«Tu fais tout pour survivre»Un ado ukrainien traite Poutine de «connard» puis devient propagandiste russe
Sven Ziegler/trad
29.4.2024
En 2022, Denis Kostev, un adolescent ukrainien de 16 ans, a fait sensation avec une vidéo TikTok dans laquelle il qualifiait le président russe Vladimir Poutine de «connard». Un an plus tard, il apparaît dans une vidéo pro-russe, en uniforme militaire, chantant les louanges de l'armée russe. Depuis, il a réussi à s'enfuir de Russie. L'histoire de Denis n'est pas un cas isolé: l'hebdomadaire allemand «Der Spiegel» retrace son destin.
Sven Ziegler/trad
29.04.2024, 15:23
29.04.2024, 15:37
Marc Schaller
Des milliers d'enfants ukrainiens ont été enlevés et envoyés en Russie depuis le début de la guerre. Officiellement, ils devaient être protégés de la guerre, mais en réalité, beaucoup d'entre eux ont été endoctrinés pour devenir des patriotes russes.
«J'avais peur»
Denis a été enlevé à l'automne 2022. La directrice de l'école professionnelle avait alors annoncé que tous les enfants allaient être envoyés en «camp de vacances» en Crimée occupée par la Russie pour deux semaines. Mais les enfants ne sont pas revenus après deux semaines, ils sont restés en Crimée.
«J'ai fait ce qu'il fallait pour ma sécurité», dit-il au Spiegel avec le recul. Il raconte les menaces et les intimidations du FSB, le service de renseignement intérieur russe. «J'avais peur», avoue-t-il. «En temps de guerre, tu fais tout pour survivre.»
«Une partie de mon âme est ukrainienne, une partie russe»
Au cours de l'hiver, il est transféré dans un lycée professionnel dans le sud de l'Ukraine et reçoit désormais régulièrement des visites du FSB. Les hommes l'emmenaient dans une Toyota blanche, lui donnaient l'ordre de faire des vidéos ou d'espionner les enfants dans le foyer. Sa haine pour l'armée russe a apparemment disparu, Denis Kostev fait maintenant l'éloge de Poutine et de l'armée russe.
En réalité déterminé à retrouver sa liberté, Denis tente de s'enfuir. Il veut que sa grand-mère vienne le chercher - la loi le permet. Mais peu de temps avant son départ, il est accosté par des agents du FSB armés qui le forcent à envoyer un message vocal à ses proches. Dans ce message, il dit qu'il veut rester en Russie. Sa grand-mère est expulsée. Ses parents ne peuvent pas l'aider - ils luttent contre des problèmes d'alcool et de drogue.
Finalement, il parvient à s'enfuir. Grâce à une organisation humanitaire, il peut passer par la Biélorussie pour se rendre en Pologne et finalement en Allemagne. Aujourd'hui, Denis espère une nouvelle vie en Allemagne. Mais son chemin est marqué par l'incertitude et le doute. Pourra-t-il un jour retrouver confiance? Dans quelle mesure la propagande russe a-t-elle influencé sa pensée? Ces questions accompagnent Denis sur son chemin vers l'avenir. Aujourd'hui, il dit: «Une partie de mon âme est ukrainienne. Et une partie russe.»