AfriqueLa légalisation de l'avortement adoptée au Bénin
ATS
21.10.2021 - 16:40
Le Bénin est devenu jeudi l'une des très rares nations en Afrique à autoriser l'avortement. Ce après le vote par l'Assemblée nationale d'une loi qui divise fortement l'opinion.
21.10.2021, 16:40
21.10.2021, 19:43
ATS
L'interruption volontaire de grossesse (IVG) était auparavant interdite au Bénin sauf circonstances exceptionnelles, comme lorsque la grossesse était la conséquence d'un viol ou d'une relation incestueuse ou en cas de risque pour la vie de la femme. Dans la nuit de mercredi à jeudi, les députés béninois ont voté une modification de la loi sur la santé sexuelle et la reproduction datant de 2003.
A la demande de la femme enceinte, l'avortement «peut être autorisé» jusqu'à douze semaines «lorsque la grossesse est susceptible d'aggraver ou d'occasionner une situation de détresse matérielle, éducationnelle, professionnelle ou morale», selon la nouvelle loi. Elle a été adoptée à l'issue d'un débat houleux au sein de l'hémicycle, certains députés ont même quitté la salle.
Après le vote, le ministre de la Santé Benjamin Hounkpatin a «salué la clairvoyance des députés», au cours d'un point presse. La légalisation de l'avortement va «permettre de soulager les peines de nombreuses femmes qui, face à la détresse d'une grossesse non désirée, se trouvent obligées de mettre leur vie en jeu», a-t-il déclaré.
Levée de bouclier
Chaque année, près de 200 femmes meurent au Bénin des suites de complications d'un avortement, selon les chiffres du gouvernement. «Plusieurs familles continuent de pleurer la perte d'un enfant, d'une épouse, d'une mère partie tragiquement à la suite d'un avortement compliqué. Ces blessures sont irréparables. Pourtant on peut bien éviter ce drame qui se joue sous nos yeux», a ajouté le ministre. «Mon département travaille déjà sur les décrets d'application de la présente loi», a-t-il précisé.
Au Bénin, pays très religieux, la mesure a déclenché une levée de bouclier d'une partie de la société et notamment de la Conférence épiscopale du pays. Dans un communiqué la veille, elle affirmait que «la légalisation de l'avortement est la culture de la mort» et qu'il existait des «alternatives honnêtes et fiables pour remédier aux maux que l'on entend solutionner par la légalisation de l'avortement».
Jeudi après le vote, une partie de l'opinion a exprimé sa déception et son opposition, comme Alphonsine Goudalo, une Béninoise de 41 ans, «très déçue qu'un parlement entier fasse un tel choix». «Les leaders religieux devraient monter au créneau pour obliger le parlement à remettre en cause ce vote», a ajouté à l'AFP cette responsable associative.
«Sauver des vies»
Face à cette opposition, le ministre a rappelé jeudi qu'il s'agissait d'une «mesure de santé publique dont l'unique objectif est de sauver des vies humaines». De son côté, la militante féministe Faustine Adjagba s'est au contraire réjouit de la légalisation de l'avortement.
«Il faut permettre aux femmes de choisir librement si elles veulent enfanter», dit-elle. Cette femme de 35 ans ajoute qu'il faut protéger les femmes «de tous les charlatans-avorteurs-cureteurs qui pullulent dans les villes et la campagne» et mettent leur vie en danger.
Totalement interdit dans une minorité de pays à travers le monde, l'accès à l'avortement demeure très restrictif voire illégal sur le continent africain. Il y reste pourtant largement pratiqué dans des conditions peu sécurisées. Ce sont globalement les femmes d'Europe, d'Amérique du Nord et d'Océanie qui bénéficient des législations les plus libérales, acquises parfois très récemment comme en Nouvelle-Zélande (dépénalisation en mars 2020).
Aux Etats-Unis, l'avortement a été autorisé par un arrêt célèbre ("Roe v. Wade") de la Cour suprême en 1973. Mais le droit à l'avortement y fait toujours l'objet d'une féroce bataille.Le Texas a adopté une législation très restrictive, entrée en vigueur le 1er septembre.
La loi texane interdit l'avortement une fois que les battements de coeur de l'embryon sont détectés, soit environ six semaines de grossesse et ne prévoit pas d'exception en cas d'inceste ou de viol. Le gouvernement du président démocrate Joe Biden a formellement demandé le 18 octobre à la Cour suprême des Etats-Unis de bloquer cette loi.
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