle vise les entreprises qui font un chiffre d'affaires sur leurs activités numériques de plus de 750 millions d'euros dans le monde et de plus de 25 millions d'euros en France. L'idée est de les imposer à hauteur de 3% du chiffre d'affaires réalisé en France sur la publicité ciblée en ligne, la vente de données à des fins publicitaires et la mise en relation des internautes par les plateformes.
Elle devrait s'appliquer à une trentaine de groupes comme Meetic, Amazon, Airbnb, Instagram ou encore la française Criteo, et rapporter 400 millions d'euros en 2019, puis 650 millions en 2020.
- Juridiquement «très risquée» -
Pour M. de Montgolfier, «tout paraît fort simple, mais tout est compliqué».
Certes, «politiquement, il n'y a pas lieu de s'opposer à des taxes s'appliquant aux entreprises qui paient peu d'impôt en France». Mais le rapporteur général pointe «beaucoup d'interrogations» et une initiative unilatérale «très risquée sur le plan juridique».
«Est-ce conforme au droit fiscal international ? Aux traités européens ?«, interroge-t-il? Et de mettre en garde contre le risque que la France soit un jour contrainte de rembourser les sommes perçues.
Le rapporteur s'interroge aussi sur l'assiette retenue, le chiffre d'affaires, plutôt que le bénéfice, et sur d'éventuels effets négatifs pour le développement d'entreprises françaises qui seraient rachetées par des plus grands groupes.
Pour Albéric de Montgolfier, «le bon niveau», pour une telle taxation, c'est l'OCDE. Mais si elle devait être mise en place unilatéralement par la France «faute de mieux», «il faudrait la sécuriser juridiquement», affirme-t-il. Une position partagée par le groupe centriste, Les Républicains ne s'étant pas encore prononcés officiellement.
L'Asic (Association des services internet communautaires) a salué dans un communiqué les modifications apportées en commission visant à «sécuriser un peu» le dispositif.
La commission a notamment réaffirmé le caractère «temporaire», de la taxe, prévoyant son extinction au 1er janvier 2022.
Devant les députés, M. Le Maire avait promis de ne pas relâcher ses efforts «jusqu'à ce que l'OCDE se mette d'accord», jugeant cela «possible dès 2020». La France retirera alors «naturellement sa taxe nationale», avait-il dit.
La taxe, dont l'instauration avait été annoncée par Emmanuel Macron en décembre, en pleine crise des «gilets jaunes», doit contribuer à financer les 10 milliards d'euros de mesures d'urgence économiques et sociales.
Même objectif pour le second volet du projet de loi qui infléchit la trajectoire de baisse de l'impôt sur les sociétés pour 2019.
Un point que la majorité sénatoriale risque d'avoir du mal à avaler.
«On revient sur un engagement du gouvernement», souligne M. de Montgolfier. Le sénateur centriste Vincent Delahaye a déposé un amendement pour supprimer cet article.
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