Ouzbékistan Dix-huit morts lors de troubles la semaine dernière

ATS

4.7.2022 - 11:14

Le parquet ouzbek a fait état lundi de 18 morts lors des troubles ayant opposé en fin de semaine dernière manifestants antigouvernementaux et forces de sécurité dans le nord-ouest de l'Ouzbékistan. Aucune opposition n'est tolérée dans le pays.

Arrivé au pouvoir en 2016 à la mort de son prédécesseur, l'impitoyable Islam Karimov, Chavkat Mirzioïev (à gauche) a mené d'importantes réformes économiques et sociales, promettant aussi des timides mesures de libéralisation politique. Réélu l'an dernier, il a plus récemment donné un tour de vis.
Arrivé au pouvoir en 2016 à la mort de son prédécesseur, l'impitoyable Islam Karimov, Chavkat Mirzioïev (à gauche) a mené d'importantes réformes économiques et sociales, promettant aussi des timides mesures de libéralisation politique. Réélu l'an dernier, il a plus récemment donné un tour de vis.
ATS

Keystone-SDA

Ce nouvel épisode de violences s'ajoute à la longue liste de heurts, d'émeutes, de répressions et d'affrontements qui secouent régulièrement les ex-républiques soviétiques d'Asie centrale sur lesquelles la Russie exerce une grande influence.

«Dix-huit personnes sont mortes de leurs blessures lors des troubles de masse à Noukous», a indiqué Abror Mamatov, représentant du parquet, cité par l'agence Ria Novost. La garde nationale ouzbèke a de son côté fait état de 243 blessés.

Le président de l'Ouzbékistan, Chavkat Mirzioïev, avait reconnu dimanche des «victimes» aussi bien parmi les civils que la police à la suite des manifestations vendredi et samedi pour dénoncer un projet de réforme constitutionnelle réduisant l'autonomie du Karakalpakistan, région pauvre du nord-ouest ouzbek dont Noukous est la capitale.

Moyens de communication coupés

Le déroulé des évènements reste très flou, les autorités ayant coupé l'essentiel des moyens de communication durant les affrontements. Quelques vidéos ont filtré sur internet, montrant des personnes blessées et inconscientes.

Samedi, un état d'urgence d'un mois a été décrété dans la région. Parallèlement, le président ouzbek a promis de retirer les amendements constitutionnels décriés.

M. Mirzioïev a aussi accusé les organisateurs des manifestations de «se cacher derrière des slogans» politiques pour chercher à «prendre le contrôle des bâtiments officiels du gouvernement local» et pour s'emparer d'armes.

Rester au pouvoir plus longtemps

Depuis son indépendance à la chute de l'URSS, l'Ouzbékistan n'a jamais laissé émerger d'opposition. Arrivé au pouvoir en 2016 à la mort de son prédécesseur, l'impitoyable Islam Karimov, Chavkat Mirzioïev a mené d'importantes réformes économiques et sociales, promettant aussi des timides mesures de libéralisation politique.

Réélu l'année dernière, il a plus récemment donné un tour de vis. Le chef de l'Etat veut ainsi réformer la Constitution pour qu'elle lui permette de rester au pouvoir plus longtemps.

Les troubles de Noukous sont la crise interne la plus grave à laquelle le président ouzbek a été confronté jusque-là. En 2005, son prédécesseur Islam Karimov avait fait réprimer dans le sang des manifestations à Andijan (est). Des centaines de personnes y sont mortes.

«Affaire interne» pour Moscou

L'Ouzbékistan est de loin le plus peuplé des pays de l'Asie centrale ex-soviétique avec quelque 35 millions d'habitants.

Le Kremlin, allié traditionnel de Tachkent, a jugé que les évènements de Noukous étaient «une affaire interne». L'Union européenne, qui a encouragé des efforts de réformes ces dernières années, a appelé à une «enquête transparente et indépendante» et regretté «les pertes de vies humaines».

Elle a relevé que le président avait renoncé aux amendements controversés, tout en l'appelant à «garantir les droits humains».

Précédents

En janvier, c'est un autre Etat autoritaire de la région, le Kazakhstan, qui a écrasé un vaste mouvement de contestation, faisant plus de 230 morts. Ces événements avaient constitué un choc, ce pays ayant été jusqu'alors considéré comme le plus stable et le plus prospère de la région.

Les pays voisins ont aussi connu des périodes mouvementées dans le passé récent, le Tadjikistan et le Kirghizstan s'affrontant par exemple régulièrement à leur frontière commune, du fait notamment de conflits sur l'accès aux terres et à l'eau.

Les autorités tadjikes viennent aussi de mener une opération présentée comme «antiterroriste» pour neutraliser d'influentes figures locales dans la région autonome de Gorno-Badakhchan (BGAO), une vaste zone montagneuse du massif du Pamir.

Le Kirghizstan a lui connu depuis 2005 trois révolutions (2005, 2010, 2020), ainsi que de graves violences ethniques visant la minorité ouzbèke en 2010 dans le sud du pays. La Russie soutient les pouvoirs en place dans ces pays qu'elle considère comme appartenant à son pré carré.

Vastes ressources naturelles

L'Asie centrale, au carrefour entre l'Asie du Sud, la Chine, l'Europe et la Russie, dispose de vastes ressources naturelles (hydrocarbures, minerais) qui suscitent les convoitises russes, chinoises et occidentales.