Trésor archéologique Un dolmen bernois témoigne du savoir-faire au Néolithique

uc, ats

29.4.2022 - 08:00

Les humains qui vivaient il a y 5000 ans dans nos contrées savaient construire et restaient au même endroit pour plusieurs générations. Une ancienne sépulture en forme de dolmen explorée à Oberbipp (BE) en livre un riche aperçu.

Les chercheurs ont trouvé dans le dolmen les squelettes de 42 personnes.
Les chercheurs ont trouvé dans le dolmen les squelettes de 42 personnes.
ATS

Keystone-SDA, uc, ats

Cette sépulture datant du Néolithique découverte en 2012 s'est avérée être un véritable trésor pour la science. Dix ans plus tard, l’équipe de recherche multidisciplinaire, cofinancée par le Fonds national suisse (FNS), a publié ses résultats dans le Journal of Archaeological Science: Reports.

Conjuguées avec les recherches antérieures, les nouvelles connaissances sur la construction et l’histoire de ce dolmen livrent une image étonnamment nette des humains qui vivaient il y a 5000 ans au pied sud du Jura.

Bonnes connaissances techniques

«Au cours de ces dix années, grâce à un saut dans le développement des méthodes, en particulier dans le domaine de l’anthropologie, nous sommes parvenus à découvrir bien plus que ce dont nous avions rêvé», explique Marianne Ramstein, du Service archéologique du canton de Berne, citée vendredi dans un communiqué du FNS.

La chercheuse s’est surtout intéressée à la construction du dolmen qui est exceptionnellement bien conservé. Elle a ainsi découvert que les pierres utilisées pour la chambre mortuaire provenaient toutes d’une zone située dans un rayon d’environ un kilomètre.

«D’importants moyens ont été utilisés pour construire cette sépulture», indique-t-elle: «On a intentionnellement choisi différentes sortes de pierres et elles ont été soigneusement assemblées, ce qui témoigne de bonnes connaissances techniques».

Marianne Ramstein mentionne par exemple le choix d’une plaque de tuffeau pour l’entrée. Il s’agit d’une roche facile à travailler et à ajuster.

Squelettes de 42 personnes

En collaboration avec l’Université de Bâle, Marianne Ramstein a aussi déterminé ce qui est advenu du dolmen au cours des époques suivantes. Probablement toujours visible durant l’Empire romain et le haut Moyen Âge, la tombe a encore reçu des visiteurs, ce dont témoignent des fragments de céramique contemporains.

À partir du Moyen Âge, les terres ont ensuite été régulièrement inondées afin de les rendre fertiles. Les sédiments emportés ont peu à peu recouvert la tombe; à l’époque moderne, seul son sommet apparaissait encore.

«Cette manière de pratiquer l’agriculture, typique de l’endroit, a empêché qu’elle soit découverte plus tôt et a contribué à sa très bonne conservation», relève la chercheuse. De fins sédiments ont aussi obstrué les espaces entre les pierres, ce qui a permis la préservation des squelettes de 42 personnes enterrées là.

Trois générations d’hommes

Les recherches menées par un groupe réuni autour de Sandra Lösch, de l’Université de Berne, et par une équipe de l’Institut Max-Planck de science de l’histoire humaine à Iéna (D), ont aussi livré de nombreuses informations. Les scientifiques ont notamment examiné les ossements, déterminé la composition chimique des dents et recherché les liens de parenté grâce à des analyses d’ADN.

Des hommes apparentés de trois générations au moins y ont été enterrés, ce qui montre qu’une population s’était établie durablement près du dolmen. Les femmes enterrées là venaient peut-être d’autres régions. Les recherches permettent aussi de conclure que l’alimentation des personnes enterrées provenait principalement de la culture des champs et un peu de l’élevage.

«Autour des lacs suisses, on a déjà bien étudié de nombreux vestiges de peuplements datant du Néolithique. Mais jusqu’à présent on ne savait pratiquement rien sur les personnes qui vivaient dans l’arrière-pays à cette époque», souligne Marianne Ramstein.

Il est rare que des constructions, des céramiques ou des squelettes soient conservés. «Le site découvert à Oberbipp nous aide à combler cette lacune», conclut la spécialiste.