Cybercriminalité Les cyberguerriers alertent sur le travail à domicile

AFP

16.10.2020 - 00:00

Les cyberguerriers opérant à la limite orientale de l'Otan avertissent que le nombre croissant de gens dans le monde travaillant à domicile en raison de la pandémie augmente la vulnérabilité aux cyberattaques.

L'Estonie héberge deux cybercellules de l'Alliance atlantique, mises en place à la suite d'une série de cyberattaques en provenance de la Russie voisine, il y a plus de dix ans.

«Le recours à grande échelle au travail à distance a attiré des espions, des voleurs et des voyous», a déclaré à l'AFP Jaak Tarien, directeur du Centre d'excellence de cyberdéfense coopérative de l'OTAN (CCDCOE).

La quantité accrue d'informations circulant entre les serveurs institutionnels et les réseaux domestiques crée de nouveaux défis pour les employeurs.

«S'attaquer à ces nouveaux défis est compliqué et nécessite beaucoup de ressources ainsi qu'une approche différente», a souligné M. Tarien.

«Nous ne faisons probablement qu'effleurer la surface dans notre appréhension de l'ampleur des activités malveillantes qui se déroulent dans le cyberespace très fréquenté de l'ère du Covid», a-t-il ajouté.

Une enquête menée à l'échelle européenne en septembre a révélé qu'environ un tiers des employés travaillaient à domicile.

Boom des cours en ligne

Ces préoccupations trouvent leur écho au sein du centre Cyber Range de l'Otan, minutieusement gardé et protégé avec des barbelés à Tallinn, administré par les forces de défense estoniennes.

Les salles de serveurs qui s'y trouvent offrent une plate-forme pour des exercices et des stages de formation de l'Otan en matière de cybersécurité.

«Des spécialistes ont mis en place une infrastructure de travail, mais ils ne peuvent pas contrôler la façon dont les gens utilisent l'internet chez eux ni le degré de sécurité» observé, a indiqué Mihkel Tikk, chef du département de la Cyberpolitique du ministère estonien de la Défense.

Selon M. Tikk, les dernières cyberattaques ont visé le secteur estonien de la santé et le Mobile-ID – l'identification numérique de la téléphonie mobile.

La pandémie a aussi affecté le fonctionnement des cybercentres eux-mêmes, poussant à l'annulation des exercices hors ligne.

Néanmoins, le Centre de cyberdéfense de l'Otan se félicite de la popularité croissante de ses cours de cybersécurité en ligne.

Parmi ces cours: «Combattre une attaque de botnet», «Ressources opérationnelles face à la cybermenace» et «Comment parer à des attaques et défendre les systèmes IT».

Au 1er septembre, ces cours ont été suivis par 6.411 personnes et le Centre vise le seuil des 10 000 d'ici à la fin de 2020.

«Erreur monumentale»

Le Centre de cyberdéfense a été mis en place à la suite d'une série de cyberattaques d'une sophistication sans précédent sur des sites web estoniens en 2007.

Le mouvement politique de jeunes Russes pro-Kremlin, Nachi, a revendiqué ces agressions.

De nos jours, l'Estonie est confrontée à un «flux continu d'attaques» et y parer nécessite un travail constant, a déclaré à l'AFP Juri Luik, le ministre de la Défense de ce pays.

Cependant, selon lui, la situation de son pays était «plutôt bonne» puisqu'il a eu le temps de tirer les leçons des expériences passées.

«Nous avons travaillé assidûment pour garantir que les réseaux informatiques soient difficiles à pénétrer et que la communication soit cryptée – communication militaire mais aussi civile», a-t-il indiqué.

«Je pense qu'il est relativement plus difficile de nuire à l'Estonie, comparé à de nombreux autres pays qui ne sont peut-être pas habitués à travailler via le cyberespace et qui n'ont pas accordé trop d'attention à la cyberdéfense», a-t-il estimé.

Selon le ministre, tout ce travail ne servirait à rien sans une cyberhygiène de base, y compris la protection par des mots de passe.

«C'est extrêmement important et il faut s'en souvenir – surtout maintenant que de nombreuses personnes travaillent à domicile, via l'ordinateur.

«A la maison, vous pourriez baisser votre garde et c'est bien sûr une erreur monumentale», a-t-il insisté.

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