Plus de confort et de sécurité Quand les voitures se parlent

Fabian Hoberg, dpa/uri

14.7.2020

Les voitures modernes sont bardées d'électronique. Mais pour plus de confort et de sécurité, elles doivent également être en mesure de communiquer. Cependant, le débat fait rage quant à la meilleure technologie à adopter.

Des routes verglacées, du brouillard et une visibilité nulle. Le conducteur réduit immédiatement sa vitesse et se tient prêt à freiner. Il espère que personne n’emboutisse violemment l’arrière de son véhicule. Désormais, dans le meilleur des cas, grâce à la communication entre véhicules, ce type d’accident pourra être évité. En effet, les voitures seront déjà informées de la situation météorologique. Mais de quelle manière?

Une voiture ainsi connectée au réseau est équipée d'une sorte de routeur Wi-Fi d’une portée d'environ 500 mètres. Ce dispositif est capable d’envoyer et recevoir des données, et ce même si le véhicule est lancé à pleine vitesse. «Une portée de 100 mètres est suffisante pour la plupart des applications urbaines», souligne le professeur Horst Wieker, de l'Université des sciences appliquées de la Sarre (htw saar).

Les voitures interagissent aussi avec les infrastructures

À chaque seconde, ces véhicules transmettent des données via une connexion Wi-Fi sécurisée, fournissant ainsi des informations relatives à la vitesse, la position et la direction. Les opérations de la voiture sont également transmises, tels les freinages puissants ou l'activation des feux de détresse. Grâce à la communication car-to-x, les voitures peuvent «échanger» entre elles, mais aussi avec les infrastructures environnantes.

Outre la sécurité, ce transfert d’informations améliore également la circulation. Les feux tricolores peuvent indiquer en temps réel la vitesse à laquelle les véhicules circulent sur une «vague verte». Cette méthode permet d'économiser du carburant et de réduire les accidents.

Si le système venait à élargir son réseau, il pourrait également avertir les conducteurs lorsqu’un piéton ou un cycliste tourne ou leur signaler de façon précoce l’approche d’un véhicule de secours à une intersection. «Pour sa propre plateforme, VW mise sur la norme ETSI G5, que d’autres fabricants utilisent également», ajoute le professeur Wieker. Parmi ces autres acteurs figurent notamment les fabricants de feux tricolores ou l’entreprise autrichienne d’infrastructures Asfinag (autoroutes et péages).

Éviter plus d'accidents

«Plus les véhicules sont équipés de canaux de communication standardisés (car-to-car ou car-to-x), mieux ils peuvent s'avertir les uns les autres», confie le professeur Andre Seeck de l'Institut fédéral allemand de recherche sur le domaine routier (BASt). Le système recèle alors un potentiel de réduction considérable du nombre d'accidents graves de la route.

Selon les hypothèses optimistes, il faudra attendre environ 17 ans avant que 100% des nouveaux véhicules soient équipés en série de cette technologie. «Une pénétration du marché de 10 à 15 % serait suffisante pour percevoir des effets positifs sur le trafic routier. Cela pourrait être réalisé en trois ou quatre ans, si tous les constructeurs dotent prochainement leurs voitures de ce système», déclare le professeur Seeck.

Conversation entre Golf

Cette année, Volkswagen commercialise son nouveau modèle Golf, doté de la communication car-to-x en série. Grâce à un module radio intégré et au Wi-Fi ETSI G5 standardisé, les véhicules Golf peuvent échanger avec leurs congénères.

«L'avantage réside en la communication directe en temps réel, avec seules quelques millisecondes de différé. En outre, cela ne coûte rien au conducteur, puisque la communication n’est pas transmise par le réseau téléphonique», explique Thomas Biehle, développeur chez VW.

Les conducteurs de Golf s'informent et s'avertissent mutuellement en cas de pannes, d'accidents, d'embouteillages, de freinage d'urgence et de conditions de conduite dangereuses. À l'avenir, les barrières de chantier enverront un signal qui avertira les conducteurs quelques centaines de mètres avant que la chaussée ne se rétrécisse.

Quels sont les ressorts de la communication car-to-car?

Il n'y a toujours pas de consensus sur la norme idoine. Depuis 2016, Mercedes s'appuie sur une méthode de communication en réseau capable de transmettre des informations entre véhicules Mercedes, par le biais d’un cloud sécurisé. «Au moyen de ces données, nous créons un capteur étendu, capable de se projeter plusieurs kilomètres en avant», précise Nikolaus Kleiner, développeur chez Mercedes.

Les voitures ne requièrent aucun matériel particulier pour faire partie intégrante de l'intelligence de l'essaim. La voiture doit être dotée d'un appareil de navigation et la fonction LiveTraffic doit être activée. «Les conducteurs sont avertis par le biais de notifications. Ils savent précisément quand l’environnement va changer et peuvent ainsi s'y préparer à temps. Cela permet de minimiser les dangers et d'éviter les accidents», poursuit M. Kleiner.

Prudence, verglas

Dans le cadre d'un projet pilote, des informations anonymisées sur le verglas, provenant de véhicules Mercedes, ont été transmises à deux services de voirie de l’arrondissement de Zollernalb, en Allemagne. Ces informations ont été collectées par les capteurs ABS et ESP. Les employés disposaient alors d’une carte numérique montrant l’étendue de verglas, données de temps et de localisation incluses. Ainsi ont-ils pu savoir sur quels tronçons de route épandre du sel. Cette technologie permet d'économiser du sel et d'éviter les accidents.

BMW adopte une approche similaire et, depuis 2016, commercialise Connected Drive, un système de communication interne qui avertit les conducteurs de situations spécifiques. Les véhicules communiquent entre eux en transférant des données sur un serveur (que l’on appelle le backend), qui à son tour les transmet à d’autres véhicules, et ce sur de longues distances. «Ainsi, nous pouvons non seulement avertir un conducteur distant de quelques centaines de mètres, mais aussi le reste des personnes motorisées dans un rayon de plusieurs kilomètres", confie Joachim Göthel de BMW.

Les voitures ne «communiquent» pas encore directement entre elles, ni avec leur environnement. Cependant, le développeur estime utile la communication sur de courtes distances, en particulier pour les cas où le temps de réaction est critique, moins de 50 millisecondes, et où deux voitures doivent s'avertir rapidement. Dès 2021, BMW a l’intention de présenter un système, opérant sur le SUV iNext grâce à la nouvelle technologie 5G, qui permettra également de transmettre et de recevoir des données sur de courtes distances.

Contrairement à Volkswagen, BMW s'appuie sur la technologie de communication mobile C-V2X, une spécification LTE adoptée en 2017. D'autres fabricants développent déjà des systèmes sous l’égide de cette norme.

Toujours plus de données à échanger

Jan Burgard, de la société de conseil en stratégie Berylls, estime que les services numériques, tels que la mise en réseau, sont un enjeu majeur pour l'industrie automobile: «Les fabricants doivent créer une valeur ajoutée par rapport au smartphone. Ils ne peuvent générer cette valeur ajoutée qu'avec des services exclusifs», renchérit-il. «Les smartphones sont également capables de fournir des données précises à l’utilisateur sur les embouteillages, le verglas et la pluie, car ils ont accès à une vaste base de données.

Néanmoins, les entreprises de pointe, telles qu'Apple ou Google, ne fabriquent pas des produits capables de détecter l’allumage du feu brouillard arrière, ni la vitesse des essuie-glace. En outre, ce système de communication installé en série dans les véhicules est indispensable à la conduite autonome. Enfin, il est crucial d’adopter des normes qui permettront aux différents modèles de communiquer.

Plate-forme d'échange transversale

BMW cherche à mettre en place une plate-forme permettant à tous les constructeurs et usagers de la route d'échanger des informations pertinentes en matière de sécurité. À cette fin, les Bavarois, en collaboration avec Daimler, Ford, Volvo, ainsi que les fournisseurs de services de géodonnées HERE Technologies et TomTom, ont lancé il y a quelques mois un serveur neutre, destiné à l'échange et l’association de données routières importantes pour la sécurité.

Ils mettent également leur système d’avertissement à disposition pour les applications à but non lucratif. «Ainsi voulons-nous renforcer la pénétration du marché et favoriser l’apparition d’un nouvel écosystème. Plus les véhicules seront mis en réseau et plus les données seront partagées, plus le système car-to-x sera précis et exhaustif», explique M. Göthel. Tout cela permettra d’améliorer la sécurité routière, pour tous.

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